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"Livré en 30 minutes maximum", la difficile lutte contre le "Uber shit" à Marseille

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Alors que le phénomène de livraison de drogue à domicile gagne du terrain, le ministre de l'Intérieur, en déplacement à Marseille ce mercredi, annonce le renfort de la police d'internet et la mise en place de contrôles systématiques de livreurs.

Le terme "Uber shit" fait référence à la plateforme Uber Eats qui livre de la nourriture à domicile Le terme "Uber shit" fait référence à la plateforme Uber Eats qui livre de la nourriture à domicile
Le terme "Uber shit" fait référence à la plateforme Uber Eats qui livre de la nourriture à domicile © Maxppp - Olivier Lanrivain

Le ministre de l'Intérieur veut taper plus fort sur les livraisons de drogue à domicile à Marseille, appelées plus fréquemment les "Uber shit", en référence à l'application qui livre des repas à la maison. Pour combattre cette pratique, Gérald Darmanin, en déplacement ce mercredi à Marseille, annonce le renfort de la police d'internet mais aussi un contrôle systématique des livraisons des repas à domicile, car sur le terrain ces livraisons sont très difficiles à intercepter.

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Photos de la drogue, promos et carte de voeux

La pratique de la livraison de drogue à domicile a explosé pendant le confinement et elle gagne de plus en plus de terrain à Marseille. Les consommateurs passent par des messageries cryptées comme WhatsApp, Snapchat ou encore Telegram pour trouver des vendeurs. En effet, en un clic, il est possible d'accéder à de nombreux groupes qui proposent des livraisons à domicile, 24h/24 et 7j/7.

Les vendeurs utilisent, pour attirer le client, des codes bien connus de la vente en ligne : des photos des produits, un service après vente avec avis des clients et même des promotions.

Ainsi, sur le groupe du clan Yoda, en guerre contre la DZ Mafia dans la cité de la Paternelle, on découvre des promotions "de fin d'année" comme : "Tu passes une commande et je te rajoute 10 g de ta commande gratuit".

Dans un autre groupe nommé "Bassens coffee drive", une carte de vœux a été postée par les vendeurs sur le canal de discussion : "On change d'année on change de rêve [...] on change d'idées : mais on ne change pas de fournisseur, je vous garde pour 2024 !"

Derrière ces comptes se cachent des profils des vendeurs souvent doubles. "Il y a des vrais livreurs qui vont utiliser leur statut pour arrondir leurs fins de mois de manière illégale, explique Gaëtan Poitevin, avocat en droit pénal à Marseille. Et il y a des réseaux qui emploient des livreurs et utilisent ces applications pour vendre leurs produits."

"De la drogue cachée dans le déodorant"

Cette livraison à domicile, Brice (le prénom a été modifié), Marseillais de 30 ans, avoue y avoir souvent recours. "Je contacte le livreur sur WhatsApp ou Telegram, je lui donne mon adresse et je suis livré en 30 minutes maximum", raconte ce consommateur installé dans le 1er arrondissement de Marseille.

Une fois le livreur en bas de son domicile, Brice n'a plus qu'à descendre et le payer "en cash", comme une simple livraison de pizza, mais avec une commande très bien cachée. "Le livreur n'avait sur lui qu'une trousse de toilette avec un déodorant et un dentifrice vidés et remplis de drogue, s'étonne le consommateur. En fait, c'était juste quelqu'un qui se déplaçait avec une trousse de toilette et des affaires de rechange."

Brice, comme de nombreux consommateurs, redoute peu les sanctions encourues pour une telle livraison. Le consommateur qui se fournit via des applications numériques peut être poursuivi pour usage de stupéfiants et risque une peine maximale d’un an d’emprisonnement ainsi qu’une amende de 3.750 euros. Mais en pratique, ils sont peu nombreux à être si lourdement sanctionnés.

"Aujourd'hui, on a une dépénalisation de la consommation du stupéfiant, regrette maître Gaëtan Poitevin. On est passé à des amendes forfaitaires de 200 euros pour des petites quantité de drogues, réduite à 150 euros si elle est payée dans les 45 jours. On a une énorme distorsion, voire un paradoxe, entre le risque pénal du consommateur, amoindri d'année en année et de réforme en réforme, et une surpénalisation du vendeur pourchassé par la loi." Il estime qu'"aggraver" les peines pour les consommateurs permettraient d'amoindrir cette pratique de livraison à domicile.

Des contrôles renforcés des livreurs

Pour lutter contre ce phénomène grandissant, le ministre de l'Intérieur a promis ce mercredi à Marseille de renforcer à nouveau la police d'internet "pour surveiller d'avantage les réseaux sociaux". En effet, ces cyber-patrouilleurs peuvent se faire passer pour des consommateurs et interpeller les vendeurs en flagrant délit. "On a trop peu de cyber-patrouilleurs en ce moment", regrette l'avocat Gaëtan Poitevin.

Par ailleurs, Gérald Darmanin assure vouloir mettre en place à Marseille une expérimentation déjà testée notamment en banlieue parisienne "qui a très bien marché" : faire des contrôles systématiques de ceux qui livrent.

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