Le parc Lescure de Bordeaux a 100 ans : ces jours qui ont fait vibrer le stade Chaban-Delmas

En cent ans, le parc Lescure a tout connu. Du cyclisme, d’abord : c’était sa destination première, en 1924, lorsqu’il a été bâti. Puis du football à partir de 1932 et son rachat par la mairie de Bordeaux. Du rugby, enfin, depuis que les Girondins ont laissé leur place à l’Union Bordeaux Bègles pour investir le Matmut Atlantique en 2015. Le stade a même failli accueillir des logements ! Alors que le stade Chaban-Delmas fête son centenaire avec un match de gala entre des anciens Girondins et le Variétés Club de France le 14 mai, France Bleu rembobine l’histoire du lieu. Quels sont les jours qui ont le plus marqué les Bordelais dans l'enceinte du stade ? La réponse en images.

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1938 : Les jours de "la bataille de Bordeaux" entre Tchécoslovaquie et Brésil

En 1938, c’est la première fois que la Coupe du Monde de football se joue en France. Le parc Lescure est choisi pour accueillir le quart de finale entre le Brésil et la Tchécoslovaquie. Deux matches aller-retour à deux jours d’intervalle, les 12 et 14 juin. Le premier jour, c’est la cohue. Tout le monde se presse pour inaugurer la nouvelle enceinte de 25.000 places. Le match est un spectacle. Plusieurs joueurs sont expulsés. Dans un documentaire diffusé par l’ORTF (extrait à voir ci-dessous), le commentateur parle du “match le plus violent de l’histoire de la Coupe du monde”. Finalement, le Brésil de Léonidas s’impose. Et part défier l’Italie en demi-finale à Marseille.

1964 : Le jour où André Darrigade gagne une étape du Tour

Le 10 juillet 1964, André Darrigade l’a confié bien plus tard à France Bleu Gascogne, s'il l'attendait depuis 12 ans, il ne pensait pas remporter l’étape à Bordeaux : “Mais pour le public, j’ai fait le sprint”. Le Landais explique encore : "Barry Hoban a démarré à 400 mètres de la ligne. Et moi, je suis sorti du peloton. J'étais rentré en 25e position, et je suis parti, ne pensant pas gagner. J'avais tout le monde dans la roue. Et j'ai rejoint Hoban à 30 mètres de la ligne." Et il a franchi la ligne sur la piste en béton avec une énorme joie : "Ça m'a fait beaucoup de plaisir de gagner à Bordeaux". Ce jour-là, Jacques Anquetil conserve le maillot jaune. Le Tour a continué d’organiser des arrivées d’étape au parc Lescure, une trentaine au total, jusqu’en 1979.

1973 : Le jour où Pelé déclenche une émeute à Lescure

Le 4 mars 1973, le stade Lescure accueille un roi : le roi Pelé. Dans la foule, se trouve Bernard Sanchez, 14 ans, jeune footballeur licencié au Bouscat. Il est venu voir le match amical des Girondins contre le club de Santos, en tournée promotionnelle en Europe. "On venait de vivre la coupe du monde 1970, où Pelé avait été extraordinaire", se souvient-il au micro de France Bleu Gironde. Sur la pelouse, il admire aussi d'autres Brésiliens champions du monde comme Carlos Alberto, Clodoaldo ou Edu. Et puis, à la fin du match, lui et “50 ou 60 gamins” se précipitent sur le terrain, pour récupérer le maillot de Pelé. "On est parti comme des obus, tout le monde s'est jeté sur le maillot et le tirait dans tous les sens pour avoir une relique. Je ne lâchais pas, mais à ce moment-là, le service d'ordre est rentré sur le terrain. Ils ont chargé, et ils ont donné le maillot à un gamin plus menu que les autres."

1983 : Le jour où Maradona demande une photo à Giresse

Le 27 août 1983, le Barça vient rencontrer les Girondins à Bordeaux. Pas de pression, c’est dans le cadre du Tournoi international de Bordeaux, une compétition amicale d’intersaison. Mais Claude Bez, alors président des Girondins, y tient : il vient de signer un chèque de 900.000 euros pour faire venir Diego Maradona et le FC Barcelone. En arrivant au stade Chaban-Delmas, la star argentine crée la surprise. Il n’a qu’un nom à la bouche : Alain Giresse. Il veut le voir, rencontrer celui qui l’a impressionné lors de la Coupe du monde de l’année précédente. Et surtout, il veut faire une photo avec lui ! Pari tenu. La preuve.

1985 : Le jour où les Girondins font trembler la Juve de Platini

Le 24 avril 1985, record d'affluence pour le parc Lescure. 40.211 spectateurs pour la demi-finale de Coupe d'Europe entre les Girondins et la Juventus de Turin de Michel Platini. À l'aller, il y a eu 3-0 en Italie. Mais Bordeaux, porté par son public, pousse : un premier but de Dieter Müller à la 24ᵉ minute puis un deuxième de Patrick Battiston à onze minutes de la fin permettent aux Girondins d'espérer. Mais dans les dernières minutes, Jean Tigana loupe la balle de prolongation. C'est la Juventus qui se qualifie pour la finale (qui tournera au drame) au stade du Heysel.

1996 : Le jour où les Girondins font tomber le grand Milan AC

Le Milan AC débarque à Lescure, ce 19 mars 1996 avec une certaine confiance. Ce grand d’Europe a de quoi. À l’époque, il a gagné cinq fois la Ligue des Champions, et a l'avantage d'une victoire 2-0 au match aller de ce quart de finale de Coupe de l'UEFA en Italie. Les chances de se qualifier sont donc bien maigres pour la génération Zidane, Lizarazu et Dugarry. Mais, ce jour-là, les 35.000 spectateurs du Parc Lescure vivent le plus grand exploit de l'histoire du club. Les Bordelais retournent la situation et gagnent 3-0 grâce à Didier Tholot et Christophe Dugarry (auteur d'un doublé). Les Girondins remportent sous les acclamations leur ticket pour la finale face au Bayern de Munich.

2015 : Le jour où les Girondins y disputent leur dernier match

Le 9 mai 2015, c'est par une victoire que les Girondins de Bordeaux achèvent leur histoire avec le stade Chaban-Delmas : 2-1 contre le FC Nantes, grâce à un doublé de Diego Rolan. Supporters et joueurs font leurs adieux au stade, la larme à l'oeil. Quinze jours plus tard, ils inaugurent leur nouvelle enceinte de 42.000 places dans le quartier du Lac. Les Girondins auront joué 77 ans dans ce stade.

2016 : Le jour où Alain Juppé imagine le transformer

Tentative avortée pour Alain Juppé. Le 6 juin 2016, le maire de Bordeaux abandonne son projet de rénovation : "Le stade Chaban-Delmas restera en état pour l'instant." L’idée de voir une partie des tribunes détruites, des commerces dans le virage nord, et des logements le long de la rue Albert Thomas n’a pas convaincu les riverains, qui se sont mobilisés en nombre. Une consultation avait été lancée quelques semaines plus tôt. Le maire actuel, l’écologiste Pierre Hurmic, s’en félicite d’ailleurs à présent : "Heureusement que l'on n'a pas touché à cette structure art-déco, et en centre-ville... Ce qui l'aurait réduit à 25 000 places au lieu de 34 000 aujourd'hui."