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"J'ai gardé des séquelles" : huit mois après sa suspension, le désarroi d'une soignante du CHU de Poitiers

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Fin septembre 2021, cette aide-soignante poitevine était suspendue de son poste au CHU de Poitiers pour son refus de se faire vacciner contre le Covid-19. Huit mois plus tard, elle n'a toujours pas démissionné et hésite à changer de voie.

Des soignants manifestent contre la suspension des personnels non vaccinés, à Nantes, le 1er mai. Des soignants manifestent contre la suspension des personnels non vaccinés, à Nantes, le 1er mai.
Des soignants manifestent contre la suspension des personnels non vaccinés, à Nantes, le 1er mai. © Radio France - Yves-René Tapon

Huit mois se sont écoulés depuis sa suspension, et pourtant cette aide-soignante que nous appellerons Marion préfère toujours rester anonyme. Elle craint encore des représailles du CHU de Poitiers, qui l'a suspendue fin septembre 2021 pour son refus de la vaccination contre le Covid-19. Comme elles, 17 soignants sont toujours suspendus actuellement sur 11 000 agents, selon l'hôpital. Un chiffre qui ne prend pas en compte les démissions et les réintégrations qui ont eu lieu depuis. "Je me souviens que j'étais complètement renversée", témoigne Marion. "C'était trop violent."

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À partir de ce moment-là, l'aide-soignante ne travaille plus et tombe alors dans une forme de dépression. "Je ne voulais même plus sortir de la maison", explique-t-elle. "Je faisais ce métier depuis tellement d'années... C'est comme si on avait arraché une partie de moi. On m'a aussi enlevé mon train de vie. Le mot chômage, pour nous, il ne veut rien dire. On n'a pas droit à la banque alimentaire ou au RSA. On reçoit juste des fiches de paie que le CHU nous envoie, avec écrit 'zéro salaire'. C'est tout ce qu'on a."

Trouver un "plan B"

Face à cette situation, Marion décide de prendre du recul et de mettre tout ce temps libre à profit. "Ça m'a permis de me replonger dans mes cahiers, de faire des formations à distance. Je m'instruis sur le fonctionnement d'internet, d'Excel, etc", détaille-t-elle. "Je me suis aussi remis à lire, chose que je ne faisais plus du tout avant. Et puis au moins, je peux emmener mes enfants à l'école et m'occuper de mon mari."

Certaines de ses collègues, également suspendues, ont démissionné. D'autres, toujours en poste, l'aident à faire ses courses. Marion garde contact mais se détourne progressivement de l'hôpital. "Cette suspension m'a laissé des séquelles. Huit mois de violences, d'insultes, de mépris... Je pourrai peut-être repartir avec des patients, mais pas forcément au CHU de Poitiers. Je suis encore indécise. Je pense aussi à démissionner pour chercher un plan B", détaille l'aide-soignante. L'ancienne salariée précise quand même qu'elle ne regrette rien car selon elle, cette suspension reste le résultat d'une injustice.

Un été à venir "extrêmement compliqué"

Les espoirs de réintégration pour ces soignants suspendus restent pour l'instant minces, mais selon les informations du Parisien, la Haute autorité de santé devrait être prochainement saisie sur la question. Le syndicat CNI (coordination nationale interprofessionnelle), majoritaire au CHU de Poitiers, se prononce aussi pour une réintégration des personnels. Car plus que jamais, l'hôpital a besoin de bras. "Ces suspensions ont ajouté de la difficulté à  la difficulté déjà existante", explique Florent Lieveaux, vice-président de la CNI au CHU. 

"Ça n'a pas non plus été un tsunami de suspensions", continue-t-il. "Il y a eu quelques personnels des blocs, de gériatrie... Tous les secteurs ont été touchés. Donc les soignants encore en poste souffrent énormément. On sait qu'il va y avoir des fermetures de lits supplémentaires cet été, ça va être extrêmement compliqué." Le syndicaliste estime que réintégrer les soignantes suspendues "permettrait une petite bouffée d'oxygène, même si c'est minime par rapport à l'ampleur des difficultés en termes d'effectifs".

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