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MHE : ce que l’on sait sur la maladie hémorragique qui touche les vaches dans 20 départements en France

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Alors que les cas de bovins contaminés par la maladie hémorragique épizootique (MHE) se multiplient, France Bleu fait le point sur ce virus qui touche une partie de la France ces dernières semaines. 20 départements sont concernés.

Les cas de MHE dans les élevages de bovins se multiplient en France Les cas de MHE dans les élevages de bovins se multiplient en France
Les cas de MHE dans les élevages de bovins se multiplient en France © Maxppp - Josselin Clair

Qu’est-ce que la maladie hémorragique épizootique ? Comment est-elle arrivée en France ? Mérite-t-elle son surnom de “Covid des vaches” ? Est-ce une maladie induite par le changement climatique ? Quel retentissement sur les élevages ? France Bleu fait le point sur la MHE, une maladie transmise par les moucherons, qui se multiplie chez les bovins et touche une partie de la France, notamment le Sud-Ouest.

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“Comme si elles avaient la grippe !”

Quels sont les symptômes de la MHE chez une vache ? Stéphan Zientara, vétérinaire et virologiste, directeur du laboratoire Anses de santé animale à Maisons-Alfort détaille : “On observe des ulcères au niveau de la cavité buccale et donc des animaux qui tirent la langue, des ulcères sur les trayons, qui leur font mal quand on les trait, des atteintes de la face. Les bêtes sont fatiguées, ne mangent pas bien. Et sont atteintes d’un syndrome fébrile généralisé. Comme si elles avaient la grippe !”. En règle générale, la bête guérit en quelques jours, à coups d’anti-inflammatoires ou d’antibiotiques. Mais certaines meurent, autour de 1%.

Quelques cas d’ovins ont été recensés, mais restent assez infimes. Les moutons, les chèvres et les camélidés sont réceptifs au virus, mais ne présentent pas de signes cliniques, ils ne sont pas malades, précise le ministère de l’Agriculture.

La maladie a-t-elle des effets sur la reproduction ? “Ça peut exister, mais d’une ampleur relativement faible”, tempère Stéphan Zientara. “Il semble qu’il y ait eu des cas d'avortement décrits en Espagne. Ce que l’on sait, en revanche, c’est qu’un virus très proche, la fièvre catarrhale ovine, a des effets sur la reproduction ; il induit une mortalité embryonnaire, ainsi que des anomalies du développement du fœtus.”

Une maladie transmissible à l’homme ?

“La probabilité est nulle”, tranche Stéphan Zientara. “Ça n’a jamais été observé et ce type de virus n’a pas les marqueurs qui lui permettent de se transmettre à l’homme.” Rien à voir avec la grippe aviaire, par exemple, qui peut, dans des cas très rares, contaminer des humains, et même en tuer.

Le rôle du réchauffement climatique

Est-ce une maladie favorisée par le réchauffement climatique ? "J’aurais tendance à penser que oui", soupèse Stéphan Zientara. "Quand un moucheron pique un bovin infecté, le virus se multiplie dans le vecteur, le moucheron. Plus la température augmente, plus la quantité de virus augmente. Donc lorsqu'il va piquer une autre bête, il lui injectera une dose plus importante de virus."

Cette année, les températures ont été estivales très tard, et restent assez douces pour la saison. "Vous avez donc une durée d’activité des moucherons qui est beaucoup plus longue", conclut le vétérinaire et virologiste. "Avec des températures très basses, vous n’avez plus de moucherons. C'est réglé !".

Un “Covid des vaches" ?

Certains l’appellent le “Covid des vaches”. Mais pour Stéphan Zientara, “la comparaison n’est pas optimale. La MHE est transmissible par les piqûres de moucherons, mais pas contagieuse, comme le Covid, qui se transmet par les voies aériennes. De plus, les manifestations cliniques sont différentes : la MHE n’engendre pas de syndromes respiratoires.”

Le seul point commun, selon le scientifique, c’est que les deux maladies ont émergé récemment en France : “Le virus SarsCov2 a été mis en évidence en 2019. Or la MHE, on la connaît depuis les années 50, même si elle n’a débarqué en France que cette année.”

Le virus a en effet été identifié aux États-Unis en 1955, alors que beaucoup de cerfs en mourraient. On l’a ensuite retrouvé au Japon, au Canada, en Australie, en Afrique… mais il a évité l’Europe jusqu’en 2022.

