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"Un vieux bâti, mais pas du tout insalubre" : un centre d'hébergement Emmaüs menacé de fermeture à Bordeaux

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Sur arrêté de la préfecture de la Gironde, un centre d'hébergement et de réinsertion sociale d'Emmaüs à Bordeaux risque de devoir fermer définitivement ses portes le 1er février 2023. Une décision incomprise par les résidents et les salariés du site.

Le CHRS Bacalan-Bouliac d'Emmaüs, le 30 décembre 2022. Le CHRS Bacalan-Bouliac d'Emmaüs, le 30 décembre 2022.
Le CHRS Bacalan-Bouliac d'Emmaüs, le 30 décembre 2022. © Radio France - Margot Turgy

"J'ai été très bien accueilli". Depuis le 5 novembre, Patrick est l'un des 26 résidents permanents du Centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) Bacalan-Bouliac d'Emmaüs, situé quartier Bacalan à Bordeaux. Le site est aujourd'hui menacé de fermeture définitive, suite à un arrêté de la préfète de la Gironde, Fabienne Buccio.

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Daté du 23 décembre 2022 et effectif au 1er février 2023, il a notamment été pris en raison de "défaillances dans les conditions d'organisation, de fonctionnement et des conditions matérielles d'accueil", mais également suite à "l'absence d'un plan d'actions permettant d'améliorer l'hygiène globale des locaux ainsi que les conditions de travail du personnel", explique la préfecture. "Ils font du nettoyage, des travaux quand il y a besoin ... Je n'ai rien à dire", rétorque Patrick. "Tout le monde le sait, on ne se cache pas du vieux bâti, mais il n'est pas du tout insalubre. Tout est refait au moment de l'entrée des personnes", abonde Sabrina, responsable du CHRS Bacalan-Bouliac depuis 2019.

La salariée d'Emmaüs Gironde dénonce une décision prise suite à "une inspection en septembre" des locaux, menée par la Direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités (DDETS) de la Gironde*, "uniquement à charge"*. "C'était beaucoup de photos de la structure, sorties de leur contexte. Parce qu'une tâche sur un mur de 3 mètres de long, bon ...". Ce rapport d'inspection, qui n'a "pas permis de lever" des "dysfonctionnements" constatés selon la préfecture, "ne mettait pas du tout en valeur la structure, ni le travail qu'on effectue au quotidien ou le ressenti des résidents. Rien n'était pris en compte", estime Sabrina. "Et l'état du bâti est aussi lié aux problématiques que l'on rencontre", ajoute-t-elle. "Je pense même qu'on accueille le public le plus difficile de Bordeaux".

"Se battre pour les résidents"

"On laisse sa chance à tout le monde", ajoute Amandine, travailleuse sociale au sein du CHRS Bacalan-Bouliac depuis 2019. "Ici, les personnes sont au cœur de leur accompagnement. Que ce soit dans le cadre de la santé, de la réinsertion professionnelle, dans le fait de réapprendre à habiter, à faire des courses ... On travaille tout avec eux, dans l'objectif qu'ils puissent partir en sécurité."

Une chambre du CHRS Bacalan-Bouliac, le 30 décembre 2022.
Une chambre du CHRS Bacalan-Bouliac, le 30 décembre 2022. © Radio France - Margot Turgy

C'est notamment le cas de Gabriel, hébergé au centre d'Emmaüs depuis deux mois. Une "bénédiction" pour ce "technicien itinérant en informatique" de 47 ans, qui se dit "surpris sans l'être vraiment" par la décision de la préfecture, "parce que le système est ce qu'il est. Ce que j'aimerais avant tout, c'est le retour de l'humanité, tout simplement". Quant à Patrick, le résident de 38 ans accueilli depuis le 5 novembre et "sa sortie d'incarcération", il craint de se retrouver à nouveau à la rue si le CHRS ferme ses portes. "Et on va faire quoi ? Devenir des délinquants, se droguer, boire de l'alcool, faire des casses ... Ce sera de pire en pire", prédit-il.

La préfecture promet des relogements

Pour éviter que cette situation n'arrive, la travailleuse sociale Amandine promet de "se battre jusqu'au bout, pour les résidents." Comme l'avocat d'Emmaüs Gironde, Me Sylvain Galinat, qui contestera l'arrêté dans les prochains jours devant le tribunal administratif. "Nous allons combattre une prise de position qui nous apparaît pour le moins discourtoise, prise un 23 décembre, mais aussi illégitime et irrégulière, tant sur la forme que sur le fond", précise-t-il. "Ce que je comprends de cet arrêté, c'est que l'Etat a décidé de ne plus financer, de cette manière-là, l'aide sociale", analyse encore Me Galinat, ce qui mettrait "en grande difficulté" l'antenne girondine de l'association "qui effectue sa mission depuis un grand nombre d'années avec le plus grand soin possible, grâce à des salariés surinvestis".

De son côté, la préfecture de la Gironde dit "s'appliquer" jusqu'au 31 janvier 2023 "à trouver une place dans d'autres structures" pour les résidents du CHRS Bacalan-Bouliac. Dans le même temps, un second arrêté, également daté du 23 décembre, a été pris pour retirer à Emmaüs Gironde l'agrément qui lui permet d'héberger des personnes défavorisées. Le texte doit également entrer en vigueur le 1er février 2023.

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