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Féminicide à Saint-Jean-de-Luz : "Une scène d'une grande sauvagerie", décrit le procureur de Bayonne

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Le procureur de la République de Bayonne est revenu ce dimanche 5 mai lors d’une conférence de presse sur le meurtre d’une femme âgée de 33 ans dans un hôtel de Saint-Jean-de-Luz. Le compagnon de la victime a été mis en examen pour assassinat dans la matinée à l'issue de sa garde à vue.

Jérôme Bourrier, le procureur de la République de Bayonne, lors de la conférence de presse Jérôme Bourrier, le procureur de la République de Bayonne, lors de la conférence de presse
Jérôme Bourrier, le procureur de la République de Bayonne, lors de la conférence de presse © Radio France - Stéphane Garcia

Un homme de 37 ans a été mis en examen pour "assassinat" ce dimanche en fin de matinée, à l'issue de sa garde à vue. Il est suspecté d'avoir frappé à mort sa compagne retrouvée vendredi après-midi dans la chambre de l'hôtel de Paris à Saint-Jean-de-Luz. Lors d'une conférence de presse tenue ce dimanche, le procureur de la République de Bayonne a livré les premiers éléments de l'enquête. Jérôme Bourrier décrit un "drame à trois strates" : marginalité, spirale fatale et sauvagerie.

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"Du sang jusqu'au plafond"

Le procureur revient sur la scène de crime découverte par les policiers ce vendredi 3 mai à 13h. Quand les enquêteurs pénètrent dans cette chambre, la victime est dénudée. "Il y avait du sang en très grande quantité jusqu’au plafond.” Les premières constations sur le corps de la victime de 33 ans font état “d’une scène d’une grande sauvagerie” dans le huis clos de la chambre d’hôtel.

La victime est allongée sur le ventre. Ses pieds et ses mains sont liés. “On constate un fracas osseux extrêmement important de toute la boîte crânienne”, détaille le procureur. “On constate également une fracture mandibulaire, une plaie profonde au coude gauche et des traces blanchâtres au niveau du vagin qui pourraient être du sperme.” Sur ce dernier fait, des investigations sont toujours en cours, précise le magistrat. Un marteau est par ailleurs retrouvé “enveloppé dans une serviette de bain à côté de la jambe de la victime”.

Faire cesser les “rires” d’un “monstre”

C’est le compagnon de la victime qui a prévenu les forces de l’ordre. Au téléphone, il parle alors d’une simple “rixe avec quelques blessures sur sa compagne, sans plus”. Avant cet appel, il aura pris le temps d’appeler sa mère, ainsi que de descendre à la réception pour annoncer au directeur de l’hôtel que le couple allait partir après 13h “le temps que sa femme prenne une douche”. Il boit même un “jus d’orange” avant de remonter et d'appeler la police. Sur place, les enquêteurs ont retrouvé un violentomètre partiellement rempli. Il s'agit d'un outil d'auto-évaluation visuel avec 23 questions rapides à se poser permettant de repérer la présence ou menace de violences sexistes et sexuelles et de mesurer si la relation de couple est saine ou non.

Durant sa garde à vue de 48 heures, qualifiée de “compliquée” par le procureur, le principal suspect parle d’un jeu sexuel “de domination et de soumission” avec sa compagne pour justifier la présence de liens, que la victime aurait elle-même réalisés, selon lui. “Les nœuds ont été retrouvés à l’envers, ce qui vient infirmer largement cette hypothèse”, note Jérôme Bourrier. Aux enquêteurs, lors de sa seconde audition, le principal mis en cause finit par parler d’un “pétage de plomb”. Durant cet instant, “il aurait entendu ‘un monstre rire’, il se serait alors saisi du marteau qu'il conservait sur la table de chevet pour se défendre de la traque dont il est convaincu faire l'objet.”

Onze ans de vie commune

En effet, depuis le mois de janvier 2024, le couple se dit poursuivi. Il ne réside plus dans l'appartement qu'il avait à Bidart et allait de chambre d'hôtel en chambre d'hôtel. Traqués par de mystérieux individus : “tantôt par un ancien client de la victime dont il est établi qu'elle se livrait à une activité d’escort-girl, tantôt par des narcotrafiquants de la mafia belge et néerlandaise”, détaille le procureur de la République. Un couple qui se fréquente depuis 2013. Elle est âgée de 33 ans, de nationalité française et née en Allemagne, où réside encore sa mère. “Elle est assez isolée sur le territoire national”, dépeint Jérôme Bourrier.

