Le fixeur de Radio France en Ukraine à la rencontre des élèves de l'école de journalisme de Bordeaux

"Dobryï den, c'est bonjour en ukrainien !" Yachar Fazylov, 52 ans, est le "fixeur" de Radio France en Ukraine. Depuis avril 2022, l'ancien professeur de français en Crimée accompagne les reporters et techniciens du groupe audiovisuel de service public dans leur couverture de la guerre. Traducteur, soutien logistique mais aussi garde du corps, ce citoyen ukrainien est un peu l’ange-gardien de ceux qui racontent le conflit depuis l'invasion russe. De passage dans le Sud-Ouest, celui qui porte souvent le gilet par balle est venu prodiguer quelques conseils aux élèves-journalistes de l'IJBA.

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"À l'époque, je vivais en Crimée où je travaillais comme prof de français. La vie était belle, la mer, les montagnes, le tourisme, le vin et d'un coup, en 2014, le début de l'occupation russe" marque le début de l'exil pour Yachar Fazilov qui, de fil en aiguille, grâce à sa voiture et à sa maîtrise des langues, va devenir "fixeur", un métier dont il ne connaissait pas l'existence auparavant.

"Comment est-ce qu'on devient "fixeur" ? Moi, je voudrais savoir quel lien affectif vous entretenez avec les journalistes ? Ma question à moi est peut-être bateau, mais j'aimerais savoir quelle est l'anecdote qui vous a le plus marqué ?" Durant plus d'une heure, Yachar Fazylov répond aux questions de Lisa, Quentin ou encore Alexandre, élèves en première année à l'IJBA.

"Quand les Russes font sauter le barrage de Kakhovka en juin 2023, nous étions dans la région de Kherson avec Camille Magnard, c'était trois quarts d'heure de bombardements, c'était flippant", raconte Yachar Fazylov qui égrène ses souvenirs avec les différents envoyés spéciaux de Radio France en Ukraine. "J'ai aussi travaillé avec Agathe Mahuet à Kherson pour la dernière nuit avant la libération, pas d'électricité, pas de chauffage, ça tapait énormément, c'est l'expression pour dire que l'artillerie russe bombardait la province. Et puis avec Thibault Lefèvre, on a découvert les atrocités commises par les Russes lors du massacre de Boutcha ou à Irpin, c'était très, très dur moralement."

Responsable de la formation radio à l'IJBA, Olivier Uguen salue la venue de Yachar Fazylov auprès des apprentis journalistes. "C'est important pour nous, car nous avons vécu un drame récemment au sein de l'école. Un ancien étudiant, Frédéric Leclerc-Imhoff, est décédé sur le front ukrainien au cours d'un reportage." Tué par un éclat d'obus, l'ancien vidéaste qui travaillait pour BFMTV était un homme de terrain aguerri. Une expérience que tous les jeunes candidats ne partagent pas. "Être reporter de guerre, ça ne s'improvise pas. On ne part pas comme ça la fleur au fusil pour couvrir un conflit sans l'avoir préparé, et ce type de rencontre avec Yachar Fazylov, qui est là pour aider et être l'ange-gardien des journalistes sur le terrain, c'est vraiment très utile pour les futurs reporters", ajoute Olivier Uguen, lui-même ancien de Radio France.

Yachar Fazilov est devenu fixeur "pour se rendre utile à son pays". Son objectif depuis le début de l'invasion russe en février 2022 ? "Que l'on parle de l'Ukraine, que l'Europe n'oublie pas la guerre et que l'on fasse entendre ce qui se passe dans mon pays". Ce métier de raconter le conflit, "les journalistes de Radio France le font de manière excellente, avec beaucoup de courage !"