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Emploi des seniors : "il faut lutter contre cette ringardisation" estime Nathalie Louit, consultante RH

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Nathalie Louit, consultante et formatrice en Relations Humaines, spécialiste de l'emploi des seniors basée au Havre, était l'invitée de France Bleu Normandie ce lundi matin.

Nathalie Louit, consultante et formatrice en Relations Humaines, spécialiste de l'emploi des seniors.
Nathalie Louit, consultante et formatrice en Relations Humaines, spécialiste de l'emploi des seniors. - Nathalie Louit

Le patronat et les syndicats sont en négociations ce lundi, une réunion concernant l'emploi des seniors. Les partenaires sociaux vont tenter de se mettre d'accord sur un texte qui doit augmenter le taux d'emploi des plus de 50 ans, avant une nouvelle réforme de l'assurance chômage annoncée par le gouvernement. Pour en parler, Nathalie Louit, consultante et formatrice en Relations Humaines, spécialiste de l'emploi des seniors, basée au Havre était l'invitée de France Bleu Normandie ce lundi matin.

En 2022, en France, seuls 57% des personnes de 55 à 64 ans avaient un emploi, le taux moyen d’emploi des seniors de l’Union européenne était de 62% en 2022. Le taux français est donc inférieur à la moyenne européenne. Les entreprises françaises ont-elles un problème avec les travailleurs de plus de 50 ans ?

C'est vrai que votre question est assez symptomatique de la manière dont on traite la problématique des seniors en France. Elle sous entend en fait que le senior doit se vendre deux fois plus auprès d'une entreprise par rapport à un profil moins expérimenté. On considère aujourd'hui que le senior devrait brader ses compétences, sa rémunération. En fait, ce qui se passe en France, c'est qu'on a toujours présenté le senior comme une contrainte pour l'entreprise. Aujourd'hui, je pense qu'il faut vraiment que les entreprises prennent conscience des apports et des atouts des seniors. On devrait se poser la question de savoir si on a vraiment envie d'une société qui écarte les plus de 50 ans du monde du travail. On est sur un vrai sujet de responsabilité collective qui touche l'équilibre d'une famille, d'un couple de plusieurs générations, qui touche aussi la société et l'équilibre des caisses de la société. Ce sont des personnes qui doivent aussi continuer à payer les études de leurs enfants et assumer le grand âge de leurs parents.

Pourquoi les entreprises ne misent-elles pas sur cette expérience ?

Parce qu'il y a beaucoup de frilosité. Aujourd'hui l'âge est devenu un véritable marqueur en termes de discrimination. On est dans une société qui est vraiment dans des stéréotypes âgistes. Alors que les seniors ont des atouts énormes, on est vraiment sur des profils aguerris, des personnes qui ont cette capacité à embarquer sur des projets, des personnes qui sont capables de porter une vision, des personnes qui sont loyaux, qui font preuve de sagesse. Il y a une interview qui est parue, Review People, qui disait que les séniors dans les entreprises étaient plutôt bien acceptés, en fait considérés, mais que la moitié des entreprises n'étaient pas prêtes à les recevoir. Donc il y a un vrai problème.

La population française vieillit, les seniors vont être de plus en plus nombreux sur le marché du travail ?

Complètement. Deux chiffres très parlants : en 2025, la population active va atteindre son pic de vieillissement avec une part des 50 / 64 ans qui va s'élever à 35 %. Et si on ramène ça à l'échelle européenne, en 2035, 50 % de la population en Europe aura plus de 45 ans. Donc, comment on va arriver à résoudre cette équation.

Comment justement, comment faciliter l'emploi des seniors ?

Alors il y a plusieurs leviers, des préconisations d'actions. Je pense que tout d'abord, il faudrait accompagner les chefs d'entreprise et les RH sur tous les enjeux du vieillissement actif, et de la cohabitation générationnelle. Et je pense particulièrement aux quinquas, aux profils expérimentés qui sont en dehors du marché de l'emploi, leur donner le droit à la reconversion. On a tous le droit à se reconvertir à l'âge de 50 ans. La reconversion, elle concerne tout le monde et à tout âge, que ce soit en termes de changement de poste, de secteur d'activité, de changement d'emploi. Moi, je préconiserais aussi un renforcement des actions de formation pour les 55 / 64 ans pour lutter sur ce qu'on appelle l'obsolescence des compétences.

Lutter contre cette image ringarde qu'ont parfois les seniors au travail ?

Exactement. Lutter contre cette ringardisation. On les taxe souvent de conservateurs, d'une population qui a moins énergie, on les taxe même de technophobes. Mais il faut balayer tous ces stéréotypes qui sont complètement faux. Aujourd'hui le quinqua, il se construit dans de nouveaux projets de vie et les horizons se sont élargis. Les parcours professionnels ne sont plus du tout linéaires. Et demain, ce que j'ai envie de faire passer comme message, c'est qu**'on aura besoin de ces profils aguerris, de ces profils experts,** de ces profils capés pour arriver à travailler dans ce monde du travail de plus en plus mouvant, avec l'accélération vertigineuse de l'intelligence artificielle qui va entraîner de profondes mutations, qui va impacter la productivité et qui va homogénéiser les compétences.

Est ce que vous êtes inquiète pour les seniors ? Le gouvernement envisage une nouvelle réforme de l'assurance chômage, avec peut-être une réduction d'indemnisation de plusieurs mois. Est ce que ce serait une catastrophe pour les séniors ?

Pour moi, ce serait une catastrophe et je pense que la nasse des déclassés va grossir de plus en plus. Il y a de plus en plus de personnes, de quinquas qui vont se retrouver en marge, qui vont être reléguées sur le banc de touche. Et j'ai très peur que des drames sociaux se nouent à travers cette nouvelle réforme.

Vous pouvez faire appel à Nathalie Louit via LinkedIn ou son mail : louitnathalie1@gmail.com

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