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PSG Féminines : "Après le match aller, on a parlé toute la semaine" confie Jackie Groenen

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A trois jours de la demi-finale retour de Ligue des Champions qui verra les féminines du PSG accueillir l'Olympique lyonnais au Parc des Princes pour un combat qui s'annonce épique, la milieu de terrain parisienne Jackie Groenen a longuement reçu Pia Clemens au Campus PSG de Poissy.

Jackie Groenen au Campus PSG de Poissy le 25 avril 2024 Jackie Groenen au Campus PSG de Poissy le 25 avril 2024
Jackie Groenen au Campus PSG de Poissy le 25 avril 2024 © Radio France - Pia Clemens

Après avoir mené 2-0 pendant un grande partie du match aller de la demi-finale de Ligue des Champions, les Féminines du PSG ont essuyé un triplé inscrit par leurs rivales historiques de l'Olympique lyonnais en... six minutes. A trois jours du match retour, qui se jouera ce dimanche à 16 heures au Parc des Princes, les joueuses parisiennes se préparent à un combat de très haut niveau. Quelques jours de calme avant la tempête pendant lesquels Pia Clemens s'est rendue au Campus PSG de Poissy pour y rencontrer Jackie Groenen.

Arrivée au club à l'été 2022, Jackie est aujourd'hui unanimement reconnue comme étant le "soleil" de l'effectif. Mais elle s'est aussi imposée comme la deuxième valeur sûre indiscutable du milieu de terrain de l'équipe, aux côtés de la capitaine Grâce Geyoro. Multiple championne des Pays-Bas en judo pendant sa jeunesse, sœur, fille et petite-fille de footballeurs, celle qui porte le numéro 14 en hommage à la légende néerlandaise Johan Cruyff est passée par Chelsea, Francfort et Manchester United avant de signer à Paris. Rencontre avec l'un des visages du renouveau de l'équipe première féminine du Paris Saint-Germain.

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Sur le match des jeunes pousses de l'équipe face au Paris FC, qui s'est soldé par un match nul (1-1) la veille de l'entretien

On a joué avec beaucoup de jeunes filles qui n'ont jamais joué contre une équipe comme le PFC. Ce n'était pas un match très facile, mais elles ont joué très, très bien, avec beaucoup de courage, avec beaucoup d'esprit. J'étais vraiment contente de voir ça. Elles se sont battues pour égaliser. Et j'étais contente aussi pour les petites qui ont joué leur premier match de D1.

Sur l'arrivée de playoffs en championnat

En fait, c'est la première fois que je dispute une compétition avec des playoffs. J'avais vu ça en basket, mais pas en foot. Je ne suis pas complètement sûre de savoir ce que j'en pense à ce stade. C'est vrai, ça donne la possibilité de faire tourner un peu plus. Cette année, on dispute trois compétitions, avec près de deux matchs par semaine. Comme ça, on a la possibilité de gagner les trois titres. Mais avec une autre forme de compétition, on aurait des matchs différents. J'ai encore besoin d'un peu de temps avant de savoir si c'est une bonne évolution.

Sur les trois buts encaissés à Lyon à la fin de la demi-finale aller de Ligue des Champions (défaite 3-2)

C'est dur parce que tu sais que tu dois changer quelque chose, mais ce n'est pas si simple de savoir quoi faire sur le moment, sur le terrain. Il y a toujours des moments faibles, quand tu joues contre une équipe de haut niveau comme Lyon. On a bien joué pendant 80 minutes, mais je pense qu'on n'a pas bien réagi sur la fin du match. Parce qu'on doit savoir que ça va arriver. Qu'elles vont attaquer avec tout le monde. Et je pense que c'était à nous, les joueuses d'expérience, de porter l'équipe. Mais sur le moment, ça a été trop vite. Je ne dirais pas qu'on a été surprises parce que quand elles marquent le but du 2-1, on n'était pas dans un moment faible. Je n'ai ni senti ni entendu personne sur le terrain dire qu'elle se sentait faible. On pensait : "Ok, c'est bon, on joue à notre niveau comme pendant les 80 premières minutes, ce n'est pas grave, ça arrive". Mais les Lyonnaises ont des attaquantes très rapides, et on n'a pas bien réagi.

