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Le maire de Puissalicon a-t-il bénéficié d'un passe-droit pour son terrain ?

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Des voix s’élèvent à Puissalicon pour dénoncer un passe-droit dont aurait profité le maire. Son terrain agricole de 16.000 m² est devenu constructible. Son permis de construire lui a été accordé alors que les mêmes demandes ont été refusées à d'autres. La transaction pourrait rapporter gros à l'élu.

La parcelle appartenant au maire de Puissalicon La parcelle appartenant au maire de Puissalicon
La parcelle appartenant au maire de Puissalicon © Radio France - Stéfane Pocher

Michel Farenc, le maire de Puissalicon (nord de Béziers) aurait-il abusé de ses fonctions avant les élections municipales de mars 2020 ? Un de ses terrains agricoles de 16.000 mètres carrés est devenu constructible (début de l'année 2019) avant la fin de son premier mandat. Dans la foulée, l'élu obtient l'autorisation pour y construire sa maison.

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Ces autorisations signées de son premier adjoint et validées par le président de la communauté de communes des Avants-Monts suscitent bien des interrogations dans ce village de 1.400 habitants. Une opération financière non-négligeable pour l’intéressé lui permettant ainsi de générer au mieux, une plus-value pouvant atteindre les deux millions d'euros sur un terrain de cette ampleur. 

"Je veux déménager et m'installer à côté de mes deux enfants. Je n'ai aucun projet de lotissement. C'est uniquement pour y construire ma maison précise l'élu."

Cette transaction aurait pu passer inaperçu si les permis n'étaient pas donnés au compte goûte à cause d'une clause de restriction sur l'eau (qualitative et quantitative).

"Cette faveur exceptionnelle" est dénoncée par plusieurs habitants. L'un d'entre eux qui se dit être leur porte-parole, a écrit (voir ci-dessous) à deux reprises au Préfet de l'Hérault à l'automne dernier. Les riverains s'interrogent sur la légalité d'obtention de cette délivrance alors que d'autres dossiers de ce type ont été refusés. 

Le terrain du maire apparaît en vert ci-dessous. Son projet de construction se trouve sur la partie hachurée à l'extrémité de son terrain.

Le terrain du maire apparaît en vert. Il dit vouloir construire sur la partie hachurée
Le terrain du maire apparaît en vert. Il dit vouloir construire sur la partie hachurée - Mairie Puissalicon

Raréfaction de délivrance des permis de construire

La délivrance des permis de construire se raréfie dans la commune en raison d'une insuffisance de ressources en eau. Christian Houles, ancien élu à la mairie de Puissalicon est le premier publiquement à dénoncer ce qu'il n'hésite pas à appeler un passe-droit.

Cet ancien élu à l'urbanisme s'est retiré il y a 12 ans de vie politique après deux mandats. Récemment, il a distribué un courrier dans toutes les boites aux lettres de sa commune pour alerter la population après avoir été insulté publiquement  dit-il "de collabo" par le maire Michel Farenc".

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L'élu ne s'est jamais caché de l'obtention de cette autorisation malgré cette clause restrictive. Son terrain se trouve en bordure d'une parcelle constructible à proximité d'une ligne haute tension. Michel Farenc en aurait d'ailleurs fait écho au cours d'une réunion de quartier. Pourtant, tous les projets de construction hors lotissement sont refusés depuis des années. 

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Rares sont les propriétaires de terrain agricole à jouir d'une telle autorisation en raison de ce déficit d'eau potable. Il n'y en aura guère plus dans les années futures précise le maire :

''Le Plan local d'Urbanisme est en cours d'élaboration. On nous accorde peu d’extension. À peine trois hectares. Et nous mettrons en priorité les terrains communaux que nous avons dans un coin du village. Ce sera la seule extension possible sachant qu'il y a des sites qui sont potentiellement constructibles.''

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Sur le fond, le permis de construire est légal précise la préfecture de l'Hérault au regard des éléments fournis par la Communauté de communes des Avants-Monts. 

''Sur la commune de Puissalicon il n' y a pas de notion de zone agricole, puisque la commune est au RNU (règlement national d'urbanisme en l'absence de PLU)."

"Les dossiers sont donc instruits par le service instructeur (interco des Avants Monts), qui assure les différentes consultations. Les services de l'État ont été consultés au titre de l'avis conforme ; il a été répondu favorablement en date du 19 avril 2019, uniquement sur le caractère en ou hors partie actuellement urbanisée. Cet avis conforme n'emporte pas d'autres considérations (risques, réseaux, salubrité publique...) que le service instructeur doit intégrer. Il est à noter que d'autres dossiers sur cette commune ont fait l'objet de consultations au titre de l'avis conforme et ont été considérés comme dans la PAU (Partie Actuellement Urbanisée)."

Sur la forme, c'est contestable. La Communauté de Communes, présidée par Francis Boutes, n'est pas censée ignorer l'identité et les fonctions du propriétaire du terrain, mais surtout le déficit récurent en eau dans cette commune. Depuis des années, et bien avant l'élection de Michel Farenc, l'Agence Régionale de Santé recommande aux élus de la commune de cesser d'accorder des permis de construire. Mais en vain. Au printemps 2020, le couperet est tombé. La préfecture refuse désormais tous les permis. 

Quelle est l'implication et la responsabilité de la Communauté de communes dans l'attribution de ce permis ? Comment la Direction Départementale des Territoires et de la Mer de l'Hérault a-t-elle pu valider la demande du maire ? Les riverains s'interrogent.

