Passer au contenu

Crise du logement : comment des colocations de familles monoparentales voient le jour

Par

Alors que la crise du logement frappe de nombreux ménages, les familles monoparentales sont les plus durement touchées, et peinent bien souvent à trouver un logement. Des colocations de familles monoparentales voient ainsi le jour. Exemple à Paris.

"Avec un seul revenu, c'est le parcours du combattant", dénonce la Confédération Syndicale des Familles. "Avec un seul revenu, c'est le parcours du combattant", dénonce la Confédération Syndicale des Familles.
"Avec un seul revenu, c'est le parcours du combattant", dénonce la Confédération Syndicale des Familles. © Getty - AleksandarNakic

L'appartement est situé dans le 20e arrondissement de Paris. Cela fait un mois que Victor et ses deux enfants y ont rejoint Zoé et sa petite fille. Deux familles monoparentales en colocation, faute d'avoir pu trouver un logement. "Il faut un peu d'espace pour des enfants. Quand on est seul à Paris, un loyer à 1.100, 1.300 euros, c'est compliqué", explique Victor. Le papa de 28 ans cherchait un appartement depuis déjà plusieurs mois.

Chaque année, près de 125.000 couples avec enfants se séparent et doivent trouver un nouveau logement. Mais avec un seul salaire et des enfants à charge, c'est presque mission impossible. Certaines structures, comme l'association parisienne Pause toit, proposent ainsi des colocations pour familles monoparentales.

Dans la colocation de Victor et Zoé, cuisine et salon sont partagés par quatre appartements privés. Chacun a donc un chez-soi, avec réfrigérateur et salle de bain. Dans son petit studio individuel de 35 mètres carrés, chaque parent possède aussi une chambre pour accueillir ses enfants. Pour y habiter, Victor paye un loyer de 850 euros charges comprises. Et même si chaque famille doit rester au maximum 18 mois dans la colocation, ces quelques mois lui permettent de souffler un peu : "On a du temps pour trouver et répondre aux annonces. Je respire", confie-t-il.

"J'ai regardé des centaines d'annonces, répondu à une cinquantaine, je n'ai eu aucun aboutissement", raconte Zoé. Selon la Défenseure des droits, un parent seul a deux fois plus de mal à trouver un logement par rapport à une famille avec deux parents.

"Avec un seul revenu, c'est parcours du combattant"

Valérie Dagut, à l'origine du projet, a vécu la même chose : "On est entre-deux : pas hyper précaire, mais trop pour trouver un logement dans le parc locatif privé".

C'est aussi le constat de Romain Biessy, secrétaire général de la Confédération syndicale des Familles, invité ce jeudi sur franceinfo. "La loi du marché du logement s'équilibre sur la solvabilité des ménages (...) Avant la guerre, lorsque les femmes ne travaillaient pas, on avait accès à un logement familial avec un seul salaire", note-t-il. "À partir du moment où les femmes ont travaillé, le marché s'est adapté pour faire reposer le logement familial sur deux salaires". Aujourd'hui, "quand on se retrouve avec un seul revenu, on est dans un parcours du combattant et des situations dramatiques", dénonce-t-il, témoignant de "l'énorme difficulté des familles monoparentales pour vivre".

Résultat, "41% des enfants qui vivent dans une famille monoparentale vivent sous le seuil de pauvreté, contre 16% des enfants dans une famille dont les parents sont en couple. Donc, on voit bien que c'est une vraie source de pauvreté", abonde Dominique Vérien, sénatrice UDI de l’Yonne qui préside la mission Familles monoparentales au Sénat.

80% de femmes

Parmi ces familles monoparentales, 80% de femmes, selon la sénatrice. "Souvent le problème, c'est que les mères s'étaient mises en emploi à temps partiel pour pouvoir s'occuper des enfants. Donc avec un emploi à temps partiel, autant vous dire que trouver un logement pour pouvoir loger tous les enfants, c'est totalement incompatible", souligne-t-elle. "Statistiquement, ce sont surtout les mamans qui se retrouvent dans cette situation-là", confirme Romain Biessy.

Pas assez d'"aides à la pierre"

"La valeur de l'habitat a augmenté de 120% depuis dix ans, alors que les revenus ont augmenté de 20%. Comment est-ce qu'on peut joindre les deux bouts ?", s'interroge le secrétaire général de la Confédération syndicale des Familles. Il dénonce le "désengagement financier de l'État dans la construction de logements HLM", qui a pour conséquence de "nouvelles productions, qu'elles soient dans le parc privé ou dans le parc HLM, beaucoup trop chères".

"Lorsqu'on ne met pas d'aide à la pierre, lorsqu'on ne finance pas la construction du logement dès le début" autrement que par "des emprunts à rembourser", "nécessairement pour atteindre l'équilibre économique et avoir un prix de loyer équilibré, les loyers sont trop chers".

Il en veut pour preuve que "quand une maman demande un logement, systématiquement, on va lui proposer un logement qui a été construit il y a 30 ans. Parce qu'à l'époque, le financement de l'État permettait d'avoir des sorties de loyer moins chères".

"Ce qu'on réclame vraiment, conclut Romain Biessy, c'est avoir une société qui permet à chacun de vivre de son travail, que l'État soit garant d'assurer les besoins fondamentaux. Le logement a cette particularité que c'est une dépense contrainte. On ne peut pas vivre sans logement. On doit donc sortir le logement d'une logique spéculative. Ça permettrait de renforcer le pouvoir d'achat de l'ensemble de la société, d'accroître la consommation et donc de remettre de l'élan. Actuellement, une trop grande partie des salaires sont consacrés au logement".

Ma France : Améliorer le logement des Français

Quelles sont vos solutions pour aider les Français à bien se loger ? En partenariat avec Make.org, France Bleu mène une consultation citoyenne à laquelle vous pouvez participer ci-dessous.

undefined