Lili Keller Rosenberg, survivante des camps de concentration, témoigne devant 1 500 élèves

Elle a survécu à l'enfer des camps avec ses deux petits frères et sa mère, déportée à 11 ans, et elle témoigne depuis 45 ans, pour que la mémoire de la Shoah ne disparaisse jamais : Lili Keller Rosenberg a raconté son histoire à 1500 collégiens du Nord, ce vendredi 19 avril, sur la scène du Nouveau Siècle à Lille.

Lili Keller Rosenberg, épouse Leignel, habite à Roubaix quand elle est déportée avec Robert et André, ses frères, ainsi que leur mère, au camp de Ravensbrück, en Allemagne. Elle raconte l'horreur de la vie au camp : le froid, la faim, la peur des Nazis et de leurs chiens, les réveils à 3h30 du matin par la sirène, les longues heures à attendre que les SS aient fait l'appel, et son matricule : 25 612, dont elle se souviendra toute sa vie. Elle se rappelle aussi de ce qu'elle appelle "la leçon de dignité" de sa mère : "Elle tenait absolument à ce que nous fassions notre toilette parce qu'on nous avait tout pris, mais qu'on ne nous prendrait pas notre dignité, et que pour être digne, il fallait avoir l'air correct."

Lili, sa mère et ses frères resteront à Ravensbrück de 1943 à 1945, jusqu'à leur départ pour le camp de Bergen-Belsen, aussi appelé le "camp de la mort lente." Là, des cadavres jonchent le sol, les malades sont très nombreux. "Les déportés affectés à la tache devaient ramasser les cadavres et les mettre dans des charrettes. Ces charrettes allaient ensuite déverser leur macabre contenu dans d'énormes fosses, creusées par d'autres déportés. Les Nazis aspergeaient ensuite les corps d'essence et y mettaient le feu et c'est cette odeur là qu'on sentait à des kilomètres avant d'entrer dans le camp."

La mère de Lili tombe malade, la famille craint de ne pas survivre. Mais le camp est libéré en 1945 par les Anglais. La famille rentre en France. Seul le père ne reviendra pas, décédé deux jours avant la libération du camp de Buchenwald, où il avait été déporté.

Devoir de mémoire

Depuis 45 ans maintenant, Lili Keller Rosenberg témoigne, devant près de 30 000 élèves par an. Et elle fait toujours forte impression : "ce qui m'a marqué, c'est qu'elle aurait pu revoir son père, qui est mort deux jours avant la libération", "l'entendre le dire comme ça, c'était beaucoup d'émotion", "c'est important d'en parler pour que ça ne recommence plus jamais", "elle a une telle éloquence, on était captivés pendant deux heures", racontent certains élèves.

Pour la survivante, la transmission est faite : "Je veux que ces petits, que la jeunesse de France ne connaisse plus ces horreurs. Et pour ça il faut en parler, il faut expliquer ce que la haine et le racisme peuvent amener. Ils sont toujours très à l'écoute, vous savez, et je témoigne devant près de 30 000 élèves par an ! Je sais qu'ils ont compris, je les appelle : mes petits messagers."

Et quand on demande à Lili Keller Rosenberg jusqu'à quel âge elle compte témoigner : "Au moins jusqu'à 100 ans ! Et je témoigne toujours debout, avec du rouge à lèvre, c'est ma dignité à moi !"

La rectrice a remis ce vendredi, à 17h, les palmes académiques à Lili Keller Rosenberg, au lycée Pasteur de Lille. Il s'agit de la plus haute distinction académique possible.