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VIDÉOS - Rafle d'Izieu : "On a voulu faire en sorte que chaque enfant raflé existe", Serge et Beate Klarsfeld

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Il y a 80 ans, 44 enfants juifs et leurs 7 éducateurs étaient raflés par les nazis, dans la maison d'Izieu, dans l'Ain, où ils avaient trouvé refuge. Il a fallu près de 40 ans et la persévérance hors norme de Serge et Beate Klarsfeld pour réussir à faire condamner leur bourreau : le SS Klaus Barbie.

Dans la maison d'Izieu, où 44 enfants juifs et leurs 7 éducateurs ont été raflés un matin d'avril 1944, on trouve des dessins, des lettres, des photos et des centaines de documents. Ce lieu de tragédie, refuge des enfants juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, est devenu un lieu de mémoire aujourd'hui. Il a été inauguré en 1994 et il a fallu des années de collecte pour rassembler tous ces documents. Ce 4 avril 2024, à l'occasion des 80 ans de la commémoration de la rafle des enfants d'Izieu, dans l'Ain, les époux Serge et Beate Klarsfeld sont venus témoigner de leur travail pour la mémoire des crimes contre les juifs.

"D'abord, la maison n'aurait pas existé si l'on n'avait pas retrouvé Klaus Barbie" souligne Serge Klarsfeld, "si on ne l'avait pas, après une très longue traque, obligé à revenir sur les lieux de ces crimes. Car le procès Barbie a mobilisé les consciences et a permis une mobilisation pour que la maison ne disparaisse pas" explique-t-il. Le procès du chef de la Gestapo a eu lieu en 1987 et la maison fut inaugurée par François Mitterrand en 1994. Sans ce procès, historique pour bien des raisons, la maison aurait été "vendue et perdue. Elle ne serait pas le lieu de mémoire qu'elle est aujourd'hui" explique-t-il.

Qu'aucun enfant soit oublié

"On a voulu faire en sorte que chaque enfant existe parce que le nom et le prénom est là, mais ça, ça ne suffit pas. Il faut reconstituer l'état civil, il faut reconstituer le parcours familial, etc. Pour qu'aucun enfant ne soit oublié. Il ne fallait pas qu'un enfant soit oublié. Non ! Je voulais que chaque enfant puisse revivre !" témoigne Serge Klarsfeld.

"On l'a fait pour les enfants d'Izieu, mais aussi pour le 11 .000 enfants qui ont été déportés de France. Chaque enfant a un dossier et nous avons transmis finalement tous ces dossiers au Mémorial de la Shoah. Donc chaque enfant qui a été déporté de France, on connaît son parcours familial et souvent, il y a non seulement des plaques, mais des établissements scolaires qui portent leurs noms. Il y a des livres qui sont écrits sur ces enfants et donc... ils existent !! C'est ça. Il fallait que notre génération de survivants établisse ce bilan de la solution finale en ce qui concerne ces enfants".

Une traque sans relâche

Le travail des époux Klarsfeld a également permis la condamnation de Klaus Barbie pour crimes contre l'humanité. La rafle des 44 enfants d'Izieu a été évoquée au procès de Nuremberg, en 1946, mais Klaus Barbie échappe à la justice. Il n'est pas arrêté, bien que condamné deux fois, en son absence, pour des crimes commis pendant la Seconde Guerre mondiale. En 1971, le parquet de Munich prononce un non-lieu en faveur de Klaus Barbie dans le cas des enfants d'Izieu. "D'après le procureur, on ne pouvait pas prouver qu'objectivement, Barbie savait quel serait le sort des enfants juifs" raconte Serge Klarsfeld.

"Nous, on était dans une campagne pour faire juger trois grands criminels impunis, qui avaient organisé la solution finale en France : Kurt Lischka, Herbert Hagen et Ernst Heinrichsohn [accusés de la déportation et de l'assassinat de 70.000 Juifs français vers les camps d'extermination nazis, NDLR]. Le cas de Barbie avait été choisi la justice allemande pour faire obstacle à notre campagne. Avec ce raisonnement, ces criminels seraient restés impunis et il fallait donc que nous prouvions que Klaus Barbie était au courant". Après une manifestation, en Allemagne, et une grève de la faim de Beate Klarsfeld et de Mme Benguigui, (dont les trois enfants sont morts après avoir été raflés à Izieu), le juge accepte d'annuler le non-lieu, à la condition que les époux Klarsfeld retrouvent un témoin essentiel.

"Déportés ou fusillés, c'est la même chose"

Celui-ci était présent, à Lyon, lors des exécutions sommaires de juifs que Klaus Barbie avait ordonné dans les caves de la Gestapo, rue Marcelin-Berthelot, en 1943. Cet homme était intervenu auprès de Barbie en lui disant "Déportez-les, donnez-leur une chance !", Klaus Barbie lui avait alors répondu "déportés ou fusillés, c'est la même chose". Ce témoin essentiel, les Klarsfeld le retrouvent.

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En l'écoutant, le juge allemand acceptera de rouvrir le dossier et d'annuler le non-lieu. La traque de Klaus Barbie continuera et aboutira, seize ans plus tard, à son arrestation. "Comme Beate avait donné les photos de Barbie 1940 aux journalistes allemands" détaille Serge Klarsfeld, "la photo est parue dans les journaux allemands". Quelques mois plus tard, un Allemand vivant à Lima, au Pérou, a reconnu Barbie et, "en décembre 1971, nous avons appris le nom qu'utilisait Barbie, Klaus Altmann, et son adresse au Pérou", puis en Bolivie où il tente de s'échapper. De là suivront l'extradition du criminel et sa condamnation, en juillet 1987, à la réclusion criminelle à perpétuité pour crime contre l'humanité.

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Découvrez le témoignage exceptionnel de Serge et Beate Klarsfeld en intégralité :

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