A comme Agricultrice en Touraine

Alors justement, vous nous expliquez que la reconnaissance du rôle joué par les femmes dans l’agriculture a été plutôt tardive

Effectivement : pendant longtemps, la société les a regardées comme des « femmes d’agriculteurs » et non pas comme des agricultrices à part entière ; on considérait qu’elles ne travaillaient pas vraiment mais plutôt qu’elles « aidaient » leur mari. D’ailleurs pour la petite histoire, le mot « agricultrice » n’est apparu dans le dictionnaire qu’en 1961 ! Et il a fallu attendre 1999 pour que ces agricultrices aient enfin droit à une protection sociale et à une retraite.

Et qu’en est-il aujourd’hui de l’égalité entre agricultrices et agriculteurs ? Je pense notamment aux salaires

Eh bien d’après les chiffres de la Mutualité sociale agricole, la MSA (c’est-à-dire l’organisme qui gère la sécurité sociale des agriculteurs), les revenus des agricultrices sont inférieurs de 30 % environ à ceux des agriculteurs. Par ailleurs, on compte encore trop peu de femmes élues dans les instances professionnelles agricoles, même si les choses sont en train d’évoluer sur ce sujet.

Et ces agricultrices, vers quelle production ont-elles plutôt tendance à se tourner ?

Alors il y a des secteurs qui attirent plus que d’autre : je pense notamment au maraîchage et à l’élevage caprin (les chèvres) et ovin (les brebis). En moyenne, on trouve plus de femmes sur ce type d’élevages alors que les hommes ont tendance à préférer l’élevage bovin. Les élevages de chevaux et les centres équestres sont aussi majoritairement dirigés par des femmes. A l’inverse, les agricultrices vont avoir tendance à moins se tourner vers les céréales et la viticulture, notamment à cause du prix des terres, même si là encore il faut nuancer : on a quand même pas mal de céréalières et de vigneronnes en Touraine !

Et les agricultrices sont également nombreuses dans le réseau Bienvenue à la ferme ?

Oui tout à fait : vous pouvez d’ailleurs retrouver leurs portraits sur la page Facebook Bienvenue à la ferme Indre-et-Loire. Ce sont des cheffes d’exploitation à part entière, elles ont choisi de faire de la vente directe sur leur ferme et ne comptent pas leurs heures. Et je pense qu’il est important de saluer leur énergie pour réussir à mener de front engagement professionnel et vie de famille.

Un petit conseil lecture pour terminer ?

Oui, je voulais vous parler d’une bande dessinée que je l’ai lue cet été : elle s’appelle « Il est où le patron ? », c’est une BD qui a été réalisée par Maud Bénézit et le collectif des « Paysannes en polaire ». Elle raconte le quotidien de cinq agricultrices de l’Ardèche et les difficultés qu’elles rencontrent en tant que femmes dans leur métier. Je vous la recommande chaudement !

Merci Raphaël Caspi-Torrent.