Lui a 37 ans, de nationalité française, il est né en Algérie. Il possède 19 mentions sur son casier judiciaire pour des faits de vol, une infraction sur les stupéfiants, dont il est un gros consommateur, mais aussi des faits d'extorsion, de séquestration, de violences en réunion. Des condamnations qui cessent au moment de leur rencontre. “Ce couple n’était pas connu des services de police pour des faits de violences intrafamiliales”, ajoute le magistrat. Lors de la garde à vue qui s’est terminée ce dimanche matin, le mis en cause a raconté aux enquêteurs que le couple s’était séparé trois semaines en amont. Une séparation qui n'a pas été pérenne.

Deux précédentes procédures

Dans le cadre de cette errance, et peu de temps après leur arrivée au Pays basque début 2024, une première procédure est établie. Le 25 janvier, la femme de 33 ans s'était présentée au commissariat de Saint-Jean-de-Luz, avec une plaie à la tête équivalente à deux jours d’incapacité totale de travail. “Elle avait d'abord déclaré avoir été frappée par un inconnu avec une hache [...] avant d’évoquer une tentative de suicide”, raconte le procureur de Bayonne. Parallèlement, son compagnon s'était également présenté au commissariat de Biarritz pour évoquer une altercation avec sa conjointe. Il avait finalement été placé en garde à vue pour des faits supposés de violences intrafamiliales.

Cette première procédure avait finalement été classée sans suite en l'absence de charges suffisantes à l'encontre du mis en cause mis en cause qui, à l'époque et dans le cadre de cette première garde à vue, avait fait l'objet d'un examen psychiatrique. Ce dernier avait alors exclu toute abolition ou altération de son discernement, et ne préconisait pas une mesure d'internement. Le premier épisode de cette “spirale fatale”. Le deuxième, ce sont les faits qui se sont déroulés le 14 avril 2024 dans une chambre de l’hôtel Ibis à Ciboure. La victime avait chuté du 5ᵉ étage de l’établissement. Grièvement blessée, elle avait été hospitalisée à Bayonne. Le compagnon avait lui été interpellé puis mis hors de cause. La victime elle était sortie du coma le 23 avril et s’était volatilisée le mercredi 1ᵉʳ mai. Elle était inscrite sur le registre des personnes disparues.

Une défenestration qui pose question

Plusieurs zones d’ombres restent encore à éclaircir. Les enquêteurs cherchent toujours à savoir si cet homme est impliqué dans la défenestration, le 14 avril dernier, ainsi que les faits de violences commis sur la victime en janvier. Le procureur rappelle que les investigations médico-légales comme les différents témoignages dans ces deux affaires “ne permettaient d’impliquer avec certitude son compagnon” et sa “compagne l’avait mis hors de cause” en parlant de "tentative de suicide". Une absence d’élément probant qui n’a pas permis aux autorités de mettre en place des mesures d’éloignement. “Nous avons des victimes de violences intrafamiliales qui protègent pour des multiples raisons leur compagnon, qui peuvent être sous une forme d'emprise”, rappelle le procureur. “Parfois, il nous arrive d'engager des poursuites et des mesures de protection, mais encore faut-il avoir des éléments qui viennent confirmer la commission d'une infraction.”

Concernant la disparition de l’hôpital, la victime serait visiblement partie seule le mercredi 1ᵉʳ mai après être sortie du coma le 23 avril. Les autorités ne “savent pas” si le compagnon était présent sur les lieux. La victime arrive en tout cas à l’hôtel de Paris de Saint-Jean-de-Luz le jour même de sa disparition, “sans une quelconque forme de contrainte”. Désormais, il appartient au juge d’instruction d’ordonner des actes complémentaires, notamment “une expertise psychiatrique” du mis en examen, afin de déterminer s’il y a eu une altération de son discernement au moment des faits.

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