Mort d'Alaïs à Montpellier : deux accusés aux profils complètement différents

Difficile d'imagine portrait plus sombre que celui que dépeint Priscillia H. à la barre. À l'époque des faits, elle était la compagne de Quentin Robert, qui s'est pendu en prison une dizaine de jours avant l'ouverture du procès, devant la cour d'assises de l'Hérault ce lundi, au cours duquel il devait comparaitre pour avoir battu à mort Alaïs Ragot, une prostituée de 19 ans dont il avait été le proxénète, dans la nuit du 9 au 10 février 2020, chez elle, à deux pas de la gare Saint-Roch

Une succession de traumatismes

Priscilla H., 32 ans, résume sa vie à un enchainement de malheurs. Des parents trop jeunes pour s'occuper d'elle et plus tard, un beau-père auteur de violences physiques et sexuelles. Elle-même rencontre un homme, quand elle 17 ans, avec qui elle fait deux enfants qu'elle emmènera dans sa fuite, après avoir été frappée à coups de batte de baseball qui l'enverront à l'hôpital.

Enfant battue puis femme battue

Elle se réfugie dans le sud de la France, à Béziers, où elle fait la rencontre de Quentin Robert par l'intermédiaire d'une connaissance, fin 2019, Il lui avoue qu'il est proxénète mais qu'il veut changer de vie. Ils auront une relation, brève, juste avant les faits. "Mais qu'est-ce qui vous a plu chez lui ?" interroge Sylvie Gossent, la présidente de la cour. "Il m'a donné beaucoup d'attention" confie l'accusée. Depuis 2017, elle a été condamnée plusieurs fois pour conduite sans permis et une fois, en 2022, pour avoir fait la mule : arrêtée avec 2,8 kg de résine de cannabis en provenance d'Espagne.

"J'aimerais demander pardon même si je sais que c'est impardonnable"- Priscillia H.

Priscilla H., fera justement la connaissance de Driss N, son co-accusé, à Béziers également, un jour où il lui a vendu du cannabis, ce que l'intéressé réfute. Il a bien été condamné pour détention, transport et usage de stupéfiants en 2017 mais le jeune homme de 27 ans se présente comme un consommateur et non pas un trafiquant. Pas d'autre mention à son casier judiciaire.

"Deux déracinements majeurs" selon l'enquête de personnalité

Il est né au Maroc où il a vécu jusqu'à l'âge de sept ans, avant d'émigrer en Italie avec sa famille, dans la région de Modène. En 2013, après un tremblement de terre et alors qu'il a 16 ans, nouveau départ, direction Béziers. L'adolescent de l'époque, qui ne parle pas le français, s'adapte plutôt bien. La présidente de la cour relève qu'il baignait dans "un milieu familial bien structuré".

"J'assume mes responsabilités mais je n'ai jamais voulu la mort d'Alaïs"- Driss N.

Pourtant, en 2019, il y a une fracture nette : décrochage scolaire avec absences répétées. Driss N. n'a d'autre explications que de "mauvaises fréquentations", des "mauvais choix". Son père, appelé à la barre, garantit que son fils est rentré dans le droit chemin. Il demande l'autorisation avant de se tourner vers les proches d'Alaïs Ragot pour leur présenter ses "condoléances" et leur dire qu'il est "très désolé".

Même s'il n'a pas porté de coup, il est reproché à Driss N. de n'avoir rien fait pour empêcher le massacre pendant qu'il tenait en respect deux témoins présents, avec un pistolet à bille, dans l'appartement d'Alaïs. Quant à Pricillia H., ses accusateurs estiment qu'elle a facilité l'expédition punitive en "recrutant" Driss N. et en servant de chauffeur, en toute connaissance de cause.