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Portrait : Jean-Pierre Jaussaud, inoubliable double vainqueur des 24 Heures du Mans

Respecté pour sa bonhomie et son coup de volant, Jean-Pierre Jaussaud est décédé dans la nuit de mercredi à jeudi à l'âge de 84 ans, a annoncé l'Automobile Club de l'Ouest. Né à Caen, le pilote automobile a notamment remporté deux fois les 24 Heures du Mans en 1978 et 1980.

Jean-Pierre Jaussaud en 1967 Jean-Pierre Jaussaud en 1967
Jean-Pierre Jaussaud en 1967 © AFP - Jean Claude Mallinjod

Une légende du sport automobile normand s'éteint. Jean-Pierre Jaussaud est décédé dans la nuit de mercredi à jeudi à l'âge de 84 ans, a annoncé l'Automobile Club de l'Ouest (ACO), organisateur de la célèbre course d'endurance automobile.

"Papy Jaussaud nous a quittés, mais les souvenirs resteront intacts. Son émotion lors du podium en 1978 a marqué une génération de passionnés. Sa victoire en 1980 avec son coéquipier et ami Jean Rondeau restera à jamais comme l'un des plus grands exploits du sport automobile", a souligné Pierre Fillon, président de l'ACO dans un communiqué.

Il était né à Caen en 1937. Fils d'épicier, l'adolescent normand allait admirer les bolides sur le circuit de la prairie dans les années 50. Quelques années plus tard, il tombe sur une annonce dans un magazine spécialisé : le pilote anglais Jim Russel propose des stages de pilotage. C'est avec sa 2CV qu'il ira de l'autre côté de la Manche pour s'y inscrire. Et une fois les premiers rudiments du pilotage absorbés, le jeune normand sera plus rapide que les instructeurs ! L'histoire est en marche. Elle sera longue, parfois douloureuse mais aussi merveilleuse. Notamment au Mans, dans la plus grande course d'endurance au monde.

L'A442B pilotée par Jean-Pierre Jaussaud lors de Le Mans Classic 2008, 30 ans après sa victoire au classement général des 24 Heures du Mans
L'A442B pilotée par Jean-Pierre Jaussaud lors de Le Mans Classic 2008, 30 ans après sa victoire au classement général des 24 Heures du Mans © Maxppp - GREGOIRE BRUN

Sacré deux fois aux 24 Heures du Mans

Jean-Pierre Jaussaud a participé 13 fois aux 24 Heures du Mans. Majoritairement avec des écuries françaises. D'abord Matra pour deux abandons précoces en 1966 et 1967. Parce qu'au Mans il faut souvent souffrir avant de gagner, Jean-Pierre Jaussaud attendra une décennie avant d'inscrire son nom au palmarès. À deux reprises et dans deux écuries radicalement différentes. La première avec l'armada Renault-Alpine. Les voitures jaunes et blanches avaient la réputation d’être rapides mais peu fiables sur la durée de l’épreuve. Le Caennais et Didier Pironi parviendront à briser la malédiction en 1978. Pendant que Jean-Pierre Jaussaud pleurait sur le podium, son coéquipier était groggy après avoir perdu 8kg pendant la course. À l’époque ils n’étaient que deux pilotes à se relayer pendant le double tour d’horloge, contre trois aujourd'hui !  Le second succès sera encore aussi mémorable : en 1980 avec Jean Rondeau, sur une Rondeau M379. Le nom du coéquipier et de la voiture est identique ? Normal, cette année-là Jean-Pierre Jaussaud est le partenaire d'un pilote-constructeur. C’est donc l’artisanat qui a dominé les écuries d'usines avec ce succès de Rondeau devant Porsche. Inimaginable de nos jours. Pour France Bleu, Jean-Pierre Jaussaud était longuement revenu sur ces deux victoires, avec de multiples anecdotes sur le sport automobile de l'époque.

JEAN PIERRE JAUSSAUD - Pilote de courses auto !

Si près de la Formule 1....

Le pilote normand n'a pas eu l'occasion de courir en Formule 1 comme tant d’autres français de sa génération (François Cevert, Jean-Pierre Jabouille, Jean-Pierre Beltoise, Gérard Larrousse ou encore Henri Pescarolo, lui aussi une légende de l'épreuve mancelle). 

Jean-Pierre Jaussaud a pourtant connu une belle carrière en monoplace, avec en point d’orgue une magnifique victoire au Grand Prix de Monaco de Formule 3 en 1968 (devant, entre autres, Ronnie Peterson, Peter Gethin et François Cevert, tous futurs vainqueurs de Grands Prix). Approché par Enzo Ferrari, il a repoussé les avances du patron de la Scuderia qui voulait l’intégrer dans les formules inférieures. Le Caennais rêvait alors de F1 mais l’opportunité ne s’est jamais concrétisée malgré les titres et victoires en F2 et F3. 

Comme tous les pilotes, Jean-Pierre Jaussaud jouait les trompes-la-mort chaque week-end de course. À l'époque, les pilotes n’étaient pas attachés dans leurs voitures, parce qu’ils risquaient de mourir écrasés si elles se retournaient. En 1969 le Normand a ainsi été éjecté à pleine vitesse à Monza lorsque sa monoplace est partie en tonneaux avant de s'enflammer. Comme son camarade Henri Pescarolo, miraculeusement réchappé quelques années plus tôt d’un accident dans la ligne droite des Hunaudières au Mans, Jean-Pierre Jaussaud était retourné en piste dans ce sport automobile alors endeuillé chaque année par les accidents mortels. 

Véritable touche-à-tout du volant, le Normand avait testé toutes les disciplines. Monoplaces, endurances, mais aussi rallyes sur routes et rallyes-raids (3e du Paris-Dakar en 1982). Il aimait raconter, l'œil pétillant et l’esprit toujours vif, ses “courses à l'ancienne" dans des voitures aussi rapides que dangereuses. L’exact inverse de sa 2CV qui l’a accompagnée jusqu’en Angleterre en 1962, là où tout a commencé.

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