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Logement au Pays Basque : la prolifération des meublés de tourisme stoppée par la mesure de compensation

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Un an après l'entrée en vigueur de la règle de compensation des meublés de tourisme dans 24 communes du Pays basque, les premiers résultats sont là.

Le premier objectif de la règle de compensation a été atteint : stopper la prolifération de logements transformés en meublés de tourisme. Le premier objectif de la règle de compensation a été atteint : stopper la prolifération de logements transformés en meublés de tourisme.
Le premier objectif de la règle de compensation a été atteint : stopper la prolifération de logements transformés en meublés de tourisme. © AFP - Romain Doucelin

Il y a eu le temps du lobbying, des mobilisations citoyennes, celui des débats et du vote au conseil communautaire d'agglomération, puis l'entrée en vigueur de la mesure de compensation des meublés de tourisme au Pays basque. En ce 1er mars 2024, l'heure est aux premiers résultats. Un an après l'application de cette règle, l'agglomération Pays Basque, responsable de cette mesure, se dit très satisfaite.

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Baisse radicale des transformations de logement

Cette règle de compensation a déjà porté ses fruits selon l'agglomération, avec -92% d'autorisations de changement d'usage (transformation d'un logement en meublé de tourisme), un chiffre notamment communiqué par l'association Alda et confirmé par l'agglomération Pays Basque : en 2022, 4 665 autorisations de transformation d'usage ont été délivrées ; entre le 1er mars et fin décembre 2023, 369 autorisations de transformation d'usage ont été délivrées. Pour rappel, il faut désormais pour mettre en location un meublé de tourisme :

  • Proposer un autre bien immobilier pour une location à l'année ;
  • Que ce bien soit situé dans la même commune ;
  • Et que ce bien soit un local qui n'était pas destiné au logement, n'était pas un commerce, ni situé au rez-de-chaussée. Un local qu'il faudra donc transformer en logement.

La règle de compensation est tellement difficile à mettre en place, que seulement deux personnes (une à Hendaye, une autre à Biarritz) ont réussi à faire valider leur dossier. "On a fait des recherches et c'est une personne qui a demandé à construire deux logements sur une même parcelle, explique Kotte Ecenarro, maire d'Hendaye. Donc il a pu faire un logement saisonnier et un autre logement à l'année."

Près de 10 000 autorisations en suspens

Autre chiffre très parlant, le nombre de créations de logements mixtes : Alda annonce 250 ont été délivrées en 2023 dans la zone tendue du Pays basque. Cela permet aux propriétaires qui ne veulent pas louer à l'année de dédier leur bien immobilier aux étudiants pendant dix mois de l'année, et de le réserver aux touristes durant l'été.

Cette solution qui aide les plus précaires à se loger pour étudier au Pays basque, complique en revanche la vie de ceux qui ont un travail, mais qui ne trouve pas de location à l'année. Et c'est là l'une des grosses limites de cette mesure, selon la FNAIM (Fédération nationale de l'immobilier), collectif qui était vent debout contre sa mise en place. "90% des gens conservent leurs biens, ils ne le remettent pas à la location à l'année, observe Élodie Mir, coprésidente de la FNAIM au Pays basque et en Béarn. Ils le conservent et ils vont continuer à en jouir l'été. Le reste du temps, ce sera du lit froid", craint-elle. Interrogé sur ce point, Jean-René Etchegaray, président de l'agglomération Pays Basque, tacle un argument "qu'il entend depuis le début du projet de la mesure de compensation, mais qui n'est fondé sur aucun chiffre".

Les deux parties se connaissent bien, puisque trois recours sont actuellement étudiés par la cour d'appel de Bordeaux sur cette mesure de compensation, et l'un d'eux a été déposé par la FNAIM. En première instance, la justice avait donné raison à l'agglomération Pays Basque.

Il y a aussi toute une part de logements, et donc de propriétaires, qui pour l'instant échappent aux mailles de cette mesure de compensation. "Au 1ᵉʳ mars 2023, il y avait 9 991 autorisations temporaires de trois ans", chiffre Jean-René Etchegaray, qui étaient encore valables. Il faudra donc attendre le 1er mars 2026 pour voir toutes ces autorisations être expirées, et se faire une idée réelle du nombre de logements libérés de la location de courte durée, grâce à la mesure de compensation.

Contactée, l'Audap (Agence d'urbanisme Atlantique & Pyrénées), qui est notamment chargée d'étudie le marché immobilier basque, est en train d'actualiser ses données pour savoir combien de logements sont véritablement concernés par cette mesure de compensation. En 2022, lors du vote à l'agglomération, l'agence parlait de 16 000 logements.

Les limites législatives

Pour l'année à venir, il faut avancer, prône l'association Alda, c'est-à-dire coincer les fraudeurs et punir. "On sait qu'il y a un certain nombre de locations de courte durée qui sont faites en toute illégalité", affirme Xebax Christy, coprésident d'Alda qui "estime qu'il y en a environ 2 000 sur l'ensemble de l'agglo." Une équipe de trois agents au sein de l'agglomération s'occupe du contrôle, bientôt un quatrième en avril. Mais aucune amende (jusqu'à 50 000 euros) n'a été dressé, et poursuite judiciaire n'a pour l'instant été actée. "Nous n'en sommes pas encore effectivement à poursuivre devant les tribunaux les personnes qui se trouvent en infraction", reconnait Jean-René Etchegaray.

Du côté de la FNAIM (Fédération nationale de l'immobilier), on espère qu'après avoir sévi contre les propriétaires, on va proposer une autre politique, et récompenser ceux qui veulent bien jouer le jeu. En tout cas, c'est la seule manière pour augmenter véritablement le nombre de locations longue durée au Pays basque, selon Élodie Mir : "Aujourd'hui, il n'est pas normal que quelqu'un qui loue à l'année ait moins d'avantages fiscaux que quelqu'un qui loue à la semaine, qui va avoir une meilleure rentabilité et qui en plus peut continuer à jouir de son bien." Sauf que pour cela, il faut changer la loi.

Un marché bouleversé

Même obstacle législatif pour les 120 jours de location touristique autorisés dans l'année pour un logement principal, soit quatre mois, "ce qui est quand même relativement confortable", observe Miguel Harriague, notaire de Bayonne. Dans les faits, une personne peut mettre en location un logement de juin à septembre inclus, sans être inquiété par la mesure de compensation. L'agglomération Pays Basque ne peut rien faire. "Il faudrait une modification législative", confirme Jean-René Etchegaray au micro de France Bleu Pays Basque.

Ce qui est certain, c'est que cette mesure a déjà bouleversé, au moins en partie, le marché immobilier au Pays basque. Surtout chez "ceux qui projetaient d'acheter une résidence secondaire et de se livrer à la location saisonnière de courte durée, pour assumer l'entretien de sa résidence secondaire ou la financer en tout ou partie, précise Miguel Harriague. Là, c'est devenu chose impossible parce que financièrement ça ne passait plus. On a eu certains clients qui ont renoncé à leur achat et certains qui ont revendu parce qu'effectivement, il y avait cette nouvelle réglementation qui était applicable."

Sollicitée, la multinationale Airbnb n'a pas souhaité répondre aux questions de France Bleu Pays basque, en expliquant qu'en tant que société cotée en bourse, tout commentaire sur ses activités est soumis à une communication très stricte.

Ma France : Améliorer le logement des Français

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