PORTRAIT - JO Paris 2024 : Makan Traoré, le boxeur de Royan va "tout faire pour ne pas revenir bredouille"

Son sourire est aussi dévastateur que son punch. Et les nombreuses sollicitations médiatiques n'altèrent pas sa bonne humeur. Le programme est copieux avant les jeux, mais il fait avec. Sans rechigner. En profitant de chaque instant qui va le conduire jusqu'à son rêve olympique cet été. Makan Traoré, 23 ans, a décroché son billet pour les JO de Paris. Une immense fierté pour le Roc Boxe, le club royannais, dont il a poussé la porte à l'âge de 13 ans, après avoir pratiqué le judo pendant huit ans. Originaire de Dreux en Normandie, la famille Traoré a choisi de déménager en 2015 en Charente-Maritime. Pour offrir un meilleur cadre de vie aux trois enfants.

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"Il a voulu arrêter"

Son fidèle entraîneur royannais Mickaël Weus, ancien boxeur professionnel, a très vite décelé des qualités hors-normes chez Makan. "On a vite vu qu'il avait quelque chose. Dans la boxe, on voit rapidement lorsque quelqu'un est coordonné. ll avait cette facilité dans les gestes. On a décidé de bosser avec lui, des années de travail avec des périodes difficiles. A un moment, il a même voulu arrêter, mais on a su le remotiver, le faire travailler comme il fallait et on a réussi à l'amener jusqu'aux jeux olympiques, c'est assez incroyable, en fait". Un peu bagarreur à ses débuts, il a fallu le canaliser pour en faire le boxeur qu'il est devenu. Avec un cadeau tombé du ciel : le punch. "Ca je l'ai remarqué tout de suite, dès les premières leçons, on sent que ça frappe. Plus il s'est étoffé et plus ça envoie", sourit Mickaël Weus.

"C'est un exemple par son intelligence"

Ce don du ciel peut-il le mener jusqu'au podium olympique ? Son coach y croit dur comme fer. "Bien sûr, il a tout le potentiel ! Ca s'est vérifié lors des championnats du monde (à Tachkent en Ouzbékistan). Makan a éliminé le champion du monde en titre en 8e de finale, il est passé à côté en quart de finale, il s'est mis une grosse pression, c'était sa première grosse échéance". Trois fois champion de France junior, deux fois champion de France en Élite amateur et demi-finaliste aux Jeux européens à Cracovie, Makan Traoré s'est donné la droit de représenter la France dans la catégorie des moins de 71 kg aux Jeux olympiques.

Un exemple pour tous les licenciés du Roc Boxe. "On a un petit champion intelligent, sympa, il parle bien, il est instruit et notre grande fierté, c'est qu'il a été formé ici à Royan, et pas à l'INSEP. Certains là-bas attendent depuis 10 ans et lui, il arrive, il fait le ménage et décroche sa sélection du premier coup pour les jeux olympiques", se réjouit le président du club, Franck Weus. Makan Traoré est avant tout un exemple à suivre. "Il y a plein de bons boxeurs ici, il n'y a pas que Makan. Il est la preuve qu'il faut travailler. Il en a pleuré, on l'a fait souffrir. Mon fils et moi, on l'a emmené partout en France et en Europe". Le président royannais n'oublie pas tous les autres licenciés du club, aujourd'hui un peu à l'étroit. "J'aimerais bien avoir une salle à moi pour les entrainer toute la journée, mais on n'en a pas".

"Bien sûr, il va aller chercher sa médaille olympique"

Le fan club de Makan ne cesse de s'agrandir. Une idole pour le jeune et prometteur Shani. "Quand on arrive à la sale, tout le monde demande où est Makan. Tout le monde veut le voir. C'est un modèle pour le club. Il va faire les JO pour l'équipe de France, qui n'aimerait pas y aller ?". En attente de la nationalité française et promise à un bel avenir, Maloway, 20 ans, abonde. "Il est toujours là pour donner des conseils, il est très très gentil et sur le ring, c'est un autre homme. Bien sûr, il va aller chercher sa médaille olympique, on croit en lui". Makan Traoré est une vedette mais ne fait pas la vedette. Travail et humilité, c'est le secret de sa réussite et de celle du club. "Beaucoup de clubs se sont écroulé parce qu'il avait une vedette et que tout tournait autour de ce boxeur, mais quand il part, il n'y a plus de club", tempère le président Franck Weus.

