Procès à Pau du meurtre au feu rouge : l'accusé nie avoir voulu tuer
Frédéric de Chérancé s'est expliqué ce lundi au premier jour de son procès. Il affirme n'avoir jamais voulu la mort de Baptiste Sallefranque ce soir d’août 2016. Il dit avoir eu peur de sa victime.
Le premier jour du procès à Pau du meurtre au feu rouge devant la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques ce lundi 8 mars 2021. Ce procès c'est celui de Frédéric de Chérancé, chef d'entreprise lonsois de 62 ans jugé pour le meurtre de Baptiste Sallefranque en août 2016. C'est une altercation à un feu rouge qui s'est terminée en un coup de couteau porté au cœur par Frédéric de Chérancé qui avait pris la fuite une semaine en Espagne avant, finalement, de se rendre. L'accusé a eu l'occasion en ce premier jour de procès de raconter sa version des faits.
"Je ne voulais pas le tuer, pas même le blesser"
Il dit que s'il l'a tué, il ne l'a pas fait exprès : "Baptiste Sallefranque a esquissé un geste pour me frapper. J'ai fait ce geste pour le repousser, et le couteau s'est enfoncé". Dans le box, il mime ce geste : les deux bras tendus vers l'avant. "Je ne voulais pas le tuer, pas même le blesser". Il a décrit la scène juste avant, quand Baptiste est descendu de sa voiture. De Chérancé utilise le mot "jaillir". Il entend Baptiste dire : "Je vais te défoncer gros porc." De Chérancé poursuit : "J'étais effrayé. Il avait un regard de fou. J'ai senti que ma voiture ne me protégerait pas." L'accusé regarde le carton sur le siège passager avant de sa C5, avec dedans, ce couteau de chasse avec une lame de 18 centimètres. Il l'a pris "avant qu'il ne soit trop tard" explique-t-il à la cour. La cour reviendra plus tard sur les faits. Cette fois, il devra répondre à ces questions, et cette version en laisse beaucoup en suspend.
Un policier à décharge
La cour a également entendu un enquêteur de la Police Judiciaire de Pau, et la déposition du fonctionnaire a surpris. En règle générale, les enquêteurs restent techniques, et ne prennent pas position dans un dossier. Il va soulager les charges qui pèsent sur Frédéric de Chérancé. Il parle des envies suicidaires du chef d'entreprise pendant sa fuite, dont personne n'a jamais parlé dans ce dossier. Il le croit quand il dit que c'est la peur des représailles qui l'a poussé à quitter la France. Qu'il voulait se rendre plus tôt. Il enchaîne sur la mauvaise réputation de Baptiste Sallefranque et détaille son parcours judiciaire (neuf mentions à son casier judiciaire). Un passé que l'accusé ignorait totalement au moment des faits. Le policier décrit les mensurations de la victime : 1,85m et précise qu'il chausse du 45. Il va même jusqu'à laisser entendre qu'il avait peut être une arme, lui aussi, quand il est descendu de voiture. Alors, l'avocat général Orlane Yaouanq, qui soutient l'accusation de meurtre, agacée, lui a demandé de préciser deux évidences du dossier : "Y a-t-il un témoin qui a vu une arme ? Y a-t-il un témoin qui dit que Baptiste Sallefranque a frappé l'accusé ?" Obligé, le policier a répondu deux fois non.
La pauvreté avec un nom à particule
Ce procès a commencé par l'évocation de la personnalité de l'accusé. Malgré son nom à particule, Frédéric de Chérancé a connu une enfance marquée par la pauvreté, avec un père violent et une mère alcoolique. Il souffre de dyslexie, à une époque où on ignore tout de cette maladie. Sa scolarité tourne court. Mais il a de l'or dans les mains. Il devient menuisier, et chef d'entreprise. Il créé cinq entreprises, toutes liquidées aujourd'hui. Il travaille en Arabie Saoudite, au palais de l'Elysée. La guerre du Golfe est fatale à sa première entreprise. Il tente sa chance sans succès au Canada. Et puis se lance dans la maison flottante. L'idée est prometteuse, mais la tempête Xynthia va pousser le gouvernement à interdire de construite en zone inondable. Son idée est morte-née. Au moment des faits, il ne touche qu'une pension invalidité. Surendetté, il s'apprêtait à décoller pour Los Angeles pour lancer, avec sa fille "une galerie d'art culinaire".
Le procès reprend ce mardi matin avec l'audition de la famille de Baptiste Sallefranque, la victime. Verdict jeudi.
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