La chanteuse Nochka à La Rochelle : "les gens des Francofolies, je veux qu'ils voient que je donne tout"

Zaho de Sagazan y était encore il y a deux ans ; on y a vu aussi, les années précédentes, Pomme, Ben Mazué, Bigflo et Oli, Cali, parmi beaucoup d'autres... avant-même que leur carrière décolle. France Bleu La Rochelle nous emmène dans les coulisses du Chantier des Francofolies, où chaque année, plusieurs jeunes artistes en début de carrière sont sélectionnés parmi de nombreux candidats, pour venir travailler toute une semaine. Ils y sont accompagnés par des coachs professionnels, afin de peaufiner leur concert et de professionnaliser leur projet.

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Et parmi les 17 artistes sélectionnés en cette année 2024, nous avons suivi, début février, dans sa semaine de travail, Nochka, chanteuse, auteure-compositrice de 22 ans. Nochka a d'abord été remarquée sur les réseaux sociaux en publiant des chansons a capella en polyphonie. Elle a été repérée par les producteurs de l'émission The Voice, à laquelle elle a participé l'année dernière, éliminée avant les demi-finales. "Ça m'a apporté un petit peu de visibilité, dit-elle. Je ne sais pas trop si c'est pour moi, mais c'était une expérience cool."

Nochka prépare maintenant son premier gros projet, qui sortira en juin. Elle a déjà sorti en février le premier single issu de ce projet, "J'suis pas désolée". Elle définit sa musique comme de la Dark Pop : "ces dernières années, j'ai eu des émotions très, très sombres. Les écrire, ça m'a permis de les évacuer".

Premier jour : "j'ai envie de récupérer plein d'ingrédients"

Ce que vient chercher Nochka au Chantier des Francofolies ? "J'ai envie de pouvoir solidifier un petit peu mon set, ce que je joue sur scène, et puis réussir à travailler les mouvements, j'ai des problèmes de respiration, etc. J'ai envie de récupérer plein d'ingrédients pour pouvoir ensuite les appliquer et rendre mon concert encore meilleur ! Et progresser..."

Et c'est exactement à ça que sert le Chantier des Francofolies, témoigne Sébastien Chevrier, chargé de coordination artistique et pédagogique : "c'est accompagner dans la professionnalisation, et notre spécificité à nous, c'est d'accompagner ça à travers la scène et le live. Ici, on a la chance d'avoir des espaces de travail dédiés au live, une scène techniquement équipée. Et puis des espaces de travail où on travaille techniquement la voix, le corps, éventuellement la musique aussi".

Atelier voix : "est-ce qu'elle va tenir cette fois-ci ?"

Direction l'atelier voix, justement, dirigé par Carole Masseport, professeure de chant : "dans mes morceaux, lui explique Nochka, j'ai tendance à ne pas chanter très fort, et par moments, je me mets un peu à pousser. J'aimerais pouvoir le faire sans me dire : 'est-ce que ma voix va tenir cette fois-ci ?' J'ai plein de choses que je sais faire vocalement, mais je n'ose pas. Mais toute seule, je le fais, donc il s'agit d'oser". "Moi, nous dit Carole Masseport, je suis là pour qu'ils aient un recul sur la pratique, et une connaissance physiologique, et qu'ils fassent des ponts entre la technique vocale et l'émotion".

"C'est intéressant d'essayer tes chansons avec tout un tas de timbres de voix différents, explique Carole Masseport à Nochka, pour ne pas prendre d'habitudes. Et ça va aussi te permettre de redécouvrir tes chansons à chaque fois, et de laisser l'émotion venir".

Et à la fin de la semaine, Nochka a avancé : "un truc que je n'avais compris, c'est l'endroit où résonne le son dans la tête quand on chante. On a essayé de m'expliquer plein de fois et je ne comprenais pas. Et cette fois-ci, maintenant je sens quand c'est plus nasal, etc. Et du coup, ça m'aide plus à poser ma voix. Et ça, c'est très chouette, puisque c'est mon instrument, il vaut mieux que je sache comment ça marche !"

Deuxième jour, debriefing du concert sans public : "tu sais que tu peux aller encore explorer des choses"

Mise en pratique, dès le deuxième jour de travail, le mardi, dans la salle de concert du Chantier des Francofolies, ce bâtiment tout en bois planté juste au bord du chenal du Vieux-Port de La Rochelle : Nochka termine son premier filage, un concert sans public. "Tout est propre, conclut immédiatement l'un des coachs scéniques, le musicien Sébastien Hoog. Vous avez tout ce qu'il faut pour faire un joli set. Après, le truc, moi j'ai l'impression que tu as un personnage, il est un peu le même du début à la fin". Il faut donc, peut-être, "chercher quelque chose pour essayer d'avoir d'autres visages, d'autres facettes".

