Passer au contenu
Publicité

Monique Olivier : après sa condamnation, quelles suites judiciaires pour l’ex-femme de Michel Fourniret ?

De
Par

Monique Olivier a été condamnée le 19 décembre à Nanterre à la réclusion criminelle à perpétuité dans les affaires Parrish, Mouzin et Domèce. Mais en a-t-on vraiment fini avec les dossiers liés au couple Olivier-Fourniret ? Des questions demeurent, des procédures sont en cours.

Monique Olivier lors de son troisième procès d'assises, à Nanterre. Monique Olivier lors de son troisième procès d'assises, à Nanterre.
Monique Olivier lors de son troisième procès d'assises, à Nanterre. © AFP - SERGE TENANI

Monique Olivier a été condamnée le 19 décembre 2023 pour la troisième fois par une cour d'assises : la réclusion criminelle à perpétuité a été prononcée à Nanterre pour complicité dans les affaires Parrish, Domèce et Mouzin. En 2008 à Charleville-Mézières, l'ex-femme de Michel Fourniret avait déjà été condamnée à la perpétuité pour complicité dans quatre enlèvements et meurtres de son mari. En 2018, à Versailles, c'était 20 ans de réclusion, toujours pour complicité, dans le meurtre, crapuleux, de Farida Hamiche.

Publicité

L'ancienne épouse de l'"ogre des Ardennes" détient-elle des informations sur d'autres victimes identifiées ou inconnues ? Les avocats qui suivent ces dossiers depuis des années le croient. Quoi qu'il en soit, Monique Olivier, 75 ans, "la femme la plus condamnée de France" selon Me Seban, n'en a pas fini avec la justice.

Les affaires Mouzin, Parrish et Domèce définitivement jugées

La cour d'assises des Hauts-de-Seine a reconnu Monique Olivier coupable de complicité auprès de Michel Fourniret dans trois affaires vieilles de 35, 33 et 20 ans : les enlèvements de Marie-Angèle Domèce, 18 ans, et Joanna Parrish, 21 ans, dans l’Yonne et celle d’Estelle Mouzin, 9 ans, en Seine-et-Marne. Seul le corps de Joanna Parrish a été retrouvé. Son avocat a annoncé qu’elle ne ferait pas appel. Le chapitre est donc clos, encore que le délibéré sur les peines civiles est annoncé pour le 6 mai 2024.

À l’issue du verdict, les familles des victimes ont exprimé, à l’image d’Éric Mouzin, leur “soulagement” grâce à un “jugement qui entérine la responsabilité et la culpabilité de Monique Olivier”. Il reste “un goût d’inachevé”, des regrets que l’accusée n’ait pas donné davantage d’informations sur les circonstances des crimes et sur les lieux où les corps ont été enfouis. Ses réponses et réactions ont été évasives, des “je suis désolée”, “je regrette”, “je ne sais pas”...

Mais “l'objet d'un procès reste quand même de juger un accusé”, avait prévenu l’avocat de Monique Olivier, ce n’est pas une enquête ou une instruction, “il y a des attentes qui ne peuvent pas recevoir de réponses”.

Une libération très théorique

Malgré la perpétuité et la peine de 20 ans de sûreté prononcée mardi soir, c’est-à-dire la période durant laquelle Monique Olivier ne peut pas bénéficier d'aménagement de peine, il est question d’une libération possible et théorique à partir de 2035, donc dans douze ans. Pourquoi cette échéance est-elle aussi courte ?

Parce qu’en droit français, les périodes de sûreté se cumulent, mais dans la limite de 30 ans maximum. Or cette mesure prend effet au moment où Monique Olivier a été extradée de Belgique en 2005.

Monique Olivier aura 87 ans en 2035. Son éventuelle libération serait conditionnée à une nouvelle décision de justice, une sorte de mini-procès, avec de nouveau des expertises et un débat contradictoire. Mais encore faudrait-il qu’elle demande cette libération.

Une mise en examen dans l'affaire Lydie Logé dans l'Orne

Monique Olivier est encore mise en examen dans une autre affaire de complicité avec Michel Fourniret, la disparition de Lydie Logé. Cette jeune mère de famille de 29 ans s'est volatilisée le 18 décembre 1993 dans le village de Saint-Christophe-le-Jajolet, dans l’Orne, alors qu’elle revenait de ses courses de Noël.

L'enquête sur sa disparition a été rouverte en 2018 grâce à un fragment d’ADN, retrouvé dans la camionnette de Michel Fourniret. Des analyses ont permis un rapprochement avec l'empreinte génétique de la mère de Lydie Logé.

Dans ce dossier, Monique Olivier “n'a pas d'implication”, tempérait mardi son avocat Me Delgenes. La seule chose qu'elle pourrait apporter, selon lui, ce sont “des éléments pour essayer de compléter un peu le puzzle”.