De retour d'un stage en altitude dans la Sierra Nevada en Espagne, Makan Traoré a passé trois petits jours à Royan, avant de rejoindre l'INSEP dans le bois de Vincennes. Le rythme est soutenu, mais le sourire omniprésent lorsqu'il rentre "chez lui à Royan. "C'est une période assez intense avec les stages et les sollicitations. Je n'ai pas spécialement de problème avec la médiatisation, je le vis plutôt bien pour l'instant, tout le monde est sympa avec moi, donc c'est cool. Je me sens à la fois satisfait et privilégié du chemin parcouru". A six mois de l'échéance, les jeux deviennent une obsession. "Chaque jour, on y pense, c'est la plus grande compétition au monde, j'essaie de gérer ça au mieux pour que ça n'impacte trop ma préparation et ma vie en général".

Mayweather, Cissokho... et Tiger Woods

L'humilité n'empêche pas l'ambition. Makan Traoré vise une médaille olympique ce été. "Je vais tout faire pour la ramener. Je mets tout en œuvre pour ne pas revenir bredouille." Si Makan est devenu l'idole de tout un club, lui a les siennes. En boxe ? "Floyd Mayweather". L'Américain a remporté 18 championnats du monde dans cinq catégories de poids différentes. Et le Français Souleymane Cissokho "qui était à ma place aux Jeux de Rio et qui a obtenu une médaille de bronze, j'aime beaucoup ce qu'il est devenu en tant qu'athlète et de l'image qu'il donne de la boxe".

Son autre idole sportive ? Tiger Woods ! "C'est une icone de part son niveau sportif, c'est une personne hors-norme, donc respect pour tout ce qu'il a pu faire dans le golf". Dès qu'il le peut, le champion royannais délaisse les gants pour les clubs de golf, qu'il pratique dès qu'il le peut et la météo le permet. "Ca parait être deux sports opposés", rigole Makan Traoré, "mais ça me fait du bien. La boxe est un sport où tout va très vite, au golf, il faut être très posé, réfléchir à chaque chose qu'on fait, ça me fait du bien. C'est beaucoup de coordination et de synchronisation dans les gestes, comme dans la boxe".

Passer pro après les JO

Au-delà de ses qualités de sportif, Makan Traoré est aussi un jeune homme équilibré. "Ca tient beaucoup à l'éducation. J'ai deux sœurs et mes parents ont attaché beaucoup d'importance à la scolarité. Je ne joue pas un rôle, je suis moi-même. C'est cool pour l'image de la boxe en général." Royan, sa ville adoption, est un cocon familial où il aime se ressourcer. "L'hiver, c'est très calme (rires), je n'y passe pas beaucoup de temps. Je suis beaucoup plus à Paris et à l'étranger qu''à Royan. Ca fait du bien de rentrer, j'en profite au maximum avec ma famille, mes amis, ça me ressource avant de retourner bosser à Paris et ailleurs".

Après les Jeux Olympiques, Makan Traoré veut devenir boxeur professionnel. "C'est le projet, je m'y projette déjà, mais pour l'instant je suis focalisé sur les Jeux Olympiques". Mickaël Weus, son coach de toujours, confirme : "Il y a les jeux, mais ça ne s'arrête pas là. S'il y a une médaille, ce sera un plus, ça ouvre les portes du monde professionnel, des promoteurs. On vit ce rêve ensemble et on espère pouvoir continuer ensemble". En attendant de marcher dans les pas de Floyd Mayweather, Makan "Tiger" Traoré est en mission olympique. Et tout Royan avec lui.