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Médecins intérimaires : 70 services d'hôpitaux fermés selon un syndicat, le ministère de la Santé dément

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  • France Bleu

Depuis début avril, la rémunération des médecins intérimaires est plafonnée. Des intérimaires refusent de venir travailler, et certains hôpitaux sont encore davantage sous tension. Le principal syndicat de médecins remplaçants affirme que 70 services sont fermés. Le ministère de la Santé dément.

Des hôpitaux sont en sous-effectif depuis la mise en place du plafonnement de la rémunération des médecins intérimaires Des hôpitaux sont en sous-effectif depuis la mise en place du plafonnement de la rémunération des médecins intérimaires
Des hôpitaux sont en sous-effectif depuis la mise en place du plafonnement de la rémunération des médecins intérimaires © Maxppp - Luc Nobout

C'était la crainte de plusieurs hôpitaux en France. Depuis la mise en place de la loi Rist et du plafonnement de la rémunération des médecins intérimaires à 1.400 euros brut début avril, les fermetures de services d'urgences et de maternités se multiplient dans les petits hôpitaux publics. Certains craignent déjà que la crise se prolonge au mois de mai.

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Mécontents de la mesure, des médecins remplaçants refusent de venir travailler. Selon le principal syndicat de médecins intérimaires, plus de 70 services hospitaliers sont fermés faute de médecins. Le ministère de la Santé dément ce chiffre, mais plusieurs services de petits hôpitaux sont au bord de la rupture"J'ai des échos de tous les départements français. Tous les jours. De tous les côtés, c'est en train d'exploser" alertait un médecin urgentiste sur franceinfo ce lundi. De quoi parle-t-on exactement ? Quelles sont les conséquences de l'absence de médecins intérimaires sur le terrain ? France Bleu fait le point.

De quoi parle-t-on ?

Depuis le lundi 3 avril, la rémunération des médecins intérimaires est plafonnée à 1.390 euros brut pour une garde de 24 heures. Le gouvernement a appliqué une mesure votée en janvier 2016, suspendue à cause de l'épidémie de Covid puis renforcée par la loi Rist en avril 2021. Un tour de vis assumé par le gouvernement malgré les craintes de fermetures de services : l'exécutif ne veut plus de ce qu'il appelle "l'intérim mercenaire", où certains praticiens font monter les enchères bien au-delà du plafond. Certaines rémunérations grimpent jusqu'à 4.000 voire 5.000 euros brut pour 24 heures. Selon le ministère de la Santé, ces dérives "signeront à court terme la mort de notre service public hospitalier".

Si cette mesure a pour but d'empêcher les abus, sur le terrain, elle tourne au casse-tête pour certains hôpitaux, des médecins intérimaires refusant de travailler s'ils ne peuvent plus négocier leurs tarifs.

Bataille entre les syndicats et le ministère

Le ministère de la Santé dément, ce mercredi à franceinfo, le chiffre de 70 services fermés temporairement dans les hôpitaux, faute de remplaçants. Un chiffre avancé par le principal syndicat de médecins intérimaires. Pour autant, le ministère ne donne pas de chiffres, ni sur les services impactés, ni sur le nombre de médecins réquisitionnés, ni sur le nombre de réservistes mobilisés. L'équipe du ministre François Braun reconnaît tout de même qu'il y a des problèmes.

"Il y a des fermetures de service d'urgence partout en France", maintient Éric Réboli, président du Syndicat national des médecins remplaçants des hôpitaux, ce mercredi sur franceinfo. "Si on supprime tous les salariés d'une entreprise, comment voulez-vous qu'elle fonctionne ? Là, on a supprimé tous les remplaçants. Donc, effectivement, il manque 10 à 20 % des effectifs habituels", affirme-t-il. "Tous les établissements sont touchés, même les établissements parisiens".

La liste de services qui ferment s'allonge

Interrogé sur franceinfo ce lundi, le porte-parole et président du Syndicat national des médecins hospitaliers remplaçants assure que la liste des services qui ferment s'allonge faute de bras. Éric Reboli entend "des échos de tous les départements français". Il évoque notamment "la Manche, la Bretagne, les Vosges, la Corse, etc" et alerte : "De tous les côtés, c'est en train d'exploser. C'est juste le haut de l'iceberg. Les services sont en souffrance".

