Les accusés de l'affaire Alexandre Junca : la double vie de Claude Ducos

Les deux vies de Claude Ducos, 72 ans à l'époque des faits, soupçonné d'avoir transporté et découpé le corps du petit Alexandre, sont complètement cloisonnées. Il y a ce vieux garçon qui vit dans la ferme de ses parents. Il paie un loyer à son frère et à sa belle sœur. Il a une passion, la chasse. Il est le chef des rabatteurs lors de toutes les battues de la commune de Cabidos. Tout le monde dit dans le village qu'il est serviable et généreux. Il est toujours prêt à rendre service.

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Finalement, la grosse moustache qu'il porte au moment des faits le décrit assez bien. C'est un gars entier, sans chichi. Son enfance se déroule sans problème. Au sein d'une famille aimante. Il est le cinquième de huit enfants. D'ailleurs la plupart de ses proches le soutiennent malgré la gravité de ce qu'on lui reproche. Il a travaillé toute sa vie pour une entreprise d’électricité sous traitante de la SNCF.

L'autre vie de Claude Ducos

Et il y a l'autre Claude Ducos. Celui qui vit son homosexualité caché des siens. Il a connu une femme à la quarantaine. Certains de ses frères se doutent, mais ne posent pas de questions. Dans la famille on n'est pas du genre à se confier les yeux dans les yeux. Chacun sa vie après tout. On est plus dans l'émotif que dans l'affectif chez les Ducos, disent savamment les experts. Claude Ducos fréquente donc le milieu marginal palois. Il y cherche et trouve des relations sexuelles tarifées. Cela se sait autour des halles de Pau. Il propose de l'argent contre des fellations. Mais avec Mickaël Baehrel (25 ans à l'époque et principal accusé de l'affaire Alexandre Junca), c'est différent. Il lui rend des services aussi. Quand Baehrel est en prison, ils s'écrivent. Il emmène Fatima Ennajah, la compagne de Baehrel, au parloir. Même s'il s'en défend aujourd'hui, il semble qu'il est tombé amoureux de ce jeune homme plutôt beau gosse. Ducos a une photo de Baehrel dans son portefeuille.

Ce que l'on reproche à Claude Ducos

Claude Ducos est désigné par son ancien amant Baehrel comme celui qui l'a débarrassé du corps d'Alexandre. Ce sont les aveux de Baehrel qui pèsent le plus dans la mise en accusation de Claude Ducos. Mais il n'y a pas que cela. Il y a tout ce que Ducos n'explique pas. depuis le début, il a toujours la même défense : "Je ne comprends pas. Je ne me souviens pas. Je n'ai rien fait. Vous me voyez moi faire cela à un gosse ? J'aimerais me souvenir mais je ne me souviens pas". Il dit ca sur un ton bonhomme en roulant les "r".  Il dit ça en boucle.

Pendant la garde à vue, Claude Ducos n'a jamais paniqué. Il se dit innocent sans pour autant paniquer. Dans les geôles de garde à vue, il dort comme un bébé, ce sont ses propres termes. Claude Ducos est un dur à cuire. C'est l'effet qu'il fait aux enquêteurs et à tous les magistrats qui ont tenté, pendant la procédure, d'obtenir des explications plausibles et vérifiables. Parce que ces mots sont insuffisants pour expliquer ce faisceau de preuves qui l'accablent.

La téléphonie et la mystification de la 605

D'abord il y a dans le dossier cette activité téléphonique la nuit de la mort d'Alexandre. Son portable est éteint. Baehrel l'appelle quatre fois dans la nuit après les faits. On sait qu'a 6h du matin, Claude Ducos écoute le message laissé par Baehrel. Et qu'il se rend à Pau dans la matinée, dans le quartier où habite Baehrel. Ducos, après avoir menti sur sa venue à Pau, dit aujourd'hui : "Je ne me souviens pas de ces appels, et de ce que disait ce message".

On sait aussi que son téléphone était présent dans le quartier du lavoir du pont du 14 juillet, le jour où le corps d'Alexandre a été jeté dans le gave. Encore une coïncidence troublante qui sans être la preuve absolue, justifie qu'il soit inquiété.

Plus troublant encore, le destin étrange de ses voitures. Baehrel dit que Ducos est venu avec sa 605 grise pour emporter la dépouille d'Alexandre. En septembre 2011, il a fait détruire cette voiture chez un carrossier ami de Morlanne, et, plus étrange, il fait poser les plaques de cette voiture sur la nouvelle 605 qu'il a achetée de couleur bleu. Personne ne le sait dans son entourage familial. Pour se défendre, Claude Ducos affirme que ce genre d'entourloupe est courante à la campagne. Il l'avait déjà fait une fois auparavant. Baehrel raconte que Ducos a amené le corps découpé de l'enfant, dans son 4x4 Jeep qu'il utilise pour la chasse. Le véhicule a depuis été vendu aux Pays Bas. Il a été retrouvé, non sans mal, par les enquêteurs, mais aucun indice, même ADN, n'a pu être découvert.

Enfin toute la ferme de Cabidos a été passée au peigne fin. Tous les outils qui auraient pu servir à la découpe, et tous les congélateurs qui aurait pu accueillir un corps ont été analysés. Là encore aucune trace. C'est incontestablement la grande frustration des enquêteurs concernant Claude Ducos.

Le procès de l'affaire Alexandre Junca s'ouvre ce mardi 7 juin devant la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, à Pau.

Dés le départ, Claude Ducos a dit qu'il n'était pour rien dans ce dossier. Il y a des indices, pas des preuves formelles de son implication. C'est tout l'enjeu de ce procès. Doit on déclarer quelqu'un coupable sur la base de simples indices d'impressions de sentiments de mode de vie qui interroge? — Me Loréa Chipi son avocate

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