Passer au contenu
Publicité

Fête de la science : pourquoi les femmes pratiquent-elles moins de sport que le reste de la population ?

Par

La fête de la science a pour thème cette année 2023, le sport. En partenariat avec la Casemate, France Bleu Isère donne la parole aux chercheurs et chercheuses grenobloises. Aïna Chalabaev est de ceux-là. Elle répond aux questions de Candice Vernay.

Pourquoi les femmes pratiquent moins de sport que le reste de la population ? Pourquoi les femmes pratiquent moins de sport que le reste de la population ?
Pourquoi les femmes pratiquent moins de sport que le reste de la population ? © Getty - Jordan Siemens

Vous êtes professeure en psychologie de l’activité physique et Directrice du laboratoire SENS - Sport et Environnement Social - de l’Université Grenoble Alpes. En quoi consistent vos recherches ?

Publicité

Aïna Chalabaev - Mes recherches portent sur ce qui nous motive ou pas à pratiquer une activité physique régulière, en compétition ou dans la vie quotidienne. Je pars d’un constat paradoxal : d’un côté, on connaît bien les effets néfastes sur la santé de la sédentarité (celle-ci tue plus de personnes dans le monde que le tabac), et on connaît bien aussi les effets bénéfiques de l’activité physique (30’ de marche quotidienne diminuent le risque de mortalité de 30%). Mais d’un autre côté, 95% de la population adulte et plus de la moitié des jeunes est trop sédentaire.

C’est pour répondre à ce constat alarmant que dans mon laboratoire, nous cherchons à identifier les freins et leviers à l’activité physique, et à développer des programmes visant à favoriser une activité physique et sportive bénéfique pour la santé et le bien-être.

Ciblez-vous une population en particulier ?

Oui, je m’intéresse aux femmes, aux personnes âgées, à celles en surpoids. Je cherche à comprendre pourquoi ces populations sont encore plus inactives que d’autres. Il se trouve qu’elles sont toutes ciblées par des stéréotypes négatifs, c’est-à-dire des croyances partagées dans la société selon lesquelles elles seraient peu compétentes et peu motivées par le sport. J’étudie en somme comment le contexte social dans lequel ces personnes évoluent façonne leurs motivations et leur activité physique.

Pouvez-vous nous en dire plus à propos des stéréotypes liés aux femmes sportives ?

Il s’agit de stéréotypes de genre. Les études de psychologie sociale vont chercher à comprendre pourquoi ceux-ci restent encore aujourd’hui profondément ancrés dans nos esprits, malgré une certaine féminisation récente du sport. Nous avons tous tendance à associer le sport aux hommes de façon automatique et extrêmement rapide, souvent sans nous en rendre compte. Ces biais agissent ensuite comme des filtres qui vont colorer nos perceptions et nos interactions avec autrui, en conduisant par exemple les parents à davantage encourager et valoriser à leur insu la pratique sportive des garçons que celle des filles.

Les études de psychologie sociale ont mis à jour d’autres formes d’influence des stéréotypes tout aussi insidieuses, qui peuvent conduire les filles à choisir d’elles-mêmes de ne pas investir la pratique sportive. Ainsi, si dès leur plus jeune âge, les filles sont confrontées au discours selon lequel le sport est plutôt un domaine masculin, cela peut les amener à se sentir peu compétentes dans ce domaine, même sans avoir pratiqué de sport.

Or, la perception que nous avons de notre propre compétence est un levier essentiel à l’engagement à long terme dans une activité. Par ailleurs, même les filles qui se sentent compétentes en sport peuvent être affectées, à travers des mécanismes comme la « menace du stéréotype ». Si nous craignons d’être jugée dans une activité sur la base de stéréotypes, cela peut nous mettre une certaine pression... qui vient perturber la performance à court terme, et nous conduire à nous désinvestir de l’activité en question sur le long terme.

Comment réagir face à cela ?

La mise à jour de la mécanique insidieuse des stéréotypes est importante car tant qu’ils agissent inconsciemment, cela empêche leur remise en question. Il est considéré comme « normal » que les femmes concourent par exemple sur l’heptathlon tandis que les hommes concourent sur le décathlon ou encore nous parlons toujours de « football féminin » pour les femmes, et de football ‘tout court’ pour les hommes.

Depuis quelques années, des chercheuses américaines proposent d’ailleurs des formations basées sur des connaissances scientifiques, notamment en entreprise, qui montrent qu’en amenant les individus à prendre conscience de leurs biais implicites, il est possible d’en limiter l’influence. Comme quoi, tout n’est pas perdu.

loading

Ma France : Améliorer le logement des Français

Quelles sont vos solutions pour aider les Français à bien se loger ? En partenariat avec Make.org, France Bleu mène une consultation citoyenne à laquelle vous pouvez participer ci-dessous.

Publicité

undefined