Selon lui, certains médecins sont forcés d'effectuer plus d'heures pour pallier le manque de remplaçants : "On demande aux titulaires de faire 50 à 70 heures pour boucher des trous en avril, on leur a demandé d'annuler leurs vacances en mai" dénonce Éric Reboli. Il pointe du doigt également une mauvaise prise en charge des patients : "J'ai des échos d'infarctus pris en charge au bout de 24, 48 ou 72 heures".

Sur le terrain, la situation est de plus en plus compliquée. Dans les Vosges par exemple, 30 lits sont fermés à Remiremont, des urgences de nuit ne sont pas assurées à Vittel et la maternité est en tension à Épinal, rapporte l'Agence France Presse (AFP). "On essaie de convaincre nos anciens intérimaires de revenir, on n'arrête pas d'appeler, on ne fait que ça", confie Amandine Weber, la directrice générale adjointe de l'hôpital d'Épinal.

Des urgences au bord de la rupture

Partout en France, certains services sont proches de la rupture. En Gironde, les urgences de Sainte-Foy-la-Grande ont ainsi fermé, le 13 avril, pour dix jours, "en raison d'une carence en personnel médical non résolue", comme l'indique une affiche placardée sur la porte d'entrée. Toujours dans le sud-ouest, les urgences d'Oloron-Sainte-Marie (Pyrénées-Atlantiques) ont fermé durant le week-end et restent "en mode gradué" jusqu'à jeudi, avec appel "impératif" au Samu "avant de se déplacer", selon l'agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine. Même "régulation" à Manosque (Alpes-de-Haute-Provence), avec en prime une fermeture la nuit (de 18h30 à 8h30) depuis samedi et jusqu'au 25 avril.

À Aubenas (Ardèche), les restrictions ont été levées en journée, mais l'accès demeure limité aux horaires nocturnes, tout comme à Pontivy (Morbihan) à partir de mardi et jusqu'au 1er mai. Et à Feurs (Loire), les urgences n'ont toujours pas rouvert.

Pour dénoncer la situation aux urgences de Vittel, environ 600 personnes, dont plusieurs élus, ont manifesté leur mécontentement ce samedi dans la commune, rapporte France Bleu Sud Lorraine. En temps normal, cet hôpital permet à 44.000 habitants du sud-ouest vosgien de se trouver à proximité d'un service d'urgences. Depuis début avril, les urgences sont fermées la nuit et les week-ends depuis début avril. Selon les syndicats réunis devant l'établissement, "il manque notamment sept à huit équivalents temps plein d'urgentistes".

Des maternités qui n'échappent pas à la crise

Autre spécialité en difficulté chronique et qui n'échappe pas à la crise de l'intérim : les maternités. Faute d'anesthésiste, celle de Mayenne n'assure plus les accouchements depuis dimanche et pour au moins une semaine. "Suspension temporaire" également au Bailleul (Sarthe) depuis vendredi et jusqu'au 2 mai. En Dordogne, les salles de naissance de Sarlat, fermées depuis le 29 mars, devraient rouvrir "au plus tard le 2 mai" selon l'ARS Nouvelle-Aquitaine, rapporte France Bleu Périgord. Pas de perspective en revanche à Sedan (Ardennes), où l'ARS Grand Est a promis un "point de situation" mi-avril.

La maternité d'Epinal, la plus grosse du département avec 1.234 accouchements en 2022, emploie ainsi 3,5 gynécologues-obstétriciens à temps plein, quand il lui en faudrait huit pour fonctionner correctement. La différence était jusqu'ici comblée par les intérimaires, mais la réforme vient compliquer l'élaboration des plannings.

"Ce gouvernement trouve toujours des bouc-émissaires"

Sur franceinfo, Eric Reboli, le président du Syndicat national des médecins hospitaliers remplaçants (SNMHR) dénonce une stigmatisation des médecins intérimaires, sur qui le gouvernement rejette la faute : "Ça fait des mois qu'on évite les déserts médicaux dans les quatre coins de la France. Ça fait des mois qu'on se bat partout, qu'on renforce les équipes Covid depuis des mois, on renforce les hôpitaux pour éviter qu'ils ferment, que des services entiers ferment. La seule récompense qu'on a aujourd'hui, c'est d'être stigmatisés et maltraités".

Les médecins remplaçants assurent ne pas être écoutés : "Ce gouvernement trouve toujours des bouc-émissaires". Éric Reboli assure que les revendications des intérimaires ne sont pas le problème : "Le problème, c'est le manque de soignants en France. Il n'y a plus de médecins ni de soignants, ils fuient les hôpitaux et le gouvernement est déconnecté de la réalité".

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