Le dictionnaire amoureux de la Moselle : MADEMOISELLE DE TURMEL
Chaque matin, Nicolas Turon rend hommage à son département avec un texte drôle, tendre et complice, en forme de déclaration d’amour à la Moselle. Il choisit un emblème appartenant à l’histoire ou à l’actualité et le traite de manière décalée.
Anne est amoureuse.
De Jean Régnault, un bon parti, un jeune bourgeois, qui bat avec entrain le pavé de la ville de Metz à toute heure du jour et de la nuit pour mener ses affaires à bien.
Le père d’Anne n’a pas le temps de se réjouir pour sa fille, occupé qu’il est à diriger la cité messine : Joseph de Turmel est le premier magistrat de la ville.
Comme dans toutes les bluettes, le soir, Anne s’assied en soupirant sur le rebord de sa fenêtre. Front contre le carreau glacé pour calmer sa fièvre amoureuse, l’hiver ; humant le crépuscule et sa chaleur, l’été, comme un avant-goût de la passion à venir ; espérant en observant à son doigt leur bague de fiançailles une visite de son prince Jean, quel que soit le temps.
Un soir que la ville a déjà revêtu sa chemise de nuit et qu’Anne s’oublie à l’huis, elle entend un hurlement barbare. C’est quelqu’un qu’on assassine ! La plainte, désespérée, glaçante, se fraye un chemin dans les venelles de la vieille Metz, sa faufile sous les arches de la cathédrale Saint-Etienne, pour finir par remplir Anne d’un horrible pressentiment : elle est persuadée qu’on vient de violenter son prétendant.
L’aube donne raison à la jeune femme : on lui annonce le décès de Jean, pris à parti par une bande de quatre brigands (les trois d’Ungerer, plus d’Artagnan) du côté du pont Saint-Georges et balancé dans la Moselle.