Moulonguet, les origines (Épisode 5)
29 mai 1999, jour d'adieu à Moulonguet. L’ASC reçoit Valence pour ce dernier match dans son stade de centre-ville. Ici c’est Amiens revient sur l'histoire de cet antre qui porte le nom d’un ancien président du club. Une plongée dans les origines du football à Amiens.
Décembre 1921. L'Amiens Athletic Club, qui ne s'appelle pas encore l'Amiens Sporting Club, inaugure son nouveau stade avec sa petite tribune de 500 places. Il a été aménagé en haut de la rue Louis-Thuillier dans le quartier Henriville, sur des terrains propriétés des hospices de la ville, grâce à un homme : le docteur Albert Moulonguet. L'homme, sommité de la ville, chirurgien en chef de l'Hôtel-Dieu est le président du club depuis 1913.
Le foot ? "Un sale sport d'Anglais"
Le football était jusque-là affaire de bonnes familles. Il est apparu à Amiens vers 1880, joué par les élèves du lycée, tous enfants de notables, dans le parc de La Hotoie.
La pelouse intérieure du vélodrome situé boulevard Châteaudun sera le premier lieu consacré à "ce sale sport d'Anglais", comme certains le discréditent. Un premier stade sera construit en 1909 dans l'actuel parc Jean-Rostand, dans le quartier Sainte-Anne, derrière les archives départementales qui abritaient alors le séminaire.
1914, la guerre éclate. Les hommes sont appelés sous les drapeaux et le cadet des enfants Moulonguet, prénommé Albert comme son père et footballeur comme ses frères à l'AAC, s'engage à 17 ans. Il ne reviendra pas. Affecté, le docteur Moulonguet fera ériger un monument aux morts au pied du stade. Un stade qui portera bientôt son nom (et quelque part celui de son fils) en 1931, un hommage à celui qui venait de quitter la présidence.
Des années fastes
Au début des années 1920, les dirigeants amiénois veulent jouer les premiers rôles et recrutent beaucoup de joueurs pour rivaliser avec les clubs du nord. L'AAC, sacré champion du nord en 1924 et 1927, fait alors partie des dix meilleures équipes françaises. Mais le refus du club de passer au professionnalisme en 1932 va casser cette dynamique puisque les meilleurs joueurs comme Ernest Liberati, premier passeur français en Coupe du monde, quitteront le club.
"Le samedi, il y avait des voitures partout"
En presque quatre-vingt ans de service, jusqu'à la construction de la Licorne en 1999, Moulonguet n'aura jamais été un chaudron. La mémoire embellit peut-être les souvenirs mais Moulonguet, avec ses tribunes sans toit et ses supporters debout derrière les buts, a sa part de légende. "On n'est pas les spécialistes de la liesse populaire, confie Pascal Pouillot, ancien président de l'ASC de 1993 à 2009. Mais il y avait des soirs où c'était très chaud, où les gens t'attrapaient à travers le grillage...". Le stade de la rue Louis-Thuillier a traversé les décennies, connu quelques épopées, lui qui, en plein quartier de centre-ville, faisait partie du décor et du quotidien. "Le samedi, il y avait des voitures partout, se remémore l'ancien attaquant Robert Buchot (de1962 à 1975). C'était des frites qu'on vendait, du contact... C'étaient une ambiance et une émotion. Les gens venaient pour ça...".
Intervenants :
- Robert Buchot, ancien joueur et entraîneur de l'Amiens SC
- Alain Trogneux, historien
- Didier Braun, ancien grand reporter à L'Équipe, fils de Jack Braun, joueur d'Amiens dans les années 1950
- Lionel Herbet, ancien journaliste auteur du livre Les Grands noms de l'ASC
- Pascal Pouillot, ancien président de l'Amiens SC de 1993 à 2009
- Fab d'ASC Vintage, compte Twitter sur l'histoire de l'Amiens SC