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"On demande juste à étudier" : le désarroi de jeunes Africains qui ont fui l'Ukraine pour la Sarthe

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Onze jeunes Africains ont trouvé refuge à Loué (Sarthe) après avoir fui la guerre en Ukraine, pays dans lequel ils étudiaient. Ils disposent d'un mois pour trouver une solution leur permettant de rester en France. La commune se mobilise pour les aider. Le maire refuse tout « tri » entre réfugiés.

Ces réfugiés africains d'Ukraine sont hébergés dans des chalets du camping de Loué, grâce à la mobilisation du maire de la commune, Anthony Mussard (à droite sur la photo). Ces réfugiés africains d'Ukraine sont hébergés dans des chalets du camping de Loué, grâce à la mobilisation du maire de la commune, Anthony Mussard (à droite sur la photo).
Ces réfugiés africains d'Ukraine sont hébergés dans des chalets du camping de Loué, grâce à la mobilisation du maire de la commune, Anthony Mussard (à droite sur la photo). © Radio France - Bertrand Hochet

Ils ont fui la guerre en Ukraine et se sont réfugiés en France. Mais ils sont sous la menace d’une expulsion. Onze étudiants arrivés à Loué (avec 30 autres personnes, dans un même bus) vont peut-être devoir rentrer chez eux, du moins si la loi est appliquée à la lettre. Toute la difficulté de leur dossier est que ces jeunes sont originaires d’Afrique. Ils ont quitté leur pays (Côte-d’Ivoire ou Cameroun, notamment) il y a plusieurs années pour aller étudier en Ukraine. Et lorsque l’invasion russe a éclaté, fin février 2022, ils ont, comme beaucoup d’autres, sauté dans un car pour échapper à l’horreur. 

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C’est ainsi que ces étudiants d’une vingtaine d’années, tous francophones, se retrouvent en Sarthe mais sans disposer aujourd’hui des mêmes droits que les Ukrainiens de souche arrivés en même temps qu’eux.

"On demande juste à étudier"

Déboussolés, ces deux femmes et neuf hommes sont déterminés à se battre. Assis sur son lit, dans l’un des chalets du camping prêté par la mairie de Loué, Jean-Bertrand voit les jours défiler avec angoisse. Comme ses amis, le jeune homme de 24 ans, étudiant en quatrième année d’économie internationale, dispose d’un mois seulement pour obtenir un titre de séjour. "Nous comprenons la position du gouvernement français. Mais il faut savoir que nous demandons juste à étudier", plaide-t-il. "On ne demande pas grand-chose. On ne demande pas d’argent. On ne réclame pas de maison. On veut juste poursuivre nos apprentissages. Nous ne voulons pas rester sans rien faire. Nous avons entamé un parcours et nous souhaitons le terminer", explique-t-il posément. 

Tous francophones 

Ces réfugiés s’émerveillent de l’accueil des habitants de Loué qui, parfois, les invitent à dîner. Le fait de parler français est un accélérateur pour l’intégration, remarque Paule-Alexise, 21 ans qui après l’agronomie en Ukraine souhaite poursuivre, en Sarthe, des études d’infirmière. "Je peux comprendre la position de la France", dit-elle, à son tour. "Mais je rappelle simplement que nous n’avons pas demandé à être ici. Nous avons traversé tellement de situations difficiles avant d’arriver en France. J'aimerais vraiment étudier ici. La langue n'est pas un frein. Nous parlons français. C’est donc très facile pour nous de communiquer. J'ai juste envie m’insérer dans la société française", argumente-t-elle. 

"Nous sommes désorientés"

Malgré cette détermination, ce double déracinement (d’Afrique d’abord puis d’Ukraine) est très difficile à vivre, témoigne Ben-Ahma, 23 ans, en cinquième année de médecine : "J'aimerais que les gens, ici, se mettent à notre place, qu’ils essayent d’imaginer notre situation pour leurs propres enfants : aller étudier dans un pays où une guerre survient, quitter ce pays, arriver en France et y être refoulés, peut-être parce qu’on est noirs. C’est très blessant. C’est démoralisant. C'est très dur à encaisser". Le jeune homme poursuit : "Par moments, on pleure. Nous sommes très désorientés." 

La mobilisation de la commune de Loué 

Le maire de Loué remue ciel et terre pour que ces jeunes puissent restent en France. Son objectif est que chaque dossier soit étudié au cas par cas avec un maximum de bienveillance. Anthony Mussard refuse qu’une distinction soit opérée parmi les réfugiés. "Ils sont victimes de la même guerre. Ils n'ont pas choisi de venir sur notre territoire. Ils sont venus ici par accident pour se sauver, comme les autres réfugiés. Ils ont effectivement une autre nationalité. Mais leur objectif est le même : sauver leur vie", plaide-t-il. 

L’élu est en contact régulier avec les services de l’Etat (sous-préfecture, notamment). "Ces personnes sont brillantes. Nous devons faire preuve de la même solidarité qu’envers les Ukrainiens de souche, sans trier, puisque, de toutes façons, nous ne pouvons pas trier la misère", explique-t-il avec force.

"Ces personnes sont une chance pour notre pays, un atout"

Le maire de Loué insiste sur les compétences de ces jeunes. "Nous avons la chance, par exemple, d’avoir un étudiant en cinquième année de médecine. Quand on connait le manque de professionnels de santé dans nos zones rurales et partout en France, il faut permettre à ce jeune homme de terminer ses études. A terme, il pourra exercer chez nous", avance l’élu. 

La municipalité de Loué a d'ores et déjà pris des contacts avec l'Université du Mans et la faculté de médecine d'Angers. "Ces personnes sont une chance pour notre pays, un atout", résume Anthony Mussard. Si une solution n’est pas trouvée d’ici fin avril 2022, ces onze jeunes Africains, réfugiés d’Ukraine, sont théoriquement expulsables vers leur pays d’origine.
 

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