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XIXe siècle, contrebande à Banyuls sur Mer

À retrouver dans l'émission
Hélène Legrais
Du lundi au vendredi à 07h25
De

Quand les contrebandiers siégeaient au conseil municipal de Banyuls sur Mer ? ! Hélène Legrais nous raconte.

Illustration
Illustration © Getty - Nathalie Dupont

J’ai bien lu : une république contrebandière ?

Ce n’est pas de moi, c’est un titre que les Banyulencs se sont fièrement décernés à l’époque. Il faut rappeler que le Traité des Pyrénées a déplacé la frontière et qu’ensuite malgré les promesses, la monarchie française a instauré des taxes douanières et l’impôt sur le sel. Une intense contrebande s’organise aussitôt à travers la montagne. La plaque tournante, c’est Banyuls dont le territoire jouxte la frontière. Le chemin de fer n’est pas encore arrivé et la commune de Cerbère n’existe pas. La côte, qu’on n’appelle pas encore Vermeille, est truffée de coves, de grottes très pratiques pour cacher les marchandises arrivées par bateau avant de les acheminer vers la France ou l’Espagne. Dans la cova forada, on stocke ainsi le sel venant de Cardona en Catalogne ou des salines du Languedoc. Les Banuylencs ont reçu de Louis XI en 1462 le droit de pêche et de commerce sur toute la Méditerranée. Ils vont bien en profiter allant chercher du tabac de contrebande jusqu’à Gênes en Italie en barques catalanes tandis que des vaisseaux britanniques apportent jusque dans leurs eaux des marchandises venant de Gibraltar ! Une véritable économie même pas souterraine … 

Parce que tout le monde le sait ?

C’est de notoriété publique. En 1817, le directeur départemental des douanes recense très officiellement 8 « sociétés », c’est le nom qu’il emploie, avec les noms des chefs et des divers « associés ». En tout 58 hommes parmi les plus influents du village puisqu’on y trouve pas moins de 8 conseillers municipaux dont un adjoint, Sagols. Et même les deux fils du maire, Bonaventure et Joseph Laurent ! Le tout avec la complicité du curé. Ces sociétés recrutant de la main d’œuvre pour les transbordements, c’est tout Banyuls qui est impliqué. Les marchandises changent suivant les époques : en 1817 on trafique du tabac et du sel, en 1833 des tissus anglais, en 38 de l’huile puis le tabac revient en force.

Et les douaniers laissent faire ? 

Non bien sûr, ils connaissent les coves et les inspectent régulièrement mais les contrebandiers sont passés maîtres dans l’art de leur glisser entre les doigts. Des caches souterraines sont aménagées dans la montagne à la tour de Querroig, au col de Banyuls, au Puig del Torn … C’est là que les contrebandiers du Vallespir prennent le relais. Parfois, il y a affrontement avec les gabelous et les empoignades sont féroces. En 1833, les Banuylencs incendient le Linx, la felouque des douanes. Douanes qui finissent d’ailleurs par avoir du mal à recruter. Il faudra enrôler quelques anciens contrebandiers … qui ne feront pas d’excès de zèle, vous l’imaginez ! Et quand les contrebandiers capturés, ça arrive, sont condamnés au fouet, aux galères ou à la peine de mort, la mairie de Banyuls se plaint de la sévérité de la répression auprès du sous-préfet de Céret !     

NB : Je conseille les travaux de Jacques Saquer à celles et ceux qui voudraient en savoir davantage. 

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