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Santé : "On paye aujourd'hui vingt années de mauvais choix de l'État" déplore le chef du Samu de Haute-Garonne

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Le professeur Vincent Bounes, chef adjoint du pôle médecine d'urgence du CHU de Toulouse, responsable du Samu 31 et vice-président de la Région Occitanie en charge de la santé, répond ce jeudi aux questions de France Bleu Occitanie sur la situation dans les services d'urgences.

Vincent Bounes, chef adjoint du pôle médecine d'urgence au CHU de Toulouse, chef du Samu de Haute-Garonne. Vincent Bounes, chef adjoint du pôle médecine d'urgence au CHU de Toulouse, chef du Samu de Haute-Garonne.
Vincent Bounes, chef adjoint du pôle médecine d'urgence au CHU de Toulouse, chef du Samu de Haute-Garonne. © Radio France - Marion Chantreau

Les services d'urgences sont sous tension en Haute-Garonne. La clinique d’Occitanie de Muret est fermée la nuit en ce moment, de 23 heures à 9 heures du matin. Les urgences de Joseph Ducuing à Toulouse ont dû fermer une dizaine de nuits au mois d'avril. Le professeur Vincent Bounes, chef adjoint du pôle médecine d'urgence au CHU de Toulouse, chef du Samu en Haute-Garonne et vice-président de la Région Occitanie en charge de la santé était notre invité ce jeudi sur France Bleu Occitanie.

Au CHU de Toulouse, quelle est la situation ?

Vincent Bounes : les urgences du CHU sont ouvertes, il n'y a pas de problème d'effectif. La difficulté en revanche, c'est l'attente qui peut être de plusieurs heures pour les patients. Mais nous sommes inquiets sur certaines structures privées pour passer l'été. Les soignants doivent prendre des vacances, donc on se retrouve avec des fermetures de lits. Les médecins généralistes prennent aussi des vacances, on a moins d'aval, donc la tension se reporte sur les services des urgences.

Il y a un déficit de médecins urgentistes, de médecins régulateurs au Samu, d'infirmiers ?

Il y a un manque général de soignants, un vrai malaise dans le secteur de la santé qui s'est accentué après la crise Covid. Un malaise qui sanctionne vingt années de mauvais choix de l'État dans le domaine de la santé. Tout le monde souffre : le secteur public, privé, libéral. Le malaise va s'accentuer dans les prochaines années, on aura pas de soignants d'ici plusieurs années et de médecins avant sept ou huit ans.

On a tardé à former des jeunes médecins, à revaloriser le métier de soignant ?

Oui clairement. Le numerus clausus en médecine a été dramatique, on a pas formé assez de médecins, et il faut dix ans pour former un médecin. Ce numerus clausus a été arrêté, mais il faudra encore quelques années pour avoir des médecins formés. Il y a un déficit de revalorisation des infirmiers, peu considérés en France. La médiane de paye des infirmiers est inférieure de 10% à la médiane des salaires français.

Patrick, un auditeur toulousain, témoigne du manque d'ambulances du Samu. À l'automne dernier, il s'est vu répondre qu'il fallait transporter une urgence avec une voiture personnelle, que répondez-vous ?

Au mois de novembre et décembre, en plein pic des épidémies, on s'est retrouvé débordé en effet. On dépend des moyens que l'on nous donne. On n'a pas assez d'ambulances disponibles, on fait souvent appel aux privés. Ce qu'il faut, c'est un vrai plan Marshall de la santé si on veut être bien soigné en France, il faut vraiment donner des moyens aux soignants.

Les délais d'attente quand on appelle le Samu sont très longs nous dit un auditeur, vous manquez de médecins régulateurs ?

Le Samu prend environ 35.000 appels de plus chaque année. Le Samu, c'est désormais 700.000 appels par an, on mériterait d'être plus nombreux pour traiter les appels bien sûr. Je plaide pour avoir plus de moyens, mais je dépends des dotations qu'on me donne. Les soignants sont dévoués, travaillent avec beaucoup de passion, d'ambition, mais on n'a pas toujours les moyens de bien travailler.

Le premier réflexe, en cas de problème de santé, c'est d'appeler son médecin traitant. Il existe aussi des accueils de soins non programmés, SOS Médecin allées Jean Jaurès, vous en avez un à Purpan désormais, la clinique Saint-Exupéry à Toulouse.

L'Agence régionale de santé veut plus de communication entre le secteur privé et le public, vous ne le faites pas assez ?

On fait partie d'un groupement de territoires avec Lavaur, Carcassonne, où on a des postes partagés, et on a un pôle territorial avec l'hôpital d'Auch, sur lequel 70 médecins urgentistes vont aider. On était sinon face à un risque de fermeture de l'hôpital central de tout un département.

Et la proposition de l'ARS de faire venir des internes en médecine pour renforcer les services des cliniques privées ?

Malheureusement les internes ne sont pas de la main d'œuvre, ils sont en apprentissage, les exposer aux flux des cliniques privées, c'est les mettre en difficulté. Ils sont déjà déployés dans tous les hôpitaux de périphérie, comme à Saint-Gaudens. C'est l'universitaire qui vous parle, mais ce sont des médecins en formation, qu'on doit encadrer, on ne peut pas les déployer dans des services où il n'y a pas de qualités pédagogiques pour les former.

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