Passer au contenu
Publicité

TÉMOIGNAGES - "Je me suis rendu compte qu'on voyait plus la vie" : ces adolescents ont passé "dix jours sans écran"

- Mis à jour le
Par
  • France Bleu

Pour alerter sur les dangers de la surexposition des jeunes aux écrans, enfants et adolescents participent au challenge "Dix jours sans écran" depuis le début de l'année. Ces jeunes racontent comment ils ont vécu ce défi.

Le challenge "Dix jours sans écran" a été inventé au Québec en 2003 et prend de l'ampleur en France depuis 2018 Le challenge "Dix jours sans écran" a été inventé au Québec en 2003 et prend de l'ampleur en France depuis 2018
Le challenge "Dix jours sans écran" a été inventé au Québec en 2003 et prend de l'ampleur en France depuis 2018 © Maxppp - Francois Destoc / Le Telegramme

Les smartphones dans les tiroirs fermés à double tour, les tablettes tactiles cachées dans la chambre des parents : depuis le début de l'année, enfants et adolescents de France participent au défi collectif "Dix jours sans écran" dans les écoles, lancé par le "Collectif surexposition écrans" qui y voit des bénéfices concrets comme l'amélioration de l'humeur, plus de lecture, d'activité physique et une augmentation du temps passé en famille.

Publicité

L'objectif est de déconnecter les jeunes, de plus en plus accros à leurs écrans. Selon une étude publiée par le Centre national du livre, les jeunes de 7 à 19 ans passent trois heures et 11 minutes sur les écrans chaque jour. Comment ces adolescents ont-ils vécu l'expérience ? Tour d'horizon des témoignages recueillis par les radios locales du réseau France Bleu.

Un sevrage difficile ?

La mission a d'abord été difficile à accepter pour certains adolescents, habitués à la console et aux jeux vidéos. "Le premier jour, je suis devenu fou !" raconte Sammy, 10 ans, élève de CM2 de l'école Louis Pergaud, à Pontarlier (Doubs). Dans sa classe de 28 élèves, 19 possèdent des smartphones à la maison et tous ses camarades le confessent : la télé a été compliquée à éteindre.

Mahon admet même ne pas avoir réussi le défi à 100% : "Je n'avais pas du tout envie de le faire. Je regarde tout le temps la télé. J'ai beaucoup craqué. Les jeux vidéos, on peut s'en passer, mais la télé, c'est trop difficile", explique le jeune garçon, avec honnêteté, à France Bleu Besançon. À Bordeaux, Sérine aussi a un peu triché : "J'ai regardé des vidéos, mais pas beaucoup la télé", dit-elle en reconnaissant que ses parents n'ont pas vraiment donné l'exemple. Pourtant, ils connaissent les risques des écrans sur leur santé : Notre tête va moins marcher et on va devenir un peu fou", lance Baptiste, élève de CE1 dans une école du Gard.

"Dans la plupart des cas, ils ont diminué leurs temps d'écran à la maison, assure Christelle Juillet, directrice de l'école Louis Pergaud, qui estime le défi réussi même en salle de classe : "Nous avons essayé de couper les vidéoprojecteurs", précise-t-elle. Les tablettes ont aussi été rangées et le tableau numérique éteint.

Dans cette classe de 28 élèves, 19 possèdent des smartphones à la maison.
Dans cette classe de 28 élèves, 19 possèdent des smartphones à la maison. © Radio France - Julie Viallon

Du temps gagné au quotidien

Mais l'expérience a finalement été bénéfique pour beaucoup et notamment pour les élèves de la classe de CM2 de l’école Jeanne d’Arc à Mende (Lozère). Ethan, 10 ans, a eu du temps pour réaliser d'autres activités : "Tu te rends compte du temps que tu passais sur les écrans alors que t'aurais pu faire plein d'autres choses comme jouer dehors, faire tes devoirs, faire des tâches ménagères et plein de choses que tu pouvais faire au quotidien, mais que tu ne faisais pas à cause des écrans", confie-t-il à France Bleu Gard Lozère. "Je me suis rendu compte qu'on voyait plus la vie", philosophe le jeune Sammy, pour qui le défi partait pourtant mal. Un élève de l'école André-Malraux de Fourques (Gard), où le défi a été relevé en février, s'est même lancé dans un nouveau sport : "L'année dernière, je me suis mis à faire du skate [...] et je me suis rendu compte que j'aimais ça. J'en fais encore aujourd'hui".

