Le dictionnaire amoureux de la Moselle : CYGNE
Chaque matin, Nicolas Turon rend hommage à son département avec un texte drôle, tendre et complice, en forme de déclaration d’amour à la Moselle. Il choisit un emblème appartenant à l’histoire ou à l’actualité et le traite de manière décalée.
Je m’appelle Bewick.
Je suis né à Metz, un jour de pluie. Je me souviens du martellement des gouttes qui s’écrasaient sur la paroi de mon œuf. Lorsqu’il fut temps de sortir, je leur rendais coup pour coup, coups de becs dans la coquille, jusqu’à extraire mon cou.
Oh… je pourrais résumer ma vie en quelques mesures de trompette. Mais nous ne sommes pas encore rendus au chant du cygne.
À peine sorti de l’œuf, j’ai aperçu papa, maman, mes trois frères et sœurs. Je ne me suis pas senti mortel ; nous autres, les ansériformes, formons l’espèce animale la plus ancienne sur terre. Présents depuis le crétacé, nous ne craignons rien ni personne.
Au début, je n’étais pas beau. Un duvet gris et une démarche boiteuse. Mon premier vol a été laborieux, lourd et puissant… Tout ça pour partir en vacances dans le sud, et toujours au même endroit…
Mais après l’adolescence, quelle majesté ! Mon cou s’est déployé, m’a conféré une grâce de ballerine. Le plan d’eau comme lac des cygnes. Notre barbotage tranquille inspire le respect, la faute à un air un rien condescendant, ou à notre plumage immaculé.
Prétentieux, un peu, mais nous le valons bien ! Sinon, comment serions-nous devenus des personnages de contes ? Sinon, pourquoi nous consacre-t-on un spectacle de son et lumière chaque été, dans la mare en contrebas du boulevard Poincaré ? Même les chanteurs populaires nous rendent hommage : il suffira d’un cygne...
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