L'avocate de la famille, Corinne Hermann, confirme que des investigations sont toujours en cours. La justice entendra Monique Olivier dès le mois prochain dans cette affaire. Il reste encore des fouilles à mener, le corps de Lydie Logé n’a jamais été retrouvé, et des analyses à faire sur des scellés. Pour Me Herrmann, ce n'est pas impossible qu'il y ait un autre procès. Elle croit que Monique Olivier a encore intérêt à parler à la juge Kheris, qui dirige le pôle cold cases, et qui a mis en examen le couple Fourniret-Olivier dans plusieurs dossiers.

Des questions dans d’autres affaires non résolues

Le procès de Nanterre a été le premier du pôle “cold cases” créé en 2022. La justice a appris de ses erreurs. Comme le fait remarquer Didier Seban, avocat des familles de victimes, “il y a des avancées grâce aux affaires Domèce, Parrish et Mouzin”, tout comme il y a aussi “d’autres combats judiciaires à mener”.

Monique Olivier et Michel Fourniret ont reconnu onze meurtres. Pour les avocats des parties civiles, comme Me Herrmann, “c’est certain qu’il reste d’autres victimes”.

Il existe dans la vie de Michel Fourniret une “période blanche” qui dure de 1990 à 2000. En 1990, c’est le meurtre de Joanna Parrish dans l’Yonne et celui de Natacha Danais en Loire-Atlantique. En mai 2000, celui de Céline Saison dans les Ardennes. Entre temps, que s’est-il passé ? Des spécialistes des tueurs en série doutent que l’”ogre des Ardennes” se soit abstenu de tout crime sur une si longue période. Une longue période au cours de laquelle Monique Olivier est à ses côtés, ils se sont mariés en 1989.

En outre, il a été rappelé au cours du procès à Nanterre que Michel Fourniret avait confié à un codétenu un "testament terrible”, selon Me Herrmann, 35 cases vides pour autant de victimes que la justice devrait rechercher. Cette liste correspond-elle à la réalité ou s’agit-il d’un jeu pervers du tueur en série ? “C’est à nous de la combler” a déclaré l’avocate. Interrogée à l’audience sur ces 35 victimes possibles, Monique Olivier a répondu de façon évasive : “C'est exagéré. C'est peut-être vrai ou pas vrai.”

À cela s’ajoutent encore des traces génétiques retrouvées sur le matelas du pavillon de Ville-sur-Lumes, une dizaine voire une vingtaine d’ADN inconnus, selon les analyses, qui restent à investiguer.

Des questions se posent enfin sur des baby-sitter engagées par le couple pour garder leur fils Sélim, né en 1998, et qui ont disparu. La justice belge avait entamé des investigations sur ces dossiers. En 2004, Monique Olivier a fait de premiers aveux sur une jeune femme, incriminant son mari. Interrogée sur ce sujet le 5 décembre par Didier Seban, Monique Olivier a éludé : “Je n'ai rien à dire. Il n'y a pas eu de meurtre de babysitter. Je ne sais pas ce qu'elle est devenue.”

Le procès lui-même a pu raviver des mémoires comme en témoigne Me Herrmann : “Beaucoup de personnes nous ont contactés pendant le procès, qui nous disent qu'elles ont été victimes de ce couple, qu’ils la reconnaissent elle. Il va falloir faire la part des choses” et l’avocate relève qu’il peut aussi s’agir de viols ou de tentatives d’enlèvement qui ne sont pas allées au bout.

Reste que Michel Fourniret est mort en 2021. L’avocat de Monique Olivier refuse qu’elle endosse la responsabilité de tous les crimes de son mari.

loading

La plainte d’Éric Mouzin contre l’État est toujours active

Éric Mouzin a annoncé en 2018 qu’il portait plainte contre l’État pour “faute lourde”. Le père d’Estelle estimait et estime encore que des dysfonctionnements dans l’enquête, un manque de méthode et d’organisation ont ralenti les investigations. Pour lui, "l’État est responsable en tant qu’autorité responsable du fonctionnement de la justice et de l’enquête".

Cette plainte est toujours d'actualité a-t-il confirmé ce mercredi sur franceinfo et son combat continue : "Ce procès a permis de mettre en évidence toutes les erreurs qui avaient été commises. Nous avons été privés d'une partie des réponses à cause de ces erreurs qui ont décalé dans le temps la vérité."

Nos articles essentiels sur le procès Monique Olivier :

La bio de Monique Olivier.
La bio de Monique Olivier. © Visactu

Ma France : Améliorer le logement des Français

Quelles sont vos solutions pour aider les Français à bien se loger ? En partenariat avec Make.org, France Bleu mène une consultation citoyenne à laquelle vous pouvez participer ci-dessous.

Publicité

undefined