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L'écrivain Salman Rushdie dans un état critique après avoir été poignardé

- Mis à jour le
Par
  • France Bleu

L'écrivain Salman Rushdie, auteur des "Versets sataniques" et cible d'une fatwa depuis 1989, est dans un état critique ce samedi, après avoir été poignardé vendredi dans l'Etat de New York, aux Etats-Unis.

Salman Rushdie à Berlin en 2019. Salman Rushdie à Berlin en 2019.
Salman Rushdie à Berlin en 2019. © Maxppp - HAYOUNG JEON

"Les nouvelles ne sont pas bonnes", a déclaré vendredi soir au New York Times l'agent de Salman Rushdie, Andrew Wylie. L'écrivain britannique a été poignardé au moins une dizaine de fois au cou et à l'abdomen, ce vendredi, dans l'Etat de New York aux Etats-Unis. Il est la cible d'une fatwa depuis 1989 et la publication de son ouvrage "Les versets sataniques". Il allait prendre la parole dans un festival littéraire près de New-York aux Etats-Unis, une conférence sur la liberté artistique.

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Salman Rushdie, 75 ans, a été placé sous respirateur artificiel. "Salman va probablement perdre un oeil ; les nerfs de son bras ont été sectionnés et il a été poignardé au niveau du foie", a détaillé M. Wylie. Immédiatement après son agression, sur l'estrade d'un amphithéâtre d'un centre culturel à Chautauqua, dans le nord-ouest de l'Etat de New York, Salman Rushdie a été transporté en hélicoptère vers l'hôpital le plus proche où il a été opéré en urgence, a précisé devant la presse le major de la police de l'Etat de New York, Eugene Staniszewski.

Il "essayait de tuer Salman Rushdie"

Peu avant 11H00 (15H00 GMT) ce vendredi, "un suspect s'est précipité sur la scène (de l'amphithéâtre) et a attaqué Salman Rushdie et l'intervieweur" en "poignardant" l'écrivain "au cou", a très rapidement annoncé la police, qui a précisé vendredi soir que l'écrivain avait aussi été poignardé "à l'abdomen". L'animateur de la conférence, Ralph Henry Reese, 73 ans, a, lui, été "blessé légèrement au visage".

Carl LeVan, professeur de sciences politiques, était dans la salle, et a raconté au téléphone à l'AFP qu'un homme s'était jeté sur la scène où M. Rushdie était assis pour le poignarder violemment à plusieurs reprises. Il "essayait de tuer Salman Rushdie", a affirmé ce témoin.

L'agresseur a été aussitôt arrêté et placé en détention, l'agent Staniszewski révélant qu'il s'appelait Hadi Matar, 24 ans, originaire de Fairview dans le New Jersey. La police pense qu'il a agi seul. Il avait acheté un billet pour l'événement organisé à la Chautauqua Institution, dans l'ouest de l'État de New York.

Citant un responsable anonyme des forces de l'ordre, NBC New York a indiqué que cet homme est un sympathisant de l'extrémisme chiite et des gardiens de la révolution islamique d'Iran (IRGC). Selon NBC New York, le responsable de la police a déclaré qu'aucun lien définitif n'avait été établi avec l'IRGC, mais que l'examen préliminaire des comptes de médias sociaux du suspect indiquait qu'il avait des sympathies pour cette organisation gouvernementale iranienne.

Samedi, le principal quotidien ultraconservateur iranien, Kayhan, a félicité l'agresseur. "Bravo à cet homme courageux et conscient de son devoir qui a attaqué l'apostat et le vicieux Salman Rushdie", écrit le journal. "Baisons la main de celui qui a déchiré le cou de l'ennemi de Dieu avec un couteau".

Une fatwa depuis 1989

Salman Rushdie, né le 19 juin 1947 à Bombay, deux mois avant l'indépendance de l'Inde - élevé par une famille d'intellectuels musulmans non pratiquants, riche, progressiste et cultivée - avait embrasé une partie du monde musulman avec la publication des "Versets sataniques", conduisant l'ayatollah iranien Rouhollah Khomeiny à émettre en 1989 une "fatwa" demandant son assassinat.

L'auteur avait été contraint dès lors de vivre dans la clandestinité et sous protection policière, allant de cache en cache. Il affronte à ce moment une immense solitude, accrue par la rupture avec sa femme, la romancière américaine Marianne Wiggins, à qui "Les versets..." sont dédiés. Vivant discrètement à New York, Salman Rushdie avait repris une vie à peu près normale tout en continuant de défendre, dans ses livres, la satire et l'irrévérence.

La "fatwa" n'a jamais été levée et beaucoup de traducteurs de son livre ont été blessés par des attaques, voire tués, comme le Japonais Hitoshi Igarashi, victime de plusieurs coups de poignard en 1991.

"Trente ans ont passé", disait toutefois l'écrivain à l'automne 2018. "Maintenant tout va bien. J'avais 41 ans à l'époque (de la fatwa), j'en ai 71 maintenant. Nous vivons dans un monde où les sujets de préoccupation changent très vite. Il y a désormais beaucoup d'autres raisons d'avoir peur, d'autres gens à tuer...".

Anobli en 2007 par la reine d'Angleterre, au grand dam des extrémistes musulmans, ce maître du réalisme magique, homme d'une immense culture qui se dit apolitique, a écrit en anglais une quinzaine de romans, récits pour la jeunesse, nouvelles et essais. 

Macron et Johnson réagissent

"Son combat est le nôtre, universel", a lancé sur Twitter le président français Emmanuel Macron, assurant être "aujourd'hui, plus que jamais, à ses côtés". Le Premier ministre britannique Boris Johnson s'est de son côté dit "atterré que Sir Salman Rushdie ait été poignardé alors qu'il exerçait un droit que nous ne devrions jamais cesser de défendre", en allusion à la liberté d'expression.

"Rien ne justifie une fatwa, une condamnation à mort", s'est indigné quant à lui Charlie Hebdo, journal satirique français décimé par un attentat islamiste en 2015. Dans son éditorial, Riss, chef de la rédaction et l'un des rares survivants de l'attentat de 2015, fustige des "petits chefs spirituels médiocres, intellectuellement nuls et culturellement souvent ignares" qui s'attaquent à "la liberté de penser, de réfléchir et de s'exprimer" parce qu'elles sont "autant de menaces contre (leur) emprise sur les esprits."

Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a déclaré via son porte-parole être "horrifié" par l'attaque, ajoutant "qu'en aucun cas la violence était une réponse aux mots". "Cet acte de violence est consternant", a estimé le conseiller à la sécurité du président américain Joe Biden, Jake Sullivan. "Tous les membres de l'administration Biden-Harris prient pour son prompt rétablissement", a-t-il ajouté dans un communiqué.

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