On a parlé toute la semaine ! Oui, bien sûr, parce qu'on veut aller en finale, c'est clair. On veut montrer aussi qu'on a le niveau pour arriver là. Et on a beaucoup discuté pour savoir comment gérer une situation comme celle-là sur le moment, comment changer le tempo de jeu, tout ça... En fait, on en a toutes discuté, c'est clair. Mais c'est le foot aussi, tu sais ! Ca paraît toujours plus simple d'en parler une fois que c'est passé. Sur le moment, ce n'est pas aussi simple.

C'était à nous, les joueuses d'expérience, de prend l'équipe toute ensemble et de dire : "Ok, maintenant on fait ça." Mais on ne l'a pas fait sur le moment. Et c'est dommage parce que pendant 80 minutes, j'ai senti qu'on était à la hauteur de l'Olympique lyonnais. C'est dommage de donner trois buts comme ça. On en a beaucoup, des filles qui peuvent faire ça. Grâce [Geyoro], Saki [Karchaoui], Elisa [De Almeida], Marie [Katoto] aussi avec toute son expérience... Et moi aussi, je pense. Mais dans un moment comme ça, ce n'est pas toujours facile. Quand tu ne sais pas exactement ce que tu dois changer sur le coup. Mais on doit le faire. C'est important pour nous, et on a parlé de ça aussi bien sûr.

Sur le niveau de l'OL... et du PSG

Lyon est une grande équipe, mais on parle toujours d'accrocher le niveau de Lyon. Moi, je sens que cette saison, on est proche, proche, proche. Ils ont encore un très bonne équipe. Ce n'est pas facile de jouer contre Lyon, mais pour moi la différence est vraiment petite maintenant, voire inexistante. J'espère que dimanche, on pourra montrer qu'on peut arriver au même niveau. On a maintenant une équipe qui travaille vraiment pour le collectif. On se dit toujours que quand quelqu'un perd le ballon, ce n'est pas grave. Une coéquipière doit prendre la responsabilité de le récupérer. Tu sens ça sur le terrain. C'est une force incroyable. Cette saison, on a vraiment l'opportunité de faire quelque chose. Toute l'équipe le ressent. J'espère que ça marchera dimanche, aussi avec nos supporters. C'est incroyable de jouer avec les ultras... J'espère que ça va nous donner un petit peu plus.

C'est important pour nous de faire progresser notre équipe. Ceux qui nous suivent cette saison savent qu'on a constamment progressé. Et c'est peut-être le dernier "step" dans notre croissance, de vraiment jouer un match pour gagner. Pas seulement pour produire un beau jeu. On aime ça, aussi pour le public. On veut jouer un beau football, comme à l'entraînement. Mais c'est peut-être notre dernière étape : accepter de ne pas jouer pendant dix minutes. De fermer le jeu. C'est simple de le dire, mais ce n'est pas toujours simple à transmettre sur le terrain. Mais cette semaine, oui bien sûr, c'était dur. Tu ne veux pas que ça arrive à ton équipe [de se faire remonter au score en six minutes]. Mais on travaille.

Sur l'intensité des rencontres entre le PSG et l'OL

C'est incroyable parce que j'ai joué en Allemagne, en Angleterre aussi, qui est un pays qui vit pour le football. Avec Manchester United, j'ai joué des derbys contre Manchester City. Ce n'est pas simple non plus. Mais ici, quand tu joues Lyon, c'est un jeu complètement différent. Ca, c'est incroyable. Tu sens vraiment le haut niveau de deux équipes qui veulent prouver laquelle est la meilleure. Je n'ai jamais vécu ça ! Pour un athlète, c'est incroyable... mais vraiment ! Le premier jour où je suis arrivée ici, on m'a parlé du prochain match contre Lyon. J'ai signé, et la première chose qu'on m'a dite, c'est : "Lyon, ce sera notre quatrième match" [Rires] Mais c'est aussi bien, je pense. C'est bien pour faire progresser le foot féminin. C'est grâce à Lyon que le PSG a petit à petit réussi à devenir plus fort. Mais l'inverse est vrai aussi ! C'est vrai des deux côtés [Rires].

