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Il est épuisé, pense "ne plus être bien traitant" : un médecin quitte son poste aux urgences de Laval

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Alors qu'un rassemblement de soignants et une grève sont prévus ce mardi au Centre hospitalier de Laval pour dénoncer les conditions de travail aux urgences, Pierre-Maxime Rafaud a décidé de quitter son poste aux urgences. La charge de travail est devenue trop forte pour ce praticien hospitalier.

Hôpital de Laval (illustration) Hôpital de Laval (illustration)
Hôpital de Laval (illustration) © Radio France - Martin Cotta

Nouvelle de journée de mobilisation des personnels soignants ce mardi, quelques jours seulement avant le premier tour des élections législatives. L'appel lancé par la CGT a depuis été repris par plusieurs autres syndicats et le but est d'alerter, une nouvelle fois, sur les conditions de travail difficiles aux urgences. Ces conditions difficiles, c'est justement ce qui a poussé Pierre-Maxime Rafaud, médecin urgentiste, à quitter l'hôpital de Laval en novembre 2021 après quatre ans de praticien hospitalier aux urgences. Pour lui, la charge de travail était devenue trop forte à supporter. 

"J'avais le ressenti de faire du mal"

Ça faisait déjà plusieurs années que l'idée de partir lui trottait dans la tête. "J'avais l'impression de ne plus finalement faire le métier pour lequel j'avais été formé et le métier que j'avais choisi", a expliqué Pierre-Maxime Rafaud à France Bleu Mayenne, "parce que les conditions de travail se sont dégradées et j'avais le ressenti personnel, parfois, de faire du mal et de ne plus être bien traitant"

L'épidémie de Covid-19 n'a également rien arrangé. Au départ, les soignants ont eu les moyens, mais une fois la pandémie un peu éloignée, le soufflet est vite retombé pour ses collègues et lui. "Le Covid nous a beaucoup fatigués, tous les soignants ont beaucoup donné, on s'est beaucoup démené pendant deux ans et je crois aussi que le retour à l'état normal du fonctionnement de l'hôpital public, après avoir connu une période un peu enchantée", décrit Pierre-Maxime, parce qu'au début du Covid, "on s'est tous retroussé les manches, on s'est tous mis autour d'une table, on a tous travaillé ensemble, que ce soit à l'administratif, les soignants et les politiques aussi, on nous a donné les moyens à ce moment-là de travailler efficacement et on a vu que ça pouvait extrêmement bien fonctionner"

Mais voilà, le retour à la normale est dur à digérer, "quand cette pandémie s'est un peu arrangée, que la pression s'est un peu allégée, on s'est rendu compte qu'on est retombé dans les vieux travers et ce contraste fait que ça nous a d'autant plus dégoutés".

"Ça reste mon métier, c'est le métier que j'ai choisi, c'est le métier que j'aime et d'ailleurs je reviens régulièrement à l'hôpital de Laval pour faire des gardes, surtout pour rendre service à ceux que j'ai quittés", Pierre-Maxime Rafaud

Plus serein dans le privé

Il préfère donc se préserver et part rejoindre sa compagne en région parisienne pour exercer dans le privé. Aujourd'hui, Pierre-Maxime Rafaud se sent mieux. "J'ai une qualité de vie qui n'a rien à voir, dans ce genre de structure, on n'a aucune charge administrative, je n'ai par exemple aucune comptabilité à faire, mon contact avec le patient est réduit uniquement à l'exercice de la médecine, écouter, établir un diagnostic, faire une ordonnance et c'est tout, le reste je ne m'en occupe pas", souffle-t-il, "c'est un confort psychologique incroyable, ce qui est un peu à l'opposé du travail aux urgences aujourd'hui"

Ce praticien hospitalier pointe du doigt le manque de lits en aval pour les patients qui sortent des urgences, "si vous avez une porte de sortie pour vos patients, en général ça se passe très bien et le travail est agréable et confortable", ajoute-t-il.

Après, il ne cache pas sa nostalgie des urgences, "ça reste mon métier, c'est le métier que j'ai choisi, c'est le métier que j'aime et d'ailleurs je reviens régulièrement à l'hôpital de Laval pour faire des gardes, surtout pour rendre service à ceux que j'ai quittés", continue Pierre-Maxime. Il n'est effectivement jamais loin de Laval, il revient une fois par semaine ou toutes les deux semaines pour prêter main-forte. "Moi je suis Mayennais d'origine donc j'ai une affection particulière pour ce territoire, pour cette équipe des urgences et pour cet hôpital", ajoute-t-il, "alors oui, j'ai gagné énormément en qualité de vie mais j'ai aussi ce petit pincement au cœur d'avoir quitté le métier pour lequel je me suis battu, pour lequel je me suis formé".

Aujourd'hui pour Pierre Maxime Rafaud, dans les conditions actuelles, il n'est plus possible de faire une carrière entière aux urgences et "l'espérance de vie d'un urgentiste est de moins de dix ans", conclut le praticien.

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