"On va trop vite !", plongée dans la cabine de conduite de l’accident mortel du TGV à Eckwersheim
Au deuxième jour du procès de l'accident du TGV à Eckwersheim ce mardi, le tribunal correctionnel de Paris s'est penché sur le moment du drame. Des enregistrements vidéos et sonores ont été diffusés. Les images et les sons ont résonné dans une salle muette d'émotion.
Cette deuxième journée d'audience au procès de l'accident de TGV d'Eckwersheim ce mardi devant le tribunal correctionnel de Paris, a été marquée par les images du drame. Après avoir entendu l'ancien PDG de la SNCF, Guillaume Pépy, la veille, la cour a entendu un enquêteur ce mardi raconter sa découverte du drame. Elle a aussi visionné les images et les vidéos de ce samedi 14 novembre 2015, où la rame d'essai du TGV a basculé à hauteur d'Eckwersheim. Un moment d'émotion qui a pris toute l'assistance.
La SNCF, ses filiales Systra et SNCF Réseau ainsi que trois personnes physiques (le conducteur principal, un cadre de la SNCF et un ingénieur de Systra) sont poursuivis pour " homicides et blessures involontaires par maladresse, imprudence, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ".
Un silence de plomb
Un silence de plomb règne dans la salle du tribunal correctionnel de Paris. À l'écran, la vidéo prise par la Go Pro installée dans la cabine de conduite de la rame d'essai. On voit le virage arriver à grande vitesse, et cette phrase lancée dans la motrice : "On va trop vite !". Ensuite l'image tremble, se fige lors du déraillement, sur la vitre brisée de la motrice, et on entend des cris.
Dans la salle d'audience, le silence est total. Des personnes quittent la salle sous le coup de l'émotion, certaines au bord des larmes. Les images, ou plutôt les sons, continuent. On entend le désarroi de l'équipe de conduite. "Ça n'a pas freiné ? La rame est couchée derrière ?"
L'équipe de conduite ne le réalise pas, mais le train roulait à plus de 245 km/h au moment du choc, bien au-delà des 176km/h préconisés à cet endroit.
Des wagons disloqués dans les champs
Avant les vidéos, les parties civiles croyaient avoir affronté le pire en regardant les images des wagons éparpillés et disloqués le long d'un champ, en contrebas de la voie ferrée et de la motrice plongée dans le canal. Ces images aériennes de l'accident du TGV à Eckwersheim ce 14 novembre 2015 témoignent de la violence du choc. Dans un silence de plomb, elles sont diffusées dans le tribunal. L'homme qui témoigne, un des gendarmes chargés de l'enquête, parle d'une scène apocalyptique, avec des odeurs de fumée et de sang.
Les images du rapport du BEA-TT, le bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre.
Un avertissement, trois jours avant le drame
Avant la diffusion des vidéos de l'accident, les images d'un autre essai, trois jours avant le drame, ont été diffusées. On y voit les conducteurs discuter de manière très détendue. La vidéo montre aussi la manière de freiner, quelques minutes avant d'arriver dans la courbe. Finalement, la vitesse est respectée, même si les cadres doivent rappeler à plusieurs reprises au conducteur de freiner. "On fera mieux samedi !"conclut l'un d'eux.
"C'est très, très dur pour tout le monde"
Au-delà de cette vidéo tournée dans la cabine le jour du drame, ce deuxième jour de procès a été particulièrement éprouvant pour les parties civiles. À la sortie de l'audience, beaucoup sont secouées.
Agnès Miannay a perdu son mari Christophe, cadre de la SNCF. Ces images l'ont replongée dans l'accident. "J'ai l'impression d'avoir vécu nos derniers moments, (...) On voit les rails qui avancent. Enfin, ils n'avancent pas, mais le train qui avance sur les rails et j'avais l'impression d'être un peu encore avec lui, nos derniers moments ensemble".
Pour elle, c'est "beaucoup d'émotion", dit-elle. "On entend les professionnels dans la cabine, les conducteurs qui font des commentaires et qui parlent des paliers de vitesses, etc. C'est assez technique. Et puis d'un seul coup, on voit ce virage avant le pont avant Vendenheim et tout s'arrête. C'est l'accident qui vient d'avoir lieu".
Pour Agnès Miannay, ces moments sont aussi nécessaires pour comprendre ce qui s'est passé :"que ce ne soit pas juste une bataille d'experts".
"Il y a eu une erreur de commise. Et nous, ce qu'on espère, les victimes, eh bien, c'est de savoir que les personnes qui ont commis une erreur le reconnaissent"
Les débats doivent durer, près de 2 mois et demi, jusqu'au 16 mai prochain.
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