Corse : Comment la viticulture peut-elle s'adapter au changement climatique ?

"Adaptation au changement climatique : risques et opportunités pour les villes et le rural", c'était le thème d'une conférence organisée ce vendredi 19 janvier à l'auditorium du musée de Bastia. Un événement s'inscrivant dans le cadre de la démarche "Corsica Pruspettiva 2050" lancée par la présidente de l’Assemblée de Corse, Marie-Antoinette Maupertuis.

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"L'heure est plus que jamais à l'adaptation"

Plusieurs spécialistes du sujet se sont succédés à la tribune, parmi lesquels Jean-Marc Touzard, économiste agricole et notamment directeur de recherche à l'INRAE (Institut national de la recherche agronomique). Son intervention a porté sur la viticulture. Du fait du changement climatique, les vendanges ont lieu en moyenne 18 jours plus tôt qu'il y a 40 ans, selon le Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. "L'heure est plus que jamais à l'adaptation et plusieurs pistes sont possibles" explique Jean-Marc Touzard. "Dans le cadre d'un scénario climatique qui est mesuré, c'est-à-dire si on arrive à stabiliser le climat après 2050 autour des +1,5 +2°, on a des solutions : des changements de cépage, des changements de pratiques, y compris des innovations œnologiques qui permettent de corriger un petit peu des effets sur la qualité. Repenser un petit peu la localisation des vignes, des parcelles dans un terroir même, monter en altitude un peu en Corse par exemple".

"Contrer la baisse des récoltes"

"On a donc plein de solutions possibles qu'il faut combiner", ajoute-t-il. "Mais si on est sur une trajectoire d'accélération du changement climatique avec après 2050 +3,5 +4, là ça deviendrait très compliqué".

Une complexité dont le vigneron Pierre Acquaviva a pris toute la mesure. À la tête du domaine Alzipratu, localisé en Balagne, entre la forêt de Bonifatu et la vallée de la Figarella, ce dernier s'est lancé dans une expérimentation novatrice en janvier 2023, en cultivant désormais une parcelle de vigne -de sciaccarellu, vermentinu et minustellu- à plus de 800 mètres d'altitude, sur la commune de Pioggiola, dans le Giussani, où la pluviométrie est supérieure à celle en plaine et où surtout les températures sont moins élevées avec moins d'évaporation. "Il s'agit de contrer la baisse des récoltes, d'une part, et, d'autre part, la mortalité des ceps de vignes" souligne Pierre Acquaviva.

"C'est plus facile là-haut"

"Sur des jeunes plants qui nécessitent en général de l'irrigation ou en tout cas un apport d'eau durant la période de l'été, cet apport n'a pas été nécessaire dans ces vignes plantées en altitude", poursuit le responsable du vignoble en AOC Calvi. "Elles ont planté de manière très vigoureuse avec un cycle un peu différent d'en bas. D'ailleurs, elles ont poussé plus tardivement, mais elles ont poussé sans apport d'eau. C'est un premier constat qui, je dirais, nous conforte dans l'idée que c'est plus facile là-haut". Et d'ajouter : "On n'est pas parti de rien non plus pour monter ce projet. On avait des éléments de Météo France, avec des années de recul et d'observation. Nous avons nous-même mis nos propres capteurs depuis 3 ans avant de planter la vigne pour avoir des chiffres sur les parcelles concernées qui nous intéressaient, où on voyait qu'il y avait la possibilité de faire et donc après on a fini par se lancer".

Les premières bouteilles de ce vin de montagne seront produites d'ici deux ans pour une mise sur le marché en 2027.