Le canal de Bourgogne classé à l'Unesco ? "Il faut rassembler toutes les bonnes volontés"

France Bleu Bourgogne. Bernard Le Sueur vous êtes historien des gens, des canaux et des rivières, auteur en 2023 d'un ouvrage intitulé "au fil du canal de Bourgogne" aux éditions Glénat, en partenariat avec VNF et le département de la Côte d'Or. D'abord, si le canal de Bourgogne devait être un jour classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, ça ne serait pas une première.

Non, ça ne serait pas une première. Il y a déjà évidemment le canal du midi, a été classé en 1996. Et il y a aussi d'autres petits secteurs de rivière urbain, en particulier la Seine à Paris. Et puis vous avez un grand secteur sur la Loire autour de Chalonnes qui a lui aussi été classé. Et je crois qu'effectivement dans ce livre, ma conclusion, c'était que le canal de Bourgogne méritait un classement, méritait de rejoindre ses copains bourguignons et Franc-Comtois eux même classés et que ce classement, en quelque sorte, serait tout à fait le bienvenu, autant sur le plan culturel que patrimonial.

Les travaux de construction du canal de Bourgogne ont pris plus de 50 ans. C'était entre 1775 et 1832. Pourquoi à la base on a créé le canal de Bourgogne ?

Avant les canaux, les rivières portaient des bateaux uniquement au sein de leur bassin de navigation et les lignes de partage des eaux, c'est à dire ces lignes qui séparaient les bassins hydrographiques de chaque grande rivière, ne pouvaient pas être franchies par des bateaux. C'est à dire que si vous vouliez aller, par exemple de Nantes à Paris, il fallait aller jusque dans la région de Briare. On a créé donc le canal de Briare, puis après le canal du midi en 1680, puis entre 1780 et 1850, on va créer tous les canaux pratiquement à bief de partage qui vont relier tous les grands bassins fluviaux français dont évidemment le plus important, c'est le canal de Bourgogne.

Le tracé du canal de Bourgogne, il a été choisi comment ?

C'est quelque chose qui est très difficile à déterminer parce qu'il y a pendant 50 ans des bagarres pas possibles entre des ingénieurs, entre des spécialistes qui disent il faut passer par là. Et puis il y a aussi la pression politique et la pression économique. Il y a des villes qui veulent le canal, il y a des villes qui ne veulent pas le canal. Et finalement c'est une décision de l'administration, une décision des Ponts et chaussées qui fera passer le canal par tel ou tel endroit. Si vous voulez, la route, elle a eu son heure de gloire au XVIIIᵉ siècle, à la fin du XVIIIᵉ siècle, essentiellement avec Louis XV qui a fait les grandes routes nationales, etc. Là, le système de transport français, il est fondé sur les routes. Mais ce système, il échoue, c'est à dire qu'on n'arrive pas à alimenter en particulier les grosses villes, les grosses villes comme Dijon dans la région bourguignonne, comme Lyon au sud et comme Paris de l'autre côté, on n'arrive pas à les alimenter. Et donc il va y avoir toute une toute une époque où on va tout miser sur les canaux. Vous savez, en France, on est rigolo, on mise tout sur la route, on mise tout sur les canaux, on remise tout sur le chemin de fer après, puis encore sur la route un petit peu plus tard. Voilà, on met tous ses œufs dans le même panier et entre 1800 et on va dire 1850, pour simplifier les choses, on met tout sur les canaux.

Combien de temps ça peut prendre ce classement au patrimoine mondial de l'UNESCO ?

Ca va durer dix ou quinze ans, sans doute, ça va dépendre un petit peu comment les gens vont réagir, là, si vous voulez. Ce qui m'inquiète un petit peu, c'est que le projet en lui-même, il oppose des gens les uns aux autres, et ça, c'est pas bon pour le dossier de l'UNESCO. Il faut au contraire rassembler toutes les bonnes volontés, consensus rassembleur pour la présentation du dossier. Mais il faut aussi tout de suite penser à l'avenir, c'est à dire si jamais on a la chance et je le souhaite, de faire classer ce canal, comment on le exploitera après, au niveau touristique, au niveau des populations locales, etc.