Sur le soutien des supporters parisiens

Mon premier match au Parc, oui, c'était contre Lyon. Les ultras, c'est un truc incroyable ! J'ai joué dans beaucoup de stades, avec beaucoup de gens. Mais l'esprit ici, à Paris, c'est quelque chose de différent. Même quand le stade n'est pas plein et qu'on joue devant 10 000 personnes, tu as l'impression que le stade est plein. Parce que les ultras, c'est un truc de ouf ! Pour moi, jouer dans un stade comme ça, avec les gens, c'est différent de quand j'ai commencé. Je jouais pour ma famille ! Maintenant, la progression du foot féminin, c'est un truc de ouf. On est vraiment contents, et j'espère que ça va continuer à monter. Parce que c'est important pour nous, mais c'est aussi important pour les petites filles et les petits garçons qui viennent au stade. C'est aussi un truc qui est très important pour nous. On veut jouer en finale parce que c'est aussi important pour nous de montrer qu'à Paris, on peut jouer au plus haut niveau. Et on veut que tout le monde ait envie d'aller au stade.

Jackie Groenen face à Pia Clemens dans une salle du Campus PSG de Poissy, le 25 avril 2024
Jackie Groenen face à Pia Clemens dans une salle du Campus PSG de Poissy, le 25 avril 2024 © Radio France - Fabrizio Habibou

Sur son rayonnement sur l'équipe, dont elle est, paraît-il, le "soleil"

Je n'en suis pas sûre... [Sourire] Mais je me sens vraiment bien ici. Les filles ont été incroyables quand je suis arrivée. je ne parlais pas beaucoup le français. Elles m'ont aidée pour tout. Je ne me sens jamais seule ici. Oui, je me sens bien ici. Et quand tu te sens bien, tu as envie d'aller t'entraîner. C'est un truc magique, de vivre de sa passion. Il y a beaucoup de matchs, beaucoup de pression, mais c'est aussi quelque chose que tu ne peux pas oublier. Moi, je n'étais pas sûre de pouvoir faire carrière dans le foot. Ce n'était pas comme ça, il y a quinze ans. Ce n'était pas une option. Donc je pense que c'est quelque chose que tu dois toujours avoir en tête. Après le match contre Lyon, j'étais énervée, bien sûr. Mais en même temps, j'ai pensé que c'était incroyable d'avoir pu jouer un match comme ça. C'est simple d'être heureuse, quand tu vis une vie comme ça. Ce n'est pas difficile !

Sur Jocelyn Prêcheur qui nous avait confié en janvier que "Jackie fait partie de ces personnes qui auraient une chance de régler le conflit au Moyen-Orient, si vous l'y envoyiez"

Bon, je pense qu'en Israël, c'est un petit peu plus compliqué qu'ici... [Sourire] En vrai, je pense que beaucoup de problèmes qu'on a ne sont pas vraiment des problèmes. C'est aussi simple que ça. Oui, bien sûr, il y a de petits problèmes qui arrivent, comme pour tous ceux qui vont au travail. Mais en fait avec nous, c'est simple. On joue au foot, on pratique notre passion et finalement, on est une petite famille. Une équipe ! Quand quelque chose s'est passé, c'est simple de parler un petit peu. Après, c'est fini. Et au final, c'est aux filles de décider comment elles veulent travailler. Travailler avec une équipe de trente femmes, ce n'est pas toujours facile. Mais quand tu regardes l'opportunité qu'on a... En fait, ce n'est pas non plus difficile ! Je pense qu'on a beaucoup de raisons d'être heureuses. La progression du club, on est ici... [elle regarde le terrain par la fenêtre], la salle de gym... On a tout ce dont on a besoin. Donc on doit aider le collectif, et après tout est simple.

Sur son expérience du judo au très haut niveau

J'ai été championne des Pays-Bas, je pense... huit ou neuf fois ? Je m'entraînais beaucoup avec mon coach, avec l'objectif de disputer... les Jeux de Rio, je crois ? J'ai f ait beaucoup de tournois à l'étranger. Mais au même moment, j'ai signé mon premier contrat de foot en Allemagne. On avait deux heures de route en voiture tous les jours pour aller à l'entraînement, avec aussi l'entraînement de judo le matin... Ce n'était pas facile. Et puis quand je me suis blessée au judo, mon club de foot a dit : "Ok, maintenant tu dois choisir parce que... on te paie, et tu ne peux pas te blesser avec un autre sport !". Mais en fait, j'ai toujours su que je ferais du foot. Parce que c'était sur ma famille. Mon père était joueur, mon grand-père était un grand joueur aussi, aux Pays-Bas. Ca, c'est ma vie. Et avec le judo, je n'ai pas vraiment compris ce qui s'est passé. J'avais entraînement une fois par semaine, et au bout de deux ou trois mois, c'était déjà passé à quatre entraînements par semaine !