Aidés par les familles et les enseignants qui les accompagnaient, les enfants ont redécouvert une vie sans écran : "Je suis beaucoup sorti et je m'amusais bien aux jeux de sociétés", assure Enzo à Pontarlier. Ces jeux étaient parfois prêtés par Isabelle, une fois la journée à l'école terminée : "Les enfants étaient contents de découvrir un jeu qu’ils ne connaissaient pas et de jouer avec leurs parents. Ç'a été très bénéfique".

Pendant dix jours, les élèves de la classe de CM2 de l’école Jeanne d’Arc à Mende (Lozère) n’ont pas eu accès aux écrans
Pendant dix jours, les élèves de la classe de CM2 de l’école Jeanne d’Arc à Mende (Lozère) n’ont pas eu accès aux écrans © Radio France - Said Makhloufi

Un comportement moins agité

Le sevrage forcé a aussi calmé les esprits de ces jeunes. "Quand je regardais les écrans, j'étais souvent en colère, reconnait Ethan. Mes parents ont trouvé que c'était bien parce que là, on pouvait passer plus de temps ensemble". Mylène Pernel, enseignante en Lozère, a vu des élèves plus apaisés pendant le défi : "Je trouve qu'il y a moins d'enfants qui sont fatigués le matin et certains me disaient même qu'ils trouvaient qu'ils dormaient beaucoup mieux", détaille-t-elle. Les enfants sont aussi plus attentifs à ce qui les entoure. Julie, mère d'une petite fille, dans le Doubs, raconte à franceinfo que le changement a été vite perceptible : "Avec la télé, elle est tellement focus, qu'elle oublie d'aller aux toilettes. Là, nous n'avons plus ce problème-là".

Inventé au Québec en 2003, ce challenge prend de l'ampleur en France depuis 2018. Cette année, 477 établissements scolaires (maternelles, primaires, collèges et lycées) y participent.

Pas de téléphone avant 11 ans, ni de réseaux sociaux avant 15 ans

Le défi "Dix jours sans écran" débute quelques semaines après la publication d'un rapport remis fin avril à Emmanuel Macron. Des experts y préconisent d'interdire les écrans aux enfants de moins de 3 ans et les téléphones portables avant 11 ans, en limitant strictement l'accès aux réseaux sociaux pour les adolescents. Les dix experts de la commission dépeignent les réseaux sociaux comme "facteurs de risque" de dépression ou d'anxiété en cas de "vulnérabilité préexistante", et jugent "alarmant" le niveau d'exposition des enfants à des contenus pornographiques et violents.

Il faut "limiter autant que possible" l'usage des téléphones portables et des téléviseurs dans les maternités, propose encore la commission, qui voudrait voir interdire les ordinateurs et téléviseurs dans les crèches et les classes maternelles. Elle appelle à des "actions renforcées" auprès des assistantes maternelles. "Remettons l'outil numérique à sa place : jusqu'à au moins six ans, l'enfant n'a pas besoin d'écran pour se développer" a insisté Servane Mouton, neurologue et co-présidente de la commission, devant la presse à l'Élysée.

"Il faut réapprendre aux parents à jouer avec leurs enfants", a-t-elle ajouté. "L'enfant a besoin d'interaction, d'être à l'extérieur, de jouer avec ses pairs, de chanter, danser, courir. Il ne faut pas que l'écran écrase ces besoins-là". Parallèlement à l'interdiction des écrans à l'école maternelle, la commission déconseille l'équipement individuel en élémentaire.

Ma France : Améliorer le logement des Français

Quelles sont vos solutions pour aider les Français à bien se loger ? En partenariat avec Make.org, France Bleu mène une consultation citoyenne à laquelle vous pouvez participer ci-dessous.

L'info en continu

Publicité

undefined