Une pharmacie de Dordogne fabrique des médicaments pour faire face à la pénurie

Dans l'arrière-boutique de sa pharmacie à Tocane-Saint-Apre en Dordogne, Guillaume Saint-Martin pianote sur son ordinateur sa prochaine commande de médicaments. "Je suis en train d'envoyer une commande directement à tous mes grossistes qui me permettent de me fournir en médicaments", explique-t-il. Et la liste sur l'écran parle d'elle-même. "On peut considérer que deux tiers de mes produits sont en rupture. Toute cette partie, explique-t-il en montrant sa commande, ce sont les médicaments que je ne pourrai pas avoir cet après-midi."

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En France, selon ce professionnel, 3.500 médicaments rencontreraient des problèmes d'approvisionnement, pour ne pas dire de ruptures, parfois longues. Heureusement, l'officine possède un laboratoire de préparations magistrales et peut fabriquer certains de ces médicaments. C'est même la seule à pouvoir le faire en Dordogne. "Nous ne pouvons pas fabriquer tous les médicaments, précise Guillaume Saint-Martin. Il y a certains produits dont la matière première n'existe pas. En revanche, pour tous ceux dont les matières premières existent, je possède l'agrément pour les acheter, pour transformer la matière première et ainsi la fournir aux dosages demandés sous forme de gélules, de pommades, de suppositoires, ou d'ovules pour répondre à la demande de la prescription du médecin."

Le laboratoire n'était pas prévu pour pallier les pénuries

Guillaume Saint-Martin n'a pas lui-même installé ce laboratoire spécialisé, équipé notamment d'une hotte aspirante pour pouvoir manipuler des molécules cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction. "J'ai profité de l'opportunité d'un départ à la retraite il y a quatre ans et demi pour acheter la pharmacie qui possède cette spécialité, qui a cette unicité de pouvoir fabriquer des préparations", précise-t-il. "Tout était déjà installé quand je suis arrivé. Il s'agit d'installations vraiment particulières. Les coûts d'entretien sont aussi assez importants. Toute l'organisation est spécifique par rapport à une activité de comptoir classique. Cela nécessite aussi pas mal de formations spécifiques pour être le plus performant possible. En réalité, on revient à l'essence même du métier, ajoute-t-il.

Ce laboratoire n'était pas destiné à l'origine fabriquer des médicaments qui existent. "Il était surtout prévu pour fabriquer des médicaments sans équivalence existante côté comptoir, explique le pharmacien. C'était surtout réservé à des pommades ou à des dosages qui étaient différents de ceux proposés au grand public. Mais avec le temps et l'augmentation du nombre de pénuries et de médicaments manquants, nous nous sommes adaptés. Et maintenant, nous fournissons la plupart du temps des médicaments qui devraient exister pour le grand public, que l'on fabrique nous-mêmes et adaptons aux dosages demandés par les médecins. On essaie de répondre à ces pénuries et ainsi les fournir aussi aux autres pharmacies."

La pharmacie de Tocane fournit chaque mois 400 officines de la région

"Nous faisons à peu près entre 120 et 130 préparations par jour", détaille Guillaume Saint-Martin. Aussi bien des antibiotiques que des médicaments pour le cœur, contre la migraine et même un équivalent du Viagra. "Sur ce nombre, cinq ou six seulement concernent notre officine. Comme nous avons la qualité de sous-traitants, nous fournissons 400 pharmacies différentes par mois, le plus souvent au niveau régional, La Dordogne bien sûr, mais également, l'ouest du département de la Corrèze, la Haute-Vienne, la Creuse, l'ouest de la région bordelaise et le sud du département du Lot. Nous ne sommes pas très nombreux, (cinq à six des 12 salariés travaillent au laboratoire), mais nous pouvons répondre très vite à la demande et fournir au niveau local.

En France, une quarantaine des 20.000 pharmacies sont agréées pour fabriquer des médicaments.