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Pouvoir d’achat : pourquoi les prix continuent à augmenter, alors que le niveau de l'inflation baisse

- Mis à jour le
Par
  • France Bleu

Pour la première fois depuis sept mois, le niveau de l'inflation du Panier France Bleu, en partenariat avec franceinfo et NielsenIQ, décélère, après un record en mars et une stagnation en avril. Pour autant, si la hausse des prix est moins forte, ils augmentent toujours. On vous explique pourquoi.

L'inflation ralentit, mais le ticket de caisse augmente toujours. L'inflation ralentit, mais le ticket de caisse augmente toujours.
L'inflation ralentit, mais le ticket de caisse augmente toujours. © Getty - Alvaro Medina Jurado

Un niveau d'inflation qui marque enfin le pas, mais des prix qui continuent à augmenter. C'est l'enseignement de la 7e édition du Panier France Bleu, en partenariat avec franceinfo et NielsenIQ. Sur les 37 produits du quotidien du Panier France Bleu, le niveau de l'inflation est en baisse, à 16,7% sur un an. Elle était de 17,6% sur un an en avril , après un record à 17,7% en mars. L'Insee a également repéré ce changement de dynamique, avec une estimation de l'inflation à 5,1% sur un an en mai, contre 5,9% en avril et 6% en début d'année, selon les chiffres dévoilés mercredi par l'institut. Sur l'alimentaire, l'inflation est de 14% en mai, contre 15% en avril, note l'Insee.

Pour autant, le panier France Bleu augmente d'1,50 euro en un mois, et coûte 109,66 euros en mai. Comment expliquer que les prix continuent à augmenter alors que le niveau de l'inflation baisse ? France Bleu vous explique.

Un niveau de hausse moins rapide, mais une hausse quand même

Pour comprendre le phénomène, il faut déjà rappeler de quoi on parle. L'inflation caractérise, par définition, la hausse des prix. Lorsqu'on affirme que le niveau de l'inflation ralentit, cela signifie que la hausse des prix ralentit. Mais cette hausse existe toujours et continue à faire grimper les prix, même moins vite. C'est un peu comme une voiture qui circule sur l'autoroute : quand on passe de 130 km/h à 110 km/h, la voiture ralentit, mais elle continue d'avancer.

Des prix déjà très hauts

L'autre facteur d'explication, c'est le niveau de prix auquel on se compare. L'inflation est toujours calculée sur un an : on compare les prix de mai 2023 à ceux de mai 2022. Or, l'an dernier, le niveau des prix avait brutalement augmenté après le début de la guerre en Ukraine. Et comme nous l'expliquions le mois dernier, une même augmentation appliquée à des prix déjà très hauts fera grimper davantage le prix déjà élevé.

Exemple avec deux paquets de pâtes, l'un à 1,25 euro et l'autre à 1,50 euro en 2022. Si vous appliquez une hausse de 10% en 2023 à chacun de ces paquets, le premier va prendre 12 centimes pour passer à 1,37 euro. Le second, qui était déjà plus cher, va prendre davantage, 15 centimes, et passer à 1,65 euro.

Certains prix commencent à baisser

"Ce qu'il faut retenir, c'est que les prix montent moins vite que ces derniers mois", souligne Emmanuel Cannes, expert inflation et prix chez NielsenIQ. Forts de cette nouvelle dynamique, les prix de certains produits, notamment les marques distributeurs et les premiers prix, stagnent ou commencent même à baisser de quelques centimes.

Les enseignes négocient en effet les produits de leurs gammes tout au long de l'année avec leurs fournisseurs, contrairement aux produits de grande marque "L'ajustement est beaucoup plus souple sur les marques distributeurs, donc les enseignes ont la capacité d'adapter les prix un peu plus rapidement aux variations des matières premières", confirme Emmanuel Cannes. Et sur les produits des trimestres anti-inflation, qui sont pour la plupart des gammes de distributeurs, "On constate de plus en plus de prix vraiment en baisse, jusqu'à 20%", indique-t-il.

Signe de cette tendance, le kilo de farine 1er prix de notre Panier se stabilise à 0,75 euros, au même prix que le mois dernier. Le gel douche de marque distributeur baisse de -7 centimes en un mois, et le pack de 6 litres de lait de marque distributeur perd -3 centimes.

Les nouvelles négociations vont-elles faire baisser le prix des marques ?

Pour Emmanuel Cannes, les prix des produits de marque pourraient, eux aussi, commencer à baisser dans les mois à venir. "La grosse interrogation va être la nouvelle entrée en négociation entre la grande distribution et les 75 plus gros industriels", explique-t-il. Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire doit recevoir les industriels ce lundi, alors que les discussions devaient reprendre la semaine dernière. Si des accords sont conclus, certaines filières pourrait voir des baisses significatives, de 4 à 5%, entre septembre et décembre. Le spécialiste s'attend à "des effets relativement importants à partir de l'été, et des décélérations importantes à la rentrée."

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Le président de Système U appelle les industriels à à passer "de la bonne volonté dans les médias à la réalité dans les discussions"

Mais Dominique Schelcher, le président de Système U, a appelé ce lundi sur franceinfo les industriels à passer "de la bonne volonté dans les médias à la réalité dans les discussions". "Pour l'instant, il ne se passe pas grand-chose", a regretté le président des enseignes Super et Hyper U. "À date d'aujourd'hui, on a sur les 75 entreprises qui se sont engagées à rediscuter beaucoup de retours négatifs, donc pas de réouverture de négociations. J'ai une poignée seulement d'entreprises qui disent, 'on va commencer à discuter' et j'en ai une majorité en fait, qui n'a même pas répondu à notre appel suite à l'appel des ministres", a-t-il regretté.

Dominique Schelcher appelle à changer la réglementation française, pour pouvoir négocier tout au long de l'année avec les industriels qui fabriquent les produits de grande marque, ce qui existe déjà pour les marques distributeurs. Pour lui, il faut "changer le système de négociation français, arrêter de négocier pendant trois mois, du 1ᵉʳ décembre au 28 février avec des prix qui s'appliquent toute l'année. Ce système n'est plus valable, n'est plus opérationnel quand il y a des variations de cours comme il y en a actuellement", estime-t-il. "C'est pour ça que les industriels se réfugient derrière cette loi et n'ont pas envie de renégocier", juge-t-il.

Les niveaux de prix d'avant crise "quasi-impossible à atteindre"

Pour autant, un retour aux prix d’avant-crise, comme le prédisait le gouvernement il y a encore un mois, paraît très peu probable et même quasiment impossible. Le 30 avril dernier sur France Inter, la ministre du Commerce Olivia Grégoire promettait un retour à "des prix qui étaient les prix pré-inflation." Des propos sur lesquels la ministre est revenue la semaine dernière sur BFMTV , affirmant qu*'"on ne retrouvera probablement pas la déflation que nous avons connue".*

"Même si les matières premières ont baissé, elles n’ont pas retrouvé leurs niveaux d’avant-crise", explique Emmanuel Cannes. Et puis "dans les entreprises qui produisent les biens alimentaires, les salaires ont aussi augmenté, ce qui fait augmenter les charges et les coûts de production" explique-t-il. "Bien sûr, ces salaires ne baisseront pas dans les mois à venir". Il faut dire qu'avec près de dix ans de baisse des prix effacées en 18 mois, le pari semblait plus qu'ambitieux.

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