Mais finalement, le judo m'a vraiment aidée avec le foot. Quand je suis aux Pays-Bas et que je fais des interventions dans des écoles, c'est quelque chose que je dis aux jeunes filles. Moi je trouve ça bien de pratiquer deux sports, quand tu es jeune. Le foot et le judo sont deux sports qui sont vraiment complémentaires. Mais peu importe quels sports. Quand tu pratiques deux sports, ton corps progresse de deux côtés. Moi, je ne suis pas très forte. Je n'ai pas les muscles de Tabi [Chawinga] ! Mais avec le judo, j'ai développé mon corps d'un autre "côté" qu'avec seulement le foot. Ça m'aide maintenant. Par exemple dans le timing. je ne dis pas que je ne fais jamais de fautes mais normalement, grâce au judo, je sais exactement quand je dois pousser quelqu'un pour lui faire perdre son équilibre. Parce qu'au judo, tu utilises le mouvement et la vitesse de l'autre pour faire un truc. C'est quelque chose qui n'est pas très développé dans le foot. Physiquement, au foot, tu n'es pas tout le temps proche de ton adversaire, comme au judo. Mais c'est quelque chose de très, très important. Quand tu courir vers moi, je peux transmettre ta vitesse pour l'utiliser à mon avantage. Le timing de pousser, le timing d'une petite glissade... J'ai progressé là-dessus grâce au judo, et j'utilise ça tout le temps sur le terrain. Moi je peux rire... Oh non pas rire... Je peux lire un petit peu plus facilement que d'autres ce que tu vas faire avec le ballon. Je peux regarder ton corps, et je sais si tu vas tourner à droite ou à gauche. Ce n'est pas toujours vrai, mais ça aide. D'ailleurs aux Pays-Bas, les jeunes de l'Ajax font du judo deux fois par semaine. Et Boudewijn Zenden, qui était un grand joueur néerlandais, a aussi pratiqué les deux.

Sur le numéro 14 qu'elle porte sur son maillot

C'est le numéro de Johan Cruyff. J'essaie toujours de jouer avec ce numéro, parce que je suis une grande fan. C'est lui qui m'a donné envie de jouer au foot. Mon grand-père aimait Johan Cruyff. Ça, c'est la première étape. Après, j'étais toujours en voiture avec mon père pour aller aux entraînements. Et sur le siège, il y avait une petite télé. Et on regardait toujours des vidéos de Cruyff ou de [Dennis] Bergkamp, avec leurs buts. Donc j'aime bien ces deux joueurs, mais Cruyff... c'est mon héros.

Sur son duo au milieu de terrain avec Grâce Geyoro

J'ai changé un petit peu mon style de jeu, parce qu'à Manchester United, je jouais un petit peu plus haut, comme un 8. Maintenant, je joue vraiment comme un 6. Avant la blessure d'Oriane [Jean-François], elle jouait numéro 6 et j'avais plus d'espace. Grâce jouait vraiment numéro 10. Mais quand Oriane s'est blessée, j'ai un peu changé de jeu. Maintenant, Grâce a un peu plus d'espace pour prendre la profondeur, elle entre plus facilement dans la surface et elle marque plus de buts. Et moi, j'aime bien. J'aime jouer avec elle. C'est simple. Je la connais vraiment bien, et elle me connaît bien aussi. Et avec nous deux, ça marche. Tu sais, quand tu es sur le terrain, tu sens s'il y a un bon équilibre. Et je pense que toutes les deux, on sait ça.

Sur LA joueuse parisienne dont elle a envie de nous dire un mot en conclusion

Ce n'est pas simple, les autres vont me tuer ! [Rires] Bon. Si je ne peux parler que d'une joueuse, je veux parler d'Elisa [De Almeida]. Parce que quand je suis arrivée, elle était toujours là pour moi. Elle m'a donné beaucoup de confiance. Elle m'a aidée avec tout. Il n'y a pas beaucoup de personnes qui parlent d'elle. On parle toujours en premier de Grâce et de Saki, ce que je comprends. Mais pour moi, elle est une des filles de cette équipe qui changent le jeu. En tant que numéro 6, je me sens toujours en sécurité quand elle est derrière moi. Et hors du terrain, elle est toujours gentille. Elle essaie d'aider tout le monde, et c'est une personne incroyable pour moi. Elle aide les jeunes, elle aide les vieilles comme moi... [Rires] Oui, elle est top. Toutes les équipes du monde auraient besoin d'une joueuse comme Elisa, sur le terrain et dans le vestiaire.

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