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Durée d'indemnisation, dégressivité : les pistes du gouvernement sur l'assurance chômage inquiètent les syndicats

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  • France Bleu

Le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé mercredi un durcissement dès cette année des règles de l'assurance chômage, après deux réformes controversées en 2019 et 2023, dans le but de désendetter le pays. Un projet dénoncé par les syndicats.

Agence Pôle emploi - France Travail de La Roche-sur-Yon, le 11 mars 2024. Agence Pôle emploi - France Travail de La Roche-sur-Yon, le 11 mars 2024.
Agence Pôle emploi - France Travail de La Roche-sur-Yon, le 11 mars 2024. © AFP - Magali Cohen / Hans Lucas

Invité de TF1 mercredi soir, le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé une nouvelle réforme de l'assurance-chômage, pour cette année. Une des pistes du gouvernement est de réduire la "durée d'indemnisation de plusieurs mois". Comment fonctionne le système actuel ? Quelles sont les pistes de l'exécutif ? Qu'en pensent les partenaires sociaux ? France Bleu fait le point.

Quelles sont les règles actuelles d'indemnisation ?

Les salariés sont assurés contre le risque chômage. Mais tous les demandeurs d'emploi ne sont pas indemnisés. Au troisième trimestre 2023, sur 6,1 millions de demandeurs d'emploi inscrits à France Travail (toutes catégories confondues), seuls 2,6 millions étaient indemnisés (42,6%), selon les données de l'Unédic. Le montant moyen de l'allocation mensuelle nette est de 1.033 euros.

À la suite de la réforme de 2019, le calcul du salaire journalier de référence (SJR), base de l'allocation chômage, a été modifié le 1ᵉʳ octobre 2021. Ce salaire prend en compte à la fois les jours travaillés et les jours non travaillés durant les 24 mois précédant le chômage (avec un plancher garantissant une allocation minimale). Cela pénalise les demandeurs d'emploi alternant chômage et activité. L'indemnisation était auparavant calculée en divisant les revenus par les seuls jours travaillés pendant la période de référence.

Pour ouvrir des droits, il faut aussi, depuis le 1ᵉʳ décembre 2021, avoir travaillé six mois au cours des 24 derniers mois (36 mois pour les plus de 53 ans). Auparavant, il fallait avoir travaillé quatre mois. La durée minimale d'indemnisation est de six mois (182 jours). La durée maximale varie en fonction de l'âge : elle est actuellement de 18 mois pour les moins de 53 ans, 22,5 mois pour les 53-54 ans et 27 mois pour les 55 ans ou plus. La durée d'indemnisation a été réduite de 25% depuis le 1ᵉʳ février 2023.

Une nouvelle convention d'assurance-chômage, négociée à l'automne par les partenaires sociaux, doit être validée par le gouvernement après la signature d'un avenant sur l'indemnisation des seniors, attendue en avril.

Que prévoit le gouvernement ?

Le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé mercredi soir sur TF1 vouloir demander aux partenaires sociaux d'ouvrir de nouvelles négociations sur l'assurance chômage dès cette année et envisage de réduire la durée d'indemnisation de "plusieurs mois" en gardant un minimum de 12 mois, contre 18 mois aujourd'hui pour les moins de 53 ans.

Il envisage aussi d'augmenter la durée d'affiliation, soit le temps qu'il faut avoir travaillé pour avoir droit à des indemnités, ainsi que "le niveau d'indemnisation du chômage".

"Je veux que nous ayons les paramètres de cette réforme à l'été pour qu'elle puisse entrer en vigueur d'ici à l'automne, comme je m'y suis engagé", a-t-il ajouté. "Mon objectif, ce n'est pas de m'en prendre à tel individu ou aux chômeurs, c'est de faire bouger un système pour inciter davantage à la reprise d'emploi", a encore estimé le Premier ministre.

Il est en revanche resté ouvert au sujet de la durée de l'indemnisation des seniors, sujet qui devrait faire l'objet d'un accord patronat et syndicats le 10 avril. "Dans les pistes qui sont mises en avant, on entend parler d'un relèvement de deux ans de la borne d'âge pour la filière senior, ce qui serait cohérent avec la dernière réforme des retraites", a-t-il souligné.

Qu'en disent les syndicats ?

"Le régime d'assurance chômage ne peut pas être une variable d'ajustement budgétaire de l'État !", a réagi la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon, ajoutant que son syndicat "continuera de pousser des revendications pour que les efforts soient équitablement répartis" entre salariés et employeurs.

"L'obsession du gouvernement pour les privés d'emploi vire maintenant au trouble obsessionnel", a fustigé Sophie Binet secrétaire générale de la CGT, invitée de franceinfo ce jeudi. Les annonces de Gabriel Attal "confirment le mépris profond du gouvernement envers les acteurs sociaux", a-t-elle dénoncé, évoquant une "dérive autoritaire du pouvoir".

"Les acteurs sociaux ont toujours la responsabilité de la gestion de l'assurance chômage", a-t-elle rappelé, alors que Gabriel Attal a demandé à la ministre du Travail, Catherine Vautrin, de réunir les partenaires sociaux pour engager cette nouvelle réforme de l'assurance chômage. La leader de la CGT attend de la ministre "qu'elle tienne parole, qu'elle tienne ses engagements. Elle m'a dit qu'elle était très attachée à ce qu'ils appellent le dialogue social. Le dialogue social, c'est concret. C'est respecter le cadre paritaire" et "ne pas imposer une réforme à la hussarde, alors que cette réforme n'est pas justifiée puisque les comptes de l'assurance chômage sont au vert".

Michel Beaugas (FO) a dénoncé "une belle fable" du Premier ministre "selon laquelle c'est l'assurance chômage qui empêche les employeurs d'embaucher".

Le président du syndicat des cadres, François Hommeril, s'en est pris au "cynisme absolu de ce discours qui méconnaît ce que c'est la situation d'un chômeur confronté à la difficulté de retrouver un emploi".

Enfin, le leader de la CFTC, Cyril Chabanier, s'est dit "très inquiet". "Rendre plus difficile l'accès au chômage ou baisser l'indemnisation, c'est quelque chose qui ne fonctionne pas, ça n'a jamais fonctionné".

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