Le terrain agricole de Michel Farenc, serait le seul, d’après ses détracteurs, à avoir profité d'une telle délivrance ces dernières années. D'autres, comme Jean-Marie, ont reçu un refus catégorique. Cet agriculteur dépose en septembre 2019, une demande de certificat d'urbanisme, pour construire une maison et un garage sur un terrain agricole situé dans le prolongement d'un lotissement. Troublant. Le président de la communauté de communes des Avants-Monts, s'appuie cette fois sur l'avis de l'ARS.  

La D.D.T.M, tombe des nues en apprenant que le maire a obtenu son permis 

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Courrier envoyé par Francis Boutes, le président de la communauté de commune les Avant-Monts
Courrier envoyé par Francis Boutes, le président de la communauté de commune les Avant-Monts © Radio France - Stéfane Pocher

Michel Farenc assure ne pas vouloir s'enrichir. Alors conflit d'intérêt ou pas ? Un maire a-t-il le droit de changer la nature d'un terrain ou d'un bien à son avantage ? L'affaire est troublante, mais Michel Farenc n'a pas participé au vote de la commission de la CDC et le permis de construire a été validé par la DDTM. Mais pourquoi, les autres n'ont-ils pas profiter de ce même traitement de faveur ? 

À ce jour, tous les permis de construire hors et dans lotissement sont refusés

Le refus de permis de Jean-marie n'est pas unique à Puissalicon. Les langues se délient depuis quelques jours dans le village. Jacqueline est dans tous ses états. Elle devait vendre la maison familiale de 370m2 à un niçois. ''La vente vient de capoter. Nous devions passer chez le notaire le mois prochain''. Cet investisseur devait y réaliser cinq logements. L'installation des compteurs d'eau est rejetée par la D.D.T.M pour les mêmes raisons. La bâtisse est en vente depuis plus de trois ans

Je suis dépitée. Je viens d'apprendre qu'il n'y aurait aucune autorisation d'ici 3 ou 4 ans

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Un projet de construction de logements pour personnes âgées à côté du château d'eau, a aussi été refusé en début d'année pour les mêmes raisons. Clément et son épouse devaient aussi commencer la construction de leur maison dans un jeune lotissement construit en 2013.

Le maçon devait attaquer en septembre les travaux sur ce terrain pourtant constructible de 100.000 euros. Le permis de construire lui avait été validé par la mairie. Mais ce jeune 23 ans a reçu une lettre recommandée émanant de la préfecture l'informant que son permis était illégal à cause de l'eau. Suite à cette annulation, la mairie précise entamer un recours gracieux.

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Un forage sous-dimensionné

L'unique forage de la commune, celui du Canet, est en mesure de fournir 600 m3 d'eau par jour. Au plus fort de l'année (période estivale) 500 m3. Un seuil limite à ne pas dépasser. C'est pour cette raison que l'ARS a demandé à l'élu de cesser de valider des permis de construire. Michel Farenc, est passé outre en accordant cinq à une dizaine de permis de construire (mur, garage...)  par an depuis son élection. 

''J'assume pleinement cette décision nous confie l'élu. Il y a une marge de sécurité. C'est pour cette raison que nous avons accordé ces dérogations. Nous ne faisons pas n'importe quoi, je vous rassure. Le déficit récurant en eau potable à Puissalicon est connu depuis des années. Les recherches de nouvelles sources n'ont pas abouties. Des projets sont en cour''

Lors de nos échanges, le maire Michel Farenc explique que ces accusations sont des propos calomnieux colportés dans le village par cet ancien élu (Christian Houles), frustré de ne pas avoir été retenu sur sa liste aux dernières élections municipales. Il s’avère qu'une association Biterroise (qui ne souhaite pas être mise en avant pour l'instant), a elle aussi alerté le préfet de l'Hérault pour dénoncer les faits après avoir été saisie par une vingtaine d'habitants de Puissalicon.

L'élu a-t-il profité d'un passe-droit à d'autres occasions ? 

Dans le village, les habitants s'interrogent aussi sur le recrutement de son fils en 2017 à la mairie comme secrétaire. Ce poste était occupé précédemment par sa belle-sœur, partie à la retraite. Cette dernière avait le statue "d'attachée". 

Le fiston, employé à l'époque à Saint-Chinian, ne pouvait pas prétendre à ce poste, car simple rédacteur de la fonction publique. Le Conseil municipal de Puissalicon a alors voté, la rétrogradation du poste. 

À l'issue d'un appel à candidature, le fils a été recruté parmi la vingtaine de postulants. Très récemment, ce dernier est passé cadre de la fonction publique, se retrouvant ainsi "Attaché" comme l'était sa tante avant son départ à la retraite, lui permettant évidemment de profiter d'un indice salarial bien plus avantageux.

L'accès au grade d'attaché par voie de promotion interne est réservé aux :

1° Fonctionnaires territoriaux qui ont plus de cinq années de services effectifs accomplis en qualité de fonctionnaire territorial de catégorie B en position d'activité ou de détachement ;

2° Fonctionnaires territoriaux de catégorie B qui ont exercé les fonctions de directeur général des services des communes de 2 000 à 5 000 habitants pendant au moins deux ans.

3° Fonctionnaires territoriaux de catégorie A appartenant aux cadres d'emplois des secrétaires de mairie ou des directeurs de police municipale, et justifiant de quatre ans de services effectifs dans leur cadre d'emplois.

Courrier envoyé au Préfet de l'Hérault
Courrier envoyé au Préfet de l'Hérault - Christian Houles
Courrier envoyé au Préfet de l'Hérault
Courrier envoyé au Préfet de l'Hérault - Christian Houles

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