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"On pensait avoir tourné la page" : les salariés de retour à la centrale à charbon Émile-Huchet de Saint-Avold

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Après plusieurs semaine d'atermoiements, la centrale à charbon Émile-Huchet, située à Saint-Avold, a redémarré ce lundi. 67 salariés sous le coup d'un plan social ont accepté de revenir travailler, parfois la mort dans l'âme.

Plus de 400.000 tonnes de charbon ont été importées d'Amérique du sud et d'Afrique du Sud. Plus de 400.000 tonnes de charbon ont été importées d'Amérique du sud et d'Afrique du Sud.
Plus de 400.000 tonnes de charbon ont été importées d'Amérique du sud et d'Afrique du Sud. © Radio France - Bastien Munch

Les mains noircies par la poussière, Sylvain Krebs contemple la montagne de charbon devant lui. "J'en ai gardé un petit bocal, comme dans un musée", sourit le responsable du parc charbon de la centrale Émile-Huchet de Saint-Avold, qui a officiellement redémarré lundi 28 novembre, après une fermeture prévue comme définitive le 31 mars dernier. Mais face à la guerre en Ukraine et à l'arrêt de la moitié des réacteurs nucléaires en France, le gouvernement avait, dès la fin juin, autorisé la centrale à fonctionner cet hiver. Tout était prêt depuis début octobre, mais les températures clémentes ont permis de repousser l'échéance jusqu'à aujourd'hui.

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En tout, 420.000 tonnes de charbon ont été importées ces derniers mois depuis l'Afrique du Sud ou l'Amérique du Sud. Depuis l'annonce de la fermeture, Sylvain Krebs n'imaginait jamais remettre un jour les mains là-dedans. "Quand on s'est arrêtés le 31 mars, c'était la fin d'un chapitre, on refermait le livre et on partait sur des énergies vertes", se souvient-il. "Là c'est un peu dommage, il y a un contre-temps. Et on continue de mettre du CO2 dans l'air... Moi, si vous me passiez dans l'hydrogène dès maintenant, je serais fin heureux. Même pour les petits-enfants, je pourrais enfin leur dire que j'ai participé à sauver la planète."

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Dépendance au marché

Reste une question : jusqu'à quand la centrale à charbon devra-t-elle fonctionner cet hiver ? Elle n'a le droit de tourner que 2.500 heures maximum jusqu'en mars 2023. "On est soumis aux prix du marché, donc à la bourse de l'électricité", explique Thomas About, chef de quart à la centrale Émile-Huchet. "Plus la consommation est faible avec des moyens de production très présents, plus les prix seront bas. Plus la consommation est élevée avec une tension sur les moyens de production, plus les prix seront hauts. Si c'est en-dessous de nos coûts de production, qui s'élèvent à 200 euros le mégawatt, on sera à l'arrêt. Au-dessus, nous serons en service."

"On dépend énormément des questions de sobriété énergétique", continue-t-il. "Actuellement, beaucoup d'industriels sont en grande précarité parce que leurs factures explosent. Donc ils réduisent leur production. On est vraiment soumis à la respiration du réseau électrique français !" Néanmoins, le personnel de la centrale s'attend à devoir rester sur site au moins jusqu'au mois de janvier.

Une fois oui mais pas deux

Sur les 68 salariés de la centrale visés par un plan social au printemps, 67 ont accepté de revenir. "C'est vraiment usant, un PSE ce n'est jamais très simple à passer", confie Thomas About. "On a accepté de revenir pour cette saison. Mais si on nous sollicite de nouveau la saison prochaine, ça va être beaucoup plus compliqué", assure-t-il. "C'est hors de question qu'on ramène nos salariés à la maison une deuxième fois fin avril, et qu'on réembauche tout le monde à la va-vite", complète Camille Jaffrelo, porte-parole de GazelEnergie, le groupe qui exploite la centrale. "On a fait cette valse une fois, on ne pourra pas la faire une deuxième."

L'entreprise productrice d'électricité demande surtout de la visibilité. "Humainement, ça ne marche pas", continue-t-elle. "Imaginez, un jour on vous vire et le lendemain on vous réembauche. Un industriel ne peut pas fonctionner comme ça. Cet hiver, on a appelé à la mobilisation de tous, et certains en retraite depuis cinq ans, voire parfois dix ans, sont revenus sur le site." Un renfort pour une seule saison : "Si on doit en faire une deuxième, il va falloir créer de nouvelles équipes", assure Camille Jaffrelo.

Face à ces incertitudes, Thomas About attend un signal politique fort. "Sur les dix dernières années, la France a en moyenne déclassé l'équivalent d'un réacteur nucléaire par an. Penser que ça allait passer inaperçu, c'était une erreur. C'est maintenant au monde politique de se réveiller et d'avoir un projet vraiment ambitieux pour de nouvelles capacités de production pilotables en France." Pour rouvrir la centrale Émile-Huchet, 500 millions d'euros ont dû être réinvestis. À son maximum, elle produit 600 mégawatts-heure, soit l'équivalent d'un tiers de la consommation électrique du Grand Est.

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