Passer au contenu

Erosion du trait de côte : plus de 99.000 logements voués à disparaitre d'ici 2100, dans le Nord-Pas-de Calais ?

Par

Des logements et des activités économiques sont menacés sur la Côte d'Opale, car le littoral recule en lien avec le réchauffement climatique. Si rien n’est fait, la facture dépasserait les 14,5 milliards d’euros, selon l'évaluation des dégâts effectuée par les experts du Cerema.

Signe du recul du trait de côte, les deux blockhaus perchés sur la dune de Oye-Plage, il y a 40 ans, sont aujourd'hui à plus de 80 m. Signe du recul du trait de côte, les deux blockhaus perchés sur la dune de Oye-Plage, il y a 40 ans, sont aujourd'hui à plus de 80 m.
Signe du recul du trait de côte, les deux blockhaus perchés sur la dune de Oye-Plage, il y a 40 ans, sont aujourd'hui à plus de 80 m. © Radio France - Matthieu Darriet

Des risques de submersion marine, des falaises qui s’effondrent : que va devenir le littoral de la Côte d’Opale d’ici la fin du siècle, s’il est grignoté chaque jour un peu plus en lien avec le réchauffement climatique ? C’est la question que pose le Cerema, le Centre d‘études sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement qui dépend du ministère de la Transition écologique. Dans un rapport qu’ils viennent de publier, ces experts annoncent la disparition de nombreuses terres, et des maisons qui sont au-dessus.

Ils ont établi des scénarios et un inventaire des dégâts possibles, avec trois échéances. Le Pas-de-Calais serait l’un des départements les plus concernés. D'ici quatre ans (2028), six maisons vont ainsi disparaître. Elles sont déjà identifiées et inhabitées, sur les falaises d'Equihen, dans l'agglomération de Boulogne-sur-Mer.

Mais quand on anticipe 2050, le Cerema recense une trentaine de logements voués à disparaître dans le Pas-de-Calais en générant 2,5 millions d'euros de dégâts. Une quinzaine de locaux d'activités sont concernés également, dont deux campings.

Un scénario catastrophe pour 2100

Et pour les simulations à 2100, d'ici la fin du siècle, ces experts tablent sur un scénario catastrophe avec plus de 51.200 logements rayés de la côte et plus de 4.300 locaux d'activité. La facture des dégâts pourrait alors atteindre plus de 7, 5 milliards d'euros, dans le Pas-de-Calais. Dans le Nord, le Cerema ne table pas sur des dégâts significatifs à l’horizon 2050, mais il les évalue à plus de 7 milliards d’euros en 2100 (48.000 logements et 2.800 locaux d'activité).

À Berck et en baie d'Authie, une des zones les plus concernées, des travaux sont déjà prévus (17 millions d'euros programmés) pour augmenter la sécurité de 12. 000 habitants, rappelle Daniel Moitel, le président de l'association SOS Baie d'Authie : "Si aujourd'hui, on enlève des digues, et bien, on a la même carte à peu de chose près. Si le niveau de la mer augmente d'un mètre, comme ce sont des digues de terre, il suffit de faire un mètre de plus ! Nous, en baie d'Authie, on a un projet, mais au bout de douze ans, on n'a toujours pas fait les travaux ! Les digues vont être relevées d'1,5 m. Donc, ça tient compte de l'élévation du niveau de la mer."

Cette modélisation du Cerema a surtout pour but de montrer l'impact des décisions d'aujourd'hui, si nous ne faisons rien face au changement climatique. Pour concentrer nos efforts sur les zones les plus sensibles, humainement, il faudra sûrement accepter d'abandonner des terres en les rendant inhabitables.

150 maisons dans le quartier des Escardines, à Oye-Plage

C'est un sujet de préoccupation pour les habitants du quartier des Escardines, à Oye-Plage, entre Calais et Dunkerque. Parmi les 150 maisons de ce petit paradis, lancé dans les années 1970, il y a celle de Jean. C'est l'une des plus directement exposées : elle est adossée à la dune qui ne cesse de reculer. Les deux blockhaus qui se trouvaient au sommet, il y a 40 ans, sont aujourd'hui sur la plage, à plus de 80 mètres de la dune.

A Oye-Plage, les 150 maisons du quartier des Escardines, adossées à la dune, sont menacées par le recul du trait de côte.
A Oye-Plage, les 150 maisons du quartier des Escardines, adossées à la dune, sont menacées par le recul du trait de côte. © Radio France - Matthieu Darriet

Mais pas de quoi inquiéter Jean : "Cela ne m'empêche pas de dormir. Même si j'espère qu'un jour ça va bouger. Pas le trait de côte, mais les autorités ! Pour faire quelque chose ! En Hollande, il y a des murs, il y a aussi du sable qu'on peut prendre ailleurs et le remettre là. Mais ici, c'est un peu difficile, car il y a des bombes et des mines qui limitent les travaux. Mais j'espère qu'ils pourront les faire quand même, un jour."

Partir n'est donc pas une solution envisagée par Jean, dont un des neveux vient d'acheter une des maisons voisines. Mais, pour André, un des premiers habitants de ce quartier, tout est ouvert : "Il ne faut pas que ça nous arrive comme en Vendée ! Si vraiment, on était dans l'embarras avec cette histoire de dune, c'est l'État qui devrait racheter les maisons. Mais est-ce que tout le monde y trouverait son compte ? Si cette opportunité est bonne... pourquoi pas, mais à condition de retrouver l'équivalent de ce que j'ai."

Dans ce quartier des Escardines, des réunions publiques ont eu lieu pour financer les travaux dans les maisons afin de protéger les habitants contre les inondations et la submersion. Mais, ici, l'État va devoir faire un choix entre la protection à tout prix et l'abandon du quartier.

Ma France : Améliorer le logement des Français

Quelles sont vos solutions pour aider les Français à bien se loger ? En partenariat avec Make.org, France Bleu mène une consultation citoyenne à laquelle vous pouvez participer ci-dessous.

undefined