Les poules réagissent aux émotions en rougissant, selon les constatations de deux chercheuses d'Indre-et-Loire

Oui, les poules réagissent aussi aux émotions. C'est la conclusion d'une étude scientifique menée par deux chercheuses de l'Inrae (Institut national de la recherche agronomique et environnementale) de Nouzilly, Aline Bertin et Cécile Arnould.

Tout est parti d'une observation dans une ferme pédagogique, "je me suis retrouvée face à une poule Pékin, très docile, qui est venue vers moi spontanément, raconte Aline Bertin, je l'ai caressée spontanément et j'ai remarqué qu'elle changeait de couleur de peau en quelques secondes, passant du rouge foncé au jaune clair. J'étais très étonnée et je me suis dit qu'elle avait potentiellement des marqueurs d'émotion que j'ignorais."

Des émotions lors d'expériences négatives ou positives

Aline Bertin lance donc un projet de recherche, en compagnie de Cécile Arnould, éthologue à l'Inrae. Avec l'idée de casser certains clichés : "assez spontanément, les gens qui ont des animaux vont vous dire que leurs chiens et leurs chats ressentent des choses, constate Cécile Arnould, par contre les oiseaux sont les parents pauvres de ces études, et les poules encore plus car il y a cette image d'animal de basse-cour."

Les deux chercheuses ont réalisé des expériences sur des poules Pékin, Meusienne et Sussex, dans deux élevages d'Indre-et-Loire, à Sainte-Maure-de-Touraine et à Cléré-les-Pins, où Manuela Leduc élève des races anciennes : "Quand Aline m'a laissé un message pour me dire qu'elle cherchait un éleveur pour collaborer avec elle sur les émotions des volailles, je me suis dit : "qui me fait une blague à deux balles ?""

Les poules ont été observées, filmées pendant plusieurs semaines pour étudier leur changement de couleur en fonction des évènements de leur journée. La peau autour de l'œil et des barbillons virait au rouge, "voire au rouge groseille" lorsque les poules vivaient une expérience négative comme la capture, un bruit soudain inhabituel, ou lorsqu'il y avait de la nourriture plus appétente qu'à l'habitude comme des vers de farine ou des fruits. Dans des phases plus calmes, leur peau redevenait plus claire.

Au-delà de cette première mondiale - aucune littérature scientifique ne s'était penchée sur ce sujet jusqu'alors - l'idée est que ce travail serve la recherche avicole, "la question était de savoir comment les poules appréhendent-elles le monde dans lequel elles vivent ?", soulève Cécile Arnould. Cette étude peut servir d'outil d'évaluation du bien-être animal et pourquoi pas, à terme, à mieux adapter les méthodes de production aux gallinacées.