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Téodorina, réfugiée ukrainienne née à Montpellier qui a fui deux guerres dans sa vie

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Téodorina est une réfugiée ukrainienne à Montpellier qui a fui la guerre contre la Russie. Elle est née à Montpellier avant d'aller vivre au Tchad. Avant de fuir la guerre de ce pays, direction l'Ukraine. À 38 ans, elle a de nouveau quitté sa ville à cause d'un conflit.

Téodorina, réfugiée ukrainienne née à Montpellier, a fui deux guerres dans sa vie.
Téodorina, réfugiée ukrainienne née à Montpellier, a fui deux guerres dans sa vie. © Radio France - Morgane Guiomard

Trois mois après le début de la guerre en Ukraine, France Bleu Hérault donne la parole à une réfugiée ukrainienne au parcours de vie particulier. Il s'agit de Téodorina, 38 ans. Elle est née à Montpellier en 1983 avant d'aller vivre au Tchad d'où était originaire son père ; pays que sa famille a dû fuir à cause de la guerre civile, direction l'Ukraine d'où était originaire sa mère. Trente ans après, cette femme a de nouveau fui une guerre : celle provoquée par la Russie. Elle est de retour dans sa ville natale alors que son mari et leur fille de huit ans sont en Lettonie. Témoignage

Téodorina, vous avez vécu pendant trente ans en Ukraine que vous avez dû fuir, pour arriver à Montpellier, là où vous êtes née en 1983 ?

Oui, c'est ça. Je suis née au cœur de Montpellier, près de l'esplanade du Peyrou. Toute ma vie ma mère m'a raconté mon enfance ici en France. Je rêvais voir Montpellier un jour. J'ai imaginé ce que me disait ma mère, elle disait que c'était très joli. 

Vous avez quitté Montpellier à l'âge de cinq ans. Maintenant que vous êtes de retour, vous êtes retournée à l'endroit ou vous viviez à l'époque avec votre papa et votre maman ? 

Oui et parfois c'est très bien que les choses ne changent pas. Le Peyrou n'a pas changé, la place de la Comédie non plus. Tout ça, c'est la même chose qu'avant. La seule qui a changé, c'est moi. Souvent, je me promène dans la rue, je souris. Tout le monde ne peut pas comprendre pourquoi, moi je sais : c'est parce que d'un côté, maintenant, je suis dans ma ville, en sécurité. D'un autre côté, dans mon autre ville, c'est la guerre.

Téodorina, vous êtes ici parce que vous avez dû fuir la guerre qui fait l'actualité en ce moment : la guerre entre la Russie et l'Ukraine. Mais déjà, quand vous étiez enfant, après Montpellier, vous êtes parti au Tchad parce que votre papa était originaire de là-bas. Et après, il y a fait sa carrière. Vous y avez vécu avec vos parents, jusqu'à fuir parce qu'il y avait la guerre civile. Déjà, enfant, vous avez fui une guerre. Quel souvenir vous en gardez ? 

Quand j'étais petite, je me rappelle de ce qu'était la guerre. C'est terrible. Il y avait des soldats partout. Je me rappelle qu'un jour, ma sœur s'était un peu blessée, par elle-même. Nous sommes allés dans un hôpital militaire, il y avait plein de soldats blessés. Et je me souviens de cette souffrance. Encore aujourd'hui, c'est dans ma tête.  

"La chose plus difficile, c'était de réaliser qu'on n'avait plus rien, qu'on était sans-abri."

En Ukraine, vous avez construit votre vie avec un mari, avec une fille. Et quand la guerre s'est déclarée, vous étiez en vacances en Lettonie et vous étiez partis avec très peu de bagages. Finalement, vous n'êtes même pas rentrés chez vous une dernière fois avant que la guerre commence ?

 Non. On était en vacances avec un petit sac à dos pour changer de vêtements. J'avais une paire de jeans, de vêtements d'hiver et c'est tout. On était parti seulement pour une semaine. On était absolument perdu. On se demandait ce qu'on allait faire. Personne ne pouvait nous envoyer nos affaires et de toute façon on ne pouvait nous les envoyer nulle part. La chose plus difficile, c'était de réaliser qu'on n'avait plus rien, qu'on était sans-abri. Avec absolument rien. Même sans diplôme, sans documents. Avec juste le passeport dans la poche et un peu d'argent.

Téodorina, vous avez 38 ans et déjà vous avez fui deux guerres dans votre vie : celle au Tchad, puis celle en Ukraine. Votre mari et votre fille de huit ans sont restés en Lettonie. Et pourtant, vous gardez le sourire ?

 Oui, parce qu'après tout ça, je peux vous dire que oui, on a perdu beaucoup. Mais l'essentiel, c'est la vie de tes proches. S'il y a une possibilité de les voir ou des les entendre, ça suffit pour sourire tout le temps. Tu n'as pas besoin d'argent. L'argent, tu peux en gagner. Mais si tu ne peux pas voir tes proches, si tu ne peux pas les entendre, tu ne peux pas sourire. Si tu peux les voir, il faut dire merci à ton destin d'avoir cette possibilité.

Je vous sens quand même émue. J'imagine que ça laisse des séquelles ?

 Bien sûr, c'était difficile. Mais quand même, c'est ce qui m'a appris à être forte. D'un autre côté, je suis habituée au fait qu'il y a des choses qu'on ne peut pas changer. Je ne peux pas arrêter la guerre moi-même. Je peux faire quelque chose pour soulager la vie des gens. Je peux servir, je peux les aider, mais il y a des choses que je ne peux pas changer, par exemple des choses plus globales comme la guerre. Ce qu'il reste à faire, c'est s'adapter et continuer à vivre pleinement la vie parce qu'on ne sait pas ce qu'il en sera demain.  

Téodorina, maintenant, vous êtes à Montpellier. Vous espérez trouver un hébergement et un travail ?

 J'espère trouver un hébergement et des amis. Pour le travail, à la base je suis traductrice (Elle parle français, anglais, espagnol, ukrainien et russe, ndlr). Avant j'enseignais ces langues. Donc on va voir ce que je ferai. Pour moi l'essentiel maintenant, c'est que je suis vivante. J'espère que Montpellier va m'accueillir et être ouverte comme moi je le suis pour cette ville. 

Si vous avez du travail ou que vous pouvez accueillir Téodorina chez vous, voici son adresse e-mail : teodorinakamis@gmail.com.

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