Gérard Depardieu : le passage contesté de l'émission "Complément d'enquête" authentifié par un huissier

France Télévisions contre-attaque après les doutes de la famille de Gérard Depardieu et du chef de l'État Emmanuel Macron sur la bonne foi des équipes de "Complément d'enquête". Le passage de l'émission diffusée le 7 décembre dans lequel l'acteur semble tenir des propos à caractère sexuel au sujet d'une petite fille a été "authentifié" par un huissier de justice, a annoncé ce vendredi le groupe de télévision public dans un communiqué. Cette réaction intervient après des déclarations du président Emmanuel Macron, mercredi sur France 5, laissant entendre que la séquence avait pu être modifiée au montage, comme l'a auparavant affirmé la famille de l'acteur.

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"Aucun doute et aucune ambiguïté"

"Il n'y a aucun doute et aucune ambiguïté sur le fait que c'est bien la jeune fille à l'image qui est ciblée par les propos de Gérard Depardieu", a assuré France Télévisions, selon qui "le reportage de 'Complément d'enquête' sur Gérard Depardieu a été réalisé dans le plus grand respect des règles déontologiques". Mandaté ce jeudi pour "authentifier et certifier les images et les propos concernés", un "huissier a pu visionner les rushs" (les images brutes, sans montage), a indiqué France Télévisions. Il "atteste dans son constat qu'il s'agit d'une seule et même séquence montrant Gérard Depardieu regardant une démonstration équestre". Il atteste également "qu'au cours de la séquence, il a pu constater les propos tenus par Gérard Depardieu et 'qu'à l'exception de la jeune fille, seuls des cavaliers d'apparence masculine entrent en premier plan des caméras'".

Ces images ont été tournées par l'écrivain Yann Moix lors d'un voyage de l'acteur en Corée du Nord en 2018, et diffusées dans le magazine d'investigation de France 2 "Complément d'enquête". On y voit Gérard Depardieu multiplier les propos misogynes et insultants en s'adressant à des femmes, et en prononcer d'autres à caractère sexuel lorsqu'une petite fille à cheval passe à l'image.

Emmanuel Macron émet des doutes

Interrogé ce mercredi sur l'acteur, par ailleurs mis en examen pour viols depuis 2020, Emmanuel Macron a répondu : "Il y a parfois des emballements sur des propos tenus, je me méfie du contexte (...)". "J'ai vu les images, j'ai entendu aussi qu'il y avait des polémiques sur les mots qui étaient en décalage avec les images" a poursuivi le chef de l'État dans l'émission "C à vous" sur France 5 reprenant les arguments de membres de la famille Depardieu dans une tribune du Journal du dimanche. Ces derniers, dont l'actrice Julie Depardieu, dénoncent une "cabale" et évoquent "une mise en scène" et des plans de coupe "suspects" dans le reportage. Cette thèse a aussi été relayée dans l'émission de Cyril Hanouna "Touche pas à mon poste" sur C8.

Revenant sur le sujet de la Légion d'honneur (remise en 1996 par Jacques Chirac), Emmanuel Macron a également ouligné que c'"est un Ordre" dont il est "en effet le grand maître", une distinction "qui n'est pas là pour faire la morale". "Et donc ce n'est pas sur la base d'un reportage ou de telle ou telle chose qu'on enlève la Légion d'honneur à un artiste parce qu'à ce tarif là, on aurait enlevé la Légion d'honneur à beaucoup d'artistes", a encore mis en avant le président de la République qui a pris le contre-pied de sa ministre de la Culture. Rima Abdul Malak avait annoncé sur la même chaîne vendredi qu'une "procédure disciplinaire" serait engagée par la Grande Chancellerie de la Légion d'honneur à l'encontre du comédien-star.

Emmanuel Macron s'est aussi dit "grand admirateur de Gérard Depardieu (...) un immense acteur". "Il a fait connaître la France, nos grands auteurs, nos grands personnages dans le monde entier (...) il rend fier la France" a-t-il également déclaré. La prise de position du Président a été rapidement dénoncée par tous les défenseurs des droits des femmes.

La société des journalistes de France Télévisions s'indigne

Les mots du président de la République sur le travail des journalistes de l'émission "Complément d'enquête" ont provoqué la colère des équipes du groupe public. Emmanuel Macron a partagé une "fake news", a dénoncé ce vendredi dans un communiqué la société des journalistes (une association de journaliste qui se structure au sein d'une rédaction) de la rédaction nationale de France Télévisions. La SDJ "exprime son indignation" et apporte "son soutien à Complément d'enquête" car, en tenant ces propos, Emmanuel Macron "légitime les tentatives de déstabilisation de l'émission" et "décrédibilise aussi le travail des journalistes en mettant en doute leur professionnalisme".

La SDJ de France Télévisions déplore aussi des "critiques infâmantes pour une émission qui considère le contradictoire comme l'un des principes majeurs de l'investigation". Pour conclure, l'association affirme que "Complément d'enquête respecte la présomption d'innocence" pour répondre au chef de l'État qui, pour défendre Gérard Depardieu, a déclaré : "Il y aussi une présomption d'innocence qui existe".