"Ça se joue, peut-être, ça, sur les nuances et sur l'interprétation", renchérit le musicien (et comédien) Christophe Gendreau : il propose "de creuser l'interprétation aussi et d'aller chercher d'autres choses. Tout est très maîtrisé, tout est hyper bien fait, c'est hyper bien. Tu sais que tu peux aller encore explorer des choses. Maintenant que tu maîtrises tout ça, tu peux aller te promener, te balader... Tu pars sur un sentiment, par exemple. La chanson Les Coquelicots, par exemple, ça manquait de plaisir, de sourire. Je pense qu'on va faire ça : partir dans les titres, de quoi ça parle, ce que ça raconte". "C'est vrai, confirme Nochka, qu'écrire mes émotions, c'est une chose, mais ensuite les retranscrire sur scène, c'est encore un autre exercice".

"Il faut qu'on ait une petite porte d'accès à ton intime. - Ça ne va pas être facile !"

"Tu sais, quand c'est très bien contrôlé, on n'aime pas, quand c'est trop bien fait, analyse le coach scénique Christophe Gendreau. On aime bien les failles, en fait. Et quand c'est trop bien fait, on est moins touchés. Tu as dit que tu aimerais bien être plus engagée dans l'interprétation, mais aussi dans les émotions. Donc ça, ça veut dire creuser le sens, pour te donner des choses où tu peux être dans ton intime. Il faut qu'on ait une petite porte d'accès à ton intime". "Ça ne va pas être facile !", lâche Nochka dans un sourire.

"C'est vrai que, là, ils prennent beaucoup d'infos en cinq jours, énormément d'infos, nuance Sébastien Hoog. Et à la fin, ils n'en peuvent plus. Ils en gardent 10% quand ils partent le samedi. Et souvent, quatre ou cinq mois après, ou même à la prochaine résidence de leur prochain album, ils se souviennent de trucs. C'est beaucoup d'infos qui des fois ressortent longtemps après".

Dernier jour, concert public : "je me suis dit que je ne voulais pas que ce morceau m'écrase et que c'est moi qui allais l'écraser. Du coup, mon corps, il a lâché"

Le vendredi soir, après cette semaine complète de travail intensif, c'est l'heure du vrai concert, devant un vrai public. À la fin du set, Nochka sort de scène les larmes aux yeux. "Trop d'émotions", dit elle. "J'ai essayé, vraiment, de donner toujours plus. C'est un peu ce que j'essaye de faire à chaque fois. Mais là, comme on a eu une grosse semaine de travail... Je pense qu'il y a aussi une part de moi où j'étais un peu en mode : boh il y a les gens des Francofolies, je veux qu'ils voient que, vraiment, je donne tout. Et il y a un morceau qui me fait peur, Golden Gate. Et je me suis dit que je ne voulais pas qu'il m'écrase et que c'est moi qui allais l'écraser. Donc j'ai essayé, mais c'est vrai que, du coup, sur le morceau d'après, comme j'avais tout donné juste avant, mon corps, il a lâché. Il s'est dit ok, c'est bon, c'est fini. Alors qu'en fait, il restait un morceau !"

Capucine et Inès, venues pour un autre artiste de la soirée, apprécient ce qu'elles viennent d'entendre de Nochka : "elle arrive à faire plusieurs types de chansons, elle peut faire triste, qui bouge. Son timbre de voix change selon le thème de la musique, c'est sympa. Elle chante très bien". Pierre-Alexis, dont ce n'est pas l'univers musical de base, a trouvé ça "franchement pas mal. J'étais assez surpris, c'était quand même assez bien fait".

Quant à Julie, elle est déjà totalement fan : "j'ai découvert Nochka à The Voice l'année dernière, et je suis toute contente. Je vais la voir aux Francos après, c'est sûr, il n'y a pas de questions à se poser ! J'aime trop. Elle est originale, il n'y a pas deux Nochka, il n'y a pas deux chanteuses comme elle. J'aime sa polyvalence, parce qu'en fait, elle fait tout. Du coup, je trouve ça ouf, pour une artiste, de tout faire. Et, je ne sais pas : elle est toute timide, et elle envoie, et elle a une voix qui fait des frissons dans tout mon corps. Donc, je suis très contente de l'avoir vu ce soir ! Et j'espère qu'elle ira le plus loin possible".

Conclusion : "ce serait génial que tous les artistes puissent passer par là"

"En vrai, ce serait génial que tous les artistes puissent passer par là, conclut Nochka ce soir-là. C'est vraiment hyper enrichissant. Alors, c'est très intense en une semaine, mais je pense que sur le long terme, ça va toujours nous servir. Je suis très reconnaissante, sachant qu'on n'est vraiment pas beaucoup chaque année à pouvoir le faire. C'est une très belle expérience".

Nochka chantera aux Francofolies, en juillet, dans la salle Verdière, comme beaucoup d'artistes du Chantier. La deuxième des quatre sessions de l'année 2024, au Chantier des Francofolies, commence ce lundi 4 mars, avec trois nouveaux artistes, Amalia, Cassien, et Visceral. Ils seront en concert le vendredi 8 mars à 20h30. Les autres sessions suivront du 25 au 29 mars puis du 15 au 19 avril.