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Soupçon de mariage blanc : un couple franco-gabonais avec 42 ans d'écart poursuivi en correctionnelle à Béziers

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INFO FRANCE BLEU - L'été 2023, Robert Ménard avait refusé de marier une Française à un Algérien considérant qu'il s'agissait d'un mariage blanc. L'homme a depuis été expulsé. Un autre mariage est refusé six mois plus tard. Cette fois, le couple est poursuivi devant le tribunal correctionnel.

Cathédrale Béziers Cathédrale Béziers
Cathédrale Béziers © Radio France - Stéfane Pocher

La différence d'âge qui existe entre un homme et une femme peut-elle être une raison suffisante pour s'opposer à un mariage ? Même si cet écart est de 42 ans ? L'est-elle encore davantage, si le couple est de nationalité différente. C'est à cette question que le tribunal correctionnel de Béziers doit répondre en juin 2024. Un couple, de 32 et 74 ans, est poursuivi à la demande du parquet pour tentative de mariage blanc.

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Olivier, que nous appellerons ainsi, est un ancien salarié de la mairie de Béziers. Ce retraité, né en 1948 en France, est père de quatre enfants. Il n'est ni sous curatelle ni sous tutelle. Au printemps 2023, il a demandé à Séverine (prénom d'emprunt) de l'épouser. Sans-emploi, cette mère de famille est originaire du Gabon (Libreville).

Le couple vit ensemble depuis plus d'un an après avoir fait connaissance via les réseaux sociaux en 2018. Elle était encore au Gabon. Olivier ne pouvait pas la rejoindre en raison d'une interdiction de quitter le territoire suite à une décision de justice (le sursis court jusqu'en 2025). Ils font connaissance en 2022 alors que Séverine obtient un titre de séjour en Espagne. Ils se voient alors et décident rapidement de vivre ensemble. Olivier finit par lui demander sa main cinq mois plus tard. Mais cette union est jugée comme illégale.

L'un et l'autre sont poursuivis, à la demande du parquet, pour avoir tenté de commettre un mariage blanc. Ils risquent jusqu'à cinq ans de prison et 15.000 euros d'amende. L'alerte a été donnée par la mairie de Béziers doutant de leur amour. C'est alors qu'une enquête administrative est réalisée par la police aux frontières à Sète. Le parquet décide ensuite de les poursuivre en raison d'une difficulté relative aux conditions de formation d'un mariage.

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Le couple entame des démarches à la mairie de Béziers en juin 2023. "Dès notre premier rendez-vous, nous avons bien senti que notre projet de mariage dérangeait" confie Olivier.

En novembre 2023, les futurs époux sont convoqués à la police aux frontières. Ils sont auditionnés séparément l'un et l'autre. "Des incohérences minimes sont constatées" déplore leur avocate Séraphine Gonzalez (du barreau de Béziers). "Ils ont considéré qu'il n'y avait pas de sentiments entre eux. Mais comment peut-on détecter de réels sentiments ? Qu'est-ce qui permet d'évaluer un sentiment ?"

"Qu'il y ait des imprécisions, c'est normal"

'Pour le parquet il y a absence de consentement. Mais il se manifeste par quoi ? Des indices minimes ? Mes clients n'avaient ni défini le lieu de leur mariage, ni la date. Ils étaient en préparation. Les futurs mariés n'ont pas apporté les mêmes éléments sur le lieu et la façon de célébrer leur mariage. Ce qui n'a aucun rapport avec le sens du consentement à mariage qui est lié à la volonté de chacun des époux. Il n'y avait pas encore de liste des invités respectifs. Tout n'était pas défini. Ils ne savaient pas à quel moment l'administration leur donnerait l'autorisation de célébrer leur mariage, étant donné, qu'ils effectuaient les démarches auprès de la mairie depuis le mois de juin 2023. Autrement dit, six mois d'attente."

