Ligne Clermont-Paris : le retard de livraison des nouvelles rames n'est pas vraiment une surprise

C'est un problème qui arrive aussi avec Alstom ou Bombardier, les fournisseurs habituels des trains de la SNCF. Le matériel neuf connaît généralement des problèmes de mise au point qui peuvent retarder, ou perturber, leur mise en service. Portes qui ferment mal, climatisation défaillante, problème de couplage entre deux rames, les problèmes sont multiples. C'est pour cela que le matériel neuf est longuement testé avant sa mise en service.

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Les trains tout juste sortis d'usine et pas encore équipés de leurs fauteuils, accumulent des dizaines de milliers de kilomètres, remplis de sacs de sable pour simuler le poids des voyageurs et de leurs bagages. Il y a plusieurs sites d'essais, sur le réseau SNCF, entre deux trains commerciaux, ou bien sur "l'anneau de Velim" en République Tchèque, une grande boucle de 13 kilomètres, réservée uniquement aux essais.

C'est là que les soucis ont été constatés sur la première rame Oxygène sortie d'usine. Des problèmes moteurs et de freins, qui obligent à reculer la livraison. Lors de l'annonce de leur commande, en septembre 2019, la mise en service était prévue pour s'étaler de 2023 à 2024. Un premier calendrier bouleversé par le Covid et reporté de deux ans. Et encore une fois repoussé, à priori d'un an et demi.

Un sujet sensible

Dans un communiqué de presse, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, estime que ce nouveau retard sonne "comme une humiliation de plus faite aux Auvergnats" et s'insurge "il faudra maintenant attendre trois années avant de voir circuler sur nos lignes des trains dignes de ce nom". Stéphanie Picard, porte-parole du collectif des usagers de la ligne SNCF Clermont-Paris réagit sur twitter : "cette ligne ne serait-elle pas maudite ?"

Beaucoup de réactions ont mise en cause la SNCF, qui cette fois n'est pas pour grand chose dans ce retard. Si vous achetez une voiture neuve et qu'elle est livrée en retard, c'est le constructeur ou le concessionnaire qui est responsable, pas vous, le client. C'est la même chose, la SNCF n'est que le futur utilisateur de ces rames et pas même le commanditaire.

La responsabilité de l'État

Car c'est l'État qui est l'autorité de tutelle de cette ligne, c'est à dire qui décide. En l'occurrence, l'État a pris un risque en choisissant le matériel proposé par CAF. Une décision prise en 2019 par la ministre des transports de l'époque, Elisabeth Borne, et son secrétaire d'État, Jean-Baptiste Djebbari. Ils ont préféré ce constructeur espagnol (qui a des usines à Bagnères-de-Bigorre dans les Hautes-Pyrénées et Reichshoffen en Alsace) qui proposait un matériel sur plan, dont aucune des composantes n'avait été éprouvées et qui n'a pas l'habitude de travailler avec la SNCF.

Un risque, dont on paye les conséquences aujourd'hui avec ces problèmes de mise au point. Et malheureusement, rien ne dit que le nouveau délai de livraison annoncé sera bien tenu; il faut déjà résoudre les difficultés constatées lors des essais, en espérant qu'il n'en apparaisse pas d'autre. En attendant, les vieilles rames Corail n'ont pas fini de circuler, en dépassant allègrement leurs 50 ans.

Ce retard peut au moins avoir un avantage : laisser plus de temps aux politiques auvergnats pour faire pression sur l'État afin de commander plus de rames. La décision de 2019 prévoyait seulement 12 rames pour le Clermont-Paris avec la mise en place d'un aller-retour supplémentaire chaque jour. Un parc de matériel très juste pour assurer cette desserte. Le moindre grain de sable, ou groin de sanglier, risque de très vite montrer que les rames ne sont pas en nombre suffisant.