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Planète Bleu Occitanie : le canal du Midi, richesse ou contrainte écologique ?

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Quand le canal du Midi a été construit au XVIIe siècle, seules ses fins marchandes, commerciales, prévalaient. 450 ans plus tard, l'ouvrage devenu touristique s'est inséré dans son écosystème et remplit un rôle naturel, au service de l'homme.

Le Canal du midi, ici à hauteur de Ramonville (Haute-Garonne).
Le Canal du midi, ici à hauteur de Ramonville (Haute-Garonne). © Radio France - Bénédicte Dupont

Alors que la haute saison de la plaisance vient de démarrer sur le canal du Midi, Planète Bleu Occitanie s'interroge sur les apports écologiques de ce monstre de 240 kilomètres de long entre Toulouse et la Méditerranée, bâti en quinze longues années à la fin du XVIIe siècle. Qu'apporte t-il à son écosystème et à quels coûts ? Pour nous répondre, la responsable de l'unité Eau et Environnement chez Voies Navigables de France (VNF) Sud-Ouest, Emilie Collet.

France Bleu Occitanie : c'est un débat plus général très actuel, l'empreinte écologique des infrastructures. Peut-on imaginer que la construction du canal à l'époque a été une sorte de "carnage écologique" ?

Emilie Collet : "C'est difficile à dire parce que tout cela n'a pas été évalué à l'époque et on n'a pas une connaissance très précise de l'écosystème à ce moment là. Je ne crois pas que ce fut un "carnage" écologique car de nombreuses zones traversées par le canal ne sont pas boisées, et elle devaient déjà à l'époque être assez ouvertes. Toutefois, si il fallait creuser un canal de cet type là aujourd'hui, il y aurait un impact écologique non négligeable sur les milieux. Il suffit de voir l'élargissement de l'autoroute A61 vers la Méditerranée et qui longe le canal, on voit bien qu'il y a des impacts.

Quels sont ses principaux apports écologiques aujourd'hui d'après vous ?

Je vois deux aspects principaux. D'un côté, les aspects liés au milieu terrestre, les abords, les berges qui ont été rapidement végétalisées. La berge est un écotone très intéressant, mi aquatique, mi terrestre avec des faunes et des flores très intéressantes qui viennent enrichir des zones assez pauvres comme les plaines de monoculture du Lauragais par exemple.

Et puis il y a l'apport de l'eau, toutes ces circulations d'eau. Je ne parle pas de nappe, mais plutôt d'un bulbe d'eau autour du canal, qui très certainement joue un rôle en humidifiant des sols, avec des infiltrations puisque le canal n'est pas un tuyau en béton.  On mesure mal ce rôle mais grâce au canal, on maintient l'eau toute l'année, sauf lors des vidanges en hiver. En été, sauf très rare rupture d'alimentation, on a toujours un niveau d'eau constant dans le canal, avec une qualité de l'eau assez stable. Ce n'est pas le cas d'une rivière par exemple.

Le Canal représente aussi une contrainte puisqu'on prélève de la ressource naturelle pour l'alimenter ?

On considère que sur les 240 kilomètres de canal, 20% sont remplis par les réserves artificielles. La plus connue, c'est le lac de Saint-Ferréol et d'autres plus petites réserves voisines (bassin du Lampy, barrage des Cammazes, lac de la Galaube) dans la Montagne noire. Et puis on prélève aussi dans la Ganguise, ce barrage réservoir entre Avignonet-Lauragais et Castelnaudary, qui a vraiment du mal à se remettre de la sécheresse de 2022. D'ailleurs, sur la portion entre Toulouse et Villedubert (Aude), seules les réserves alimentent le canal.

Et de manière globale, le canal est à 80% alimenté par des prélèvements dans les cours d'eau naturels, en majorité le fleuve Aude. On a aussi la Cesse un affluent de l'Aude et le canal de la Robine à Narbonne lui même alimenté par l'Aude. On dépend principalement de l'hydrologie, du fleuve.

Je suis persuadée que malgré ces prélèvements, ce maintien d'eau l'été qui caractérise le canal constitue une sorte de contre-rivière qui apporte toute la vie qui peut graviter autour. Dans la lutte contre la sécheresse, on est capable de faire des adductions de l'été malgré la difficulté. L'été dernier, on est parvenu à maintenir toute la haute saison de navigation, en l'arrêtant un peu plus tôt que d'habitude dans l'automne.

Et toute cette eau utilisée pour faire passer les bateaux, n'est-ce pas du gâchis ?

Non parce que cette eau elle sert aussi beaucoup à l'irrigation agricole. Au XVIIIe siècle, dans l'Aude, on a mis en place des systèmes pour lutter contre le phylloxéra dans les vignes en les inondant quasiment. Et depuis, des viticulteurs, de cultivateurs, des arboriculteurs prélèvent l'eau du canal l'été avec des pompes sur le domaine de l'Etat. C'est un service payant avec des redevances hydrauliques.

Dans une moindre mesure, cette eau du canal elle peut aussi être prélevée pour un usage industriel. Et puis ce qu'on sait moins, c'est qu'elle est aussi utilisée, indirectement, pour être transformée en eau potable. Cela ne concerne pas les Toulousains, plutôt les Audois dans le secteur de Puichéric. Là, le canal charge une nappe dans laquelle on prélève de l'eau pour en faire de l'eau potable".

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