“Aucun texte ne prévoit de différence d'âge entre les futurs époux”

"On assiste une stigmatisation d'un l'étranger qui demeure dans la précarité, dans la peur d'une expulsion, dans la peur de recevoir une OQTF et il se retrouve dans une défaillance de reconnaissance de ses droits fondamentaux. Et cette personne-là devient une personne d'exception" confie l'avocate du couple. Aucun texte ne prévoit l'âge au-delà duquel on ne peut pas contracter mariage, ni même l'écart maximum ou minimum entre les futurs époux"

"On ne fait pas de différence, entre les lieux de provenance des étrangers. Les mêmes pièces sont demandées  sans distinction du pays d'origine, en l'occurrence le certificat de coutume. Ce qui n'est pas normal. Mais exiger un tel certificat à un étranger provenant d'un pays occidental ne l'est pas, car il n'y a pas de mariage coutumier dans des pays occidentaux. Il y a une forme d'amalgame sur la liste des pièces exigées pour les personnes étrangères qui entendent célébrer leur mariage en France.

Suite à cette enquête, le parquet de Béziers a donc décidé de poursuivre le couple devant le tribunal correctionnel, comme le prévoit le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui définit l'infraction du mariage blanc L823-11 du CESEDA.

"Le mariage blanc peut être considéré, précise Séraphine Gonzalez, comme un procédé illégal utilisé par deux personnes qui n'ont pas l'intension de former un couple mais  celui d'obtenir un avantage permettant notamment de régulariser une situation personnelle, administrative, voire sociale de l'un ou des deux époux. Ce qui n'est pas le cas ici. On a affaire à deux personnes, normales, amoureuses ayant un projet de vie commune. L'homme est ici plus âgé, certes, mais est-ce qu'il n'a pas le droit d'aimer ou de se marier ? Quel est le véritable problème dans ce mariage ?  Il se pose la question de savoir au-delà de quel âge, on ne peut plus se marier et avec qui le faire ?

Des différences d'âge vertigineuses chez les artistes

La différence d'âge entre les futurs mariés peut en effet surprendre. "Mon premier mari, le père de ma fille a plus de 15 ans de plus que moi confie Séverine à France Bleu Hérault. La différence d'âge n'a pas d'importance chez moi au Gabon, ni en Afrique. J'aurais pu trouver un jeune en France.

Mais je ne suis pas attirée. C'est lui que j'aime. J'aurais pu tomber enceinte en France avec quelqu'un de jeune. Mais je ne l'ai pas fait. J'avais un titre de séjour, j'aurais pu aller ailleurs et épouser quelqu'un de plus jeune. Si j'étais Française, y aurait-il eu autant de difficulté".

"Mon propre fils de 57 ans vient de se marier avec une femme 25 ans plus jeune que lui" - Oliver

Cette différence d'âge vertigineuse n'est pas unique en France. Et encore moins à l'étranger. Certains couples de stars détonnent. Récemment (septembre 2023), le chanteur Hugues Auffray, 94 ans, s'est marié avec sa compagne Muriel de 45 ans sa cadette. Même différence d'âge dans une période plus lointaine entre Eddie Barclay et Caroline Barclay. 54 ans de différence entre Al Pacino, 83 ans, et Noor Alfallah, 29 ans.

"Mes clients connaissent la famille de l'un et de l'autre. Et aucun enfant n'y voit d'objection"

Pour la psychanalyste, Karine Boutin, "dans l'absolu, dans l'amour, il n'y a pas de norme. On fait comme on veut du moment qu'on est heureux". L'amour bouscule tout sur son passage et personne n'a le mode d'emploi. Que cherche-t-on dans l'amour ?

"Certains vont chercher une part d'eux-mêmes, certains vont essayer de trouver ce qu'ils n'ont jamais su se donner ou ce qu'ils n'ont jamais reçu. D'autres vont essayer de trouver un équilibre. D'autres vont vouloir juste donner, sans pour autant attendre quelque chose d'égal en retour."

L'été 2023, Robert Ménard avait refusé de marier une Française à un Algérien considérant qu'il s'agissait d'un mariage blanc. L'affaire avait fait grand bruit. Les raisons étaient  différentes. Le futur marié était sous le coup d'une obligation de quitter le territoire. À l'époque, le parquet  n'était pas opposé à cette union. L'homme a depuis été expulsé. L'instruction se poursuit en raison de plaintes déposées contre l'élu biterrois.

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