Le test de Rohrbach
Sortir avec Rachel, c'était comme s'emparer du fort Casso. Impossible. Pas la peine de s'y casser le cœur et les dents. Valait mieux faire comme les allemands : contourner et tracer son chemin.
Rachel est là, à la sortie du centre de test, comme elle l'avait promis. Elle laisse tomber son mégot et l'écrase du bout du pied sur le bitume du parking déjà brûlant. Le soleil tape fort ce matin.
« Alors ? Qu'est-ce qu'on t'a dit ? - Rien, lui répond Gil. Ils ne disent jamais rien. J'aurai la réponse dans quinze jours. Putain ! Qu'est-ce qu'ils croient les gars, que j'ai du fric plein les poches ? Pas de permis, pas de boulot. Pas de boulot, pas de thunes. Même pas sûr qu'ils me reprennent à Michelin. Ça fait un mois et demi que je n’y ai pas mis les pieds, à mon avis ils ont trouvé un autre « Gummihoch » à essorer. En plus, leur test là, je n’y comprends rien. Ça fait trois fois que je le passe et j'y comprends toujours que dalle. Je ne vois pas comment ils décident si je peux conduire à nouveau en me faisant regarder des tâches de pinard sur un carton. Et puis franchement, tu veux que je te dise ? Le gars en face il ne sentait pas le jus de gingembre, crois-moi ! À neuf heures du matin, sans déconner ! Il ferait bien de se le faire à lui-même le test ! »
Rachel écoute, sans broncher. Elle se rallume une clope. Gil reprend : « Il ne peut pas faire quelque chose pour moi ton daron ? C'est lui le patron non ? Rachel secoue la tête avec un petit rire sardonique. - Oublie ! Répond-elle sèchement. C'est un connard. Pourquoi tu crois que tu te plantes au test ? Le gros de son fric, c'est là qu'il le gagne. Plus tu te plantes, plus il palpe. Je ne connais personne qui l'ait réussi du premier coup». Elle crache entre ses dents : « Putain ! Je déteste ce type ! ». Et puis, sans prévenir, elle prend le visage de Gil entre ses mains et pose ses lèvres contre les siennes.