Arrivé en France par l’Espagne

Le virus est arrivé en Tunisie en 2021. L’année suivante, il a atteint la Sicile et la Sardaigne. Comment ? “Peut-être par le sirocco, le vent, qui a transporté des moucherons. Peut-être via des bateaux qui contenaient des moucherons infectés”, estime le directeur du laboratoire Anses de santé animale. La MHE s’est ensuite propagée en Andalousie. Puis, depuis le mois d’août, a infecté le Portugal et toute l’Espagne. Jusqu’à franchir la frontière avec la France.

Une augmentation exponentielle

Les trois premiers cas sur le territoire français ont été confirmés le 20 septembre. La semaine suivante, on en dénombrait 19. Le 6 octobre dernier, le ministère de l'Agriculture recensait 53 foyers de MHE. Le 12 octobre, le chiffre était multiplié par 10 : 453 foyers. Une semaine plus tard, le 20 octobre, 1.194 étaient comptabilisés. Et la maladie continue de se propager. Au 26 octobre, le ministère évoque 2.019 foyers confirmés. Dans le seul département des Pyrénées-Atlantiques, la préfecture dénombrait plus de 1.000 cas.

Au 22 novembre, 3.527 foyers de maladie hémorragique épizootique ont été recensés en France, selon le ministère de l'Agriculture. Lors du dernier bilan officiel, 20 départements étaient touchés : Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées, Haute-Garonne, Gers, Landes, Ariège, Aude, Tarn, Lot-et-Garonne, Gironde, Tarn-et-Garonne, Dordogne, Corrèze, Vendée, Deux-Sèvres, Loire-Atlantique, Lot, Haute-Vienne, Morbihan et Pyrénées-Orientales.

Une zone règlementée

Tous les élevages présents dans les 150 km autour d’un foyer sont placés en zone règlementée. Cela correspond à la zone entourée en orange sur la carte ci-dessous. Cela induit "des restrictions aux mouvements avec une interdiction de mouvements d’animaux vers un autre État membre de l’Union Européenne” précise le ministère de l’Agriculture. “Certaines destinations vers les pays tiers font également l’objet de restrictions.”

Les foyers de maladie hémorragique épizootique en France
Les foyers de maladie hémorragique épizootique en France - Ministère de l'Agriculture

Des coûts en plus pour les éleveurs

“Au niveau des exploitations, cela veut dire qu’il faut, avant de vendre une bête, réaliser un test sanguin qui doit revenir négatif et la désinsectiser”, résume Eric Mazin, éleveur à la Bastide-Clairence, au Pays basque, et membre du bureau de la FDSEA.

Le syndicaliste pointe les coûts induits par cette maladie dans un contexte économique déjà fragilisé par la hausse du coût des matières premières et la sécheresse de l’été 2022 : “Si on a une bête malade, on peut s’en sortir entre 50 et 100 euros. Entre les médicaments, le passage du vétérinaire... Il y a aussi le coût de la désinsectisation des animaux. Le flacon coûte près de 100 euros pour une vingtaine de bêtes.”

Lui, a eu trois bêtes infectées, sans trop de complications. “Pour ma génisse, qui était pleine, je l’ai vu assez tôt : elle bavait et avait arrêté de manger. Une piqûre d’anti-inflammatoires et c’est passé ! Mon voisin, en revanche, a perdu deux Blondes d’Aquitaine, qui se sont vidées de leur sang. Et pour les pertes, il n’y a aucune prise en charge de l’État.” Une Blonde d’Aquitaine adulte coûte en moyenne entre 1.500 et 2.000 euros.

Selon l'éleveur, la rapidité de détection est donc primordiale, ce qui induit de voir ses vaches tous les jours, exercice compliqué pour ceux qui les font paitre en montagne.

Une baisse du cours

La MHE a également impacté le prix de revente des bêtes. “Les cours ont chuté. Les broutards, les veaux de six mois, que l’on vend en Italie ou en Espagne, ont perdu 200 euros par tête. Avant l’arrivée de la maladie, on les vendait entre 1.200 et 1.400 euros”, estimait l’éleveur en octobre.

Les premières aides versées "cette semaine"

En visite jeudi dans un élevage bovin de Janvilliers (Marne), Gabriel Attal a annoncé de "premiers versements cette semaine" pour les élevages touchés par la maladie hémorragique épizootique (MHE). "Ça a mis du temps à arriver", a reconnu le Premier ministre mais "les guichets sont ouverts" et "les premiers versements interviendront cette semaine", afin que "dès la fin du mois, on ait un nombre important d'éleveurs qui puissent avoir